Citation de cette fiche : Léger F., 2003. Le Vison d'Amérique : Mustela vison Schreber, 1777. Pages 284-286, in : Évolution holocène de la faune de Vertébrés de France : invasions et disparitions (M.Pascal, O. Lorvelec, J.-D. Vigne, P. Keith & P. Clergeau, coordonnateurs), Institut National de la Recherche Agronomique, Centre National de la Recherche Scientifique, Muséum National d'Histoire Naturelle (381 pages). Rapport au Ministère de l'Écologie et du Développement Durable (Direction de la Nature et des Paysages), Paris, France. Version définitive du 10 juillet 2003.
Le Vison d'Amérique
L'aire de répartition initiale du Vison d'Amérique est limitée à l'Amérique du Nord, à l'exception du Mexique, du Texas, de la Floride et des terres situées au nord du cercle polaire arctique (Banfield, 1974 ; Linscombe et al., 1982). L'espèce a été introduite dans les îles britanniques, dans plusieurs pays d'Europe continentale ainsi qu'en Sibérie (Wilson & Reeder, 1993).

Son élevage, destiné à la pelleterie, a débuté vers 1870 aux Etats-Unis, puis s'est propagé dans de nombreuses régions du globe (D'Aigneaux, 1926, 1927 ; Villemin, 1956, 1962). Les fondateurs de ces populations domestiques sont principalement originaires de l'Alaska, du Québec et du Labrador (Linscombe et al., 1982).

En France, l'élevage de l'espèce débute en décembre 1926 par l'importation de 15 reproducteurs (5 trios constitués de deux femelles et d'un mâle) provenant d'un élevage de la région des grands lacs dans le Minnesota (Etats-Unis) et installés au sein des deux grandes renardières de Combloux et Megève en Haute-Savoie (Henry, 1927, 1929 ; Léger, 2001). À la fin des années 1920, le territoire compte une dizaine d'élevages, l'essentiel du cheptel étant localisé en Alsace où se situe, à Aubure, la plus grande ferme de l'époque qui compte 80 couples reproducteurs. Après une très éphémère période de prospérité, la majorité de ces élevages disparaît au cours des années 1930, victimes de la crise économique de 1929 et du cours fluctuants des fourrures (Léger, 2001). C'est à l'issue de la seconde guerre mondiale, notamment au cours des décennies 1950 et 1960, que l'élevage du Vison d'Amérique connaît un nouvel essor en France. Au début des années 1950, ces élevages, au nombre d'une vingtaine (Mamy, 1953), sont localisés, pour ce que l'on sait de 12 d'entre eux (Cassard, 1953), en majeure partie sur la façade est du pays (11/12). En 1959, leur nombre est estimé à 600 (Joly, 1959) et, en 1962, les 250 à 300 visonnières françaises hébergent un cheptel de 20 à 22 000 femelles reproductrices et 5000 à 5500 mâles (Coche, 1963). Parmi ces élevages, seuls deux ou trois comptent alors plus de 1000 femelles, et une vingtaine 300 à 400, chiffres témoignant de la dominance des petites structures à cette époque. Au cours des années 1960, l'élevage du Vison d'Amérique engage une mutation caractérisée par la création de grandes visonnières pouvant compter plusieurs dizaines de milliers de femelles reproductrices et une délocalisation des sites d'élevage vers la Bretagne afin de bénéficier de l'abondante source d'alimentation constituée par les sous produits de la mer et des abattoirs. Après la crise de la profession au milieu des années 1980, le nombre de visonnières décroît et, en 2001, il ne subsiste en France qu'une vingtaine de fermes.

Le développement de l'élevage du Vison américain en Europe s'est accompagné de la constitution de populations marronnes occupant de vastes secteurs à partir de sujets évadés (Dunstone, 1993). En France, au cours des dernières décennies, des observations en nature sont rapportées de la plupart des départements français hébergeant des fermes d'élevage. Toutefois, ce n'est qu'à partir des années 1970 que sont signalées en Bretagne les premières populations marronnes (Phelipot, 1974 ; Braun, 1985 ; Lafontaine, 1988 ; Gachet, 1990). Une récente enquête (1999) réalisée par l'Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage a mis en évidence l'existence de quatre populations installées. La première occupe la majeure partie de la Bretagne et poursuit son expansion vers la Normandie (Manche, Calvados et Orne) et les Pays de Loire (Mayenne et Loire-Atlantique). La seconde, localisée dans le nord du département de la Charente, dans le Haut limousin (Confolais) et l'Angoumois-Ruffecois, occupe la haute vallée de la Charente et différents affluents. La troisième, en cours d'installation, occupe plusieurs secteurs du réseau hydrographique de l'Adour dans les départements des Hautes-Pyrénées, des Pyrénées- Atlantiques, du Gers et des Landes et entre en contact avec des populations reliques du Vison d'Europe (M. lutreola) du sud-ouest du pays, dans la Chalosse et le Bas Armagnac. Une quatrième enfin occuperait le bassin de la Tardoire et de son affluent le Trieux dans le département de la Haute-Vienne.

Si la raréfaction du Vison d'Europe lui est souvent attribuée, l'impact du Vison d'Amérique sur le fonctionnement de ses écosystèmes d'accueil n'est pas documenté et ses populations marronnes ne font pas l'objet d'opérations de gestion spécifiques.

En France, le Vison d'Amérique figure au nombre des espèces susceptibles d'être classées nuisibles et gibier.

Ressources
Experts
Fiche rédigée par François LEGER
Bibliographie

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