Citation de cette fiche : Vigne J.-D. & Pascal M., 2003. L'Ours brun : Ursus arctos Linné, 1758. Pages 288-289, in : Évolution holocène de la faune de Vertébrés de France : invasions et disparitions (M.Pascal, O. Lorvelec, J.-D. Vigne, P. Keith & P. Clergeau, coordonnateurs), Institut National de la Recherche Agronomique, Centre National de la Recherche Scientifique, Muséum National d'Histoire Naturelle (381 pages). Rapport au Ministère de l'Écologie et du Développement Durable (Direction de la Nature et des Paysages), Paris, France. Version définitive du 10 juillet 2003.
L'Ours brun
L'aire de répartition initiale de l'Ours brun, circum-holarctique, s'étendait depuis l'Afrique du Nord-Ouest jusqu'au Japon et à l'extrémité est de la Sibérie, pour sa partie paléarctique, et depuis l'Alaska jusqu'au nord du Mexique pour sa partie néarctique (Wilson & Reeder, 1993). C'est aux temps historiques que l'espèce a progressivement disparu de nombreuses régions, notamment de la majeure partie de l'Europe.

L'Ours brun est signalé dans les gisements du Pléistocène moyen d'Europe occidentale (Crégut-Bonnoure, 1996). Les populations d'Ours brun d'Europe occidentale et du sud de la Scandinavie sont issues de l'expansion post-glaciaire de populations de la péninsule ibérique et du sud-ouest de la France (Taberlet & Bouvet, 1994 ; Hewitt, 1999). La présence de l'espèce est attestée au Tardiglaciaire dans les deux tiers méridionaux de la France continentale, en plaine comme en montagne. Elle occupe encore ces deux milieux dans pratiquement toutes les régions de France durant le Mésolithique (Vigne et al., 1999), le Néolithique et les Âges des Métaux, et ne semble avoir régressé de manière notable qu'à partir du début de l'Ère Chrétienne (PTH, 1998).

Actuellement, l'Ours brun n'est plus représenté en France continentale que par sa petite population pyrénéenne relique qui a été récemment renforcée par l'apport d'individus de l'Europe centrale (Camara, 1985).

Absent de la faune indigène corse, l'Ours y a été introduit à la fin du Moyen Âge (15ème siècle), probablement sous la forme d'animaux apprivoisés destinés aux spectacles (Poplin et al., 1988 ; Vigne, 1999). Des individus échappés ou relâchés ont sans nul doute constitué de petites populations marronnes dans les zones montagneuses du nord et du sud de l'île, comme l'attestent de nombreux textes ainsi que des restes fossiles (Vigne, 1988 ; inédit). L'espèce n'est plus signalée de Corse après le 17ème siècle.

Exceptées les attaques aux troupeaux d'ovins domestiques, aucune information relative à l'impact qu'a pu avoir cette introduction sur l'écosystème insulaire n'est disponible, en particulier sur les populations de mouflons. De même, le manque de recul ne permet pas actuellement d'établir l'impact du récent renforcement de sa population pyrénéenne sur l'écosystème montagnard.

Ressources
Experts
Fiche rédigée par Jean-Denis VIGNE
Muséum national d'Histoire naturelle
Anatomie Comparée
55 rue Buffon
75005 Paris

Michel PASCAL
Insitut National de la Recherche Agronomique
Campus de Beaulieu - Avenue du Général Leclerc
35042 Rennes Cedex
Bibliographie

Camara J.-J., 1985. L'Ours brun Ursus arctos. In : Atlas des Mammifères de France. Société Française pour l'Étude et la Protection des Mammifères - Muséum National d'Histoire Naturelle, Paris : 114-115.

Crégut-Bonnoure E., 1996. Ordre des Carnivores. In : Les grands mammifères plio-pléistocène d'Europe (Guérin C. & Patou-Mathis M. edts.). Masson, Paris : 155-230.

Hewitt G.M., 1999.- Post-glacial re-colonization of European biota. In : Molecular genetics in animal ecology (Racey P.A., Bacon P.J., Dallas J.F. & Piertney S.B. éds.). Biol. J. Linn. Soc., 68 : 87-112.

Poplin F., Vigne J.-D. & Gauthier A., 1988. Données nouvelles sur l'Ours (Ursus arctos, Carnivora, Mammalia) en Corse. Bulletin d'Ecologie, 19 (2-3) : 189-194.

PTH, 1998. Base de données constituée entre 1994 et 1998 dans le cadre du Programme National Diversité Biologique (PNDB) du CNRS (Programme Environnement, Vie et Société) pour les besoins du projet "Processus Tardiglaciaires et Holocènes de mise en place des faunes actuelles" (PTH). Gestion scientifique de la base : Archéozoologie et Histoire des Sociétés, CNRS - Muséum National d'Histoire Naturelle (ESA 8045), Paris.

Taberlet P. & Bouvet J., 1994. Mitochondrial DNA polymorphism, phylogeography and conservation genetics of the brown bear (Ursus arctos) in Europe. Proc. Royal Soc. London, B 255 : 195-200.

Vigne J.-D., 1988. Les Mammifères post-glaciaires de Corse, étude Archéozoologique (XXVIe suppl. à Gallia Préhistoire). CNRS, Paris : 337 pp.

Vigne J.-D., 1999. The large “true” Mediterranean islands as a model for the Holocene human impact on the European vertebrate fauna ? Recent data and new reflections. In : The Holocene History of European Vertebrate Fauna. Modern Aspects and Research (N. Benecke, editor). Deutsches Archäologisches Institut Eurasien-Abteilung. Verlag Marie Leidorf GmbH Rahden/Westf. : 295-322.

Vigne J.-D. et al., 1999. La faune à 8000 ± 1000 ans BP. In : Antoine P. et al., La France pendant les deux derniers extrêmes climatiques. Variabilité naturelle des environnements. Cartes à 1/ 1 000 000. Paris : CNF-INQUA et ANDRA, 67 p., 2 cartes 1/1000000e.

Wilson Don E. & Reeder DeeAnn M. (Eds), 1993. Mammals species of the world. Smithsonian Institut Press, Washington & Londres : 1207 pp.