Citation de cette fiche : Pagano A. & Lorvelec O., 2003. La Grenouille verte comestible : Rana kl. esculenta Linné, 1758. Pages 156-157, in : Évolution holocène de la faune de Vertébrés de France : invasions et disparitions (M.Pascal, O. Lorvelec, J.-D. Vigne, P. Keith & P. Clergeau, coordonnateurs), Institut National de la Recherche Agronomique, Centre National de la Recherche Scientifique, Muséum National d'Histoire Naturelle (381 pages). Rapport au Ministère de l'Écologie et du Développement Durable (Direction de la Nature et des Paysages), Paris, France. Version définitive du 10 juillet 2003.
La Grenouille verte comestible
Depuis les travaux de Berger (1966), la Grenouille verte comestible est reconnue comme un taxon hybride issu du croisement de la Grenouille verte rieuse (Rana ridibunda) et de la Grenouille verte de Lessona (R. lessonae).

Son aire de répartition, proche de celle de R. lessonae, s'étend de la France au bassin de la Volga en Russie (Günther, 1997 ; Anonyme, 2002). Pour la partie occidentale de son aire de répartition, Graf & Polls-Pelaz (1989) précisent que l'espèce est présente dans toute la partie nord et le centre de la France continentale et dans la majeure partie de l'Europe centrale, à l'exception des zones les plus méridionales (Balkans, péninsules ibérique et italienne ainsi que sud et sud-ouest de la France). Les populations du sud de l'Angleterre résultent probablement d'introductions (Arnold, 1995 ; Günther, 1997 ; Arnold & Ovenden, 2002).

Les observations récentes (en 1995) de la Grenouille verte comestible dans le sud-ouest et le sud de la France continentale (Ondres dans les Landes, Peyrehourtic en Gironde et Les Peyrets dans les Bouches du Rhône), suggèrent des introductions, hypothèses plus probable qu'une expansion spontanée ou sub-spontanée de l'aire de répartition de l'espèce, en raison du caractère isolé de ces populations (Pagano et al., 2001a). Les dates précises des arrivées de l'espèce dans ces localités ne sont pas connues.
Par ailleurs, le caractère autochtone ou allochtone de la Grenouille verte comestible (ou de R. lessonae) à Belle-Île, dans le Morbihan, n'est actuellement pas documenté.

La Grenouille verte comestible occupe préférentiellement les zones de marais (Pagano et al., 2001a,b).
Elle parasite sexuellement l'une des espèces parentales (R. lessonae), avec qui elle cohabite dans le nord et le centre de la France continentale, en créant de nouvelles générations hybrides (Graf & Polls-Pelaz, 1989). Cette interaction sexuelle se double de processus de compétition, notamment lors de la phase larvaire, qui sont pour la plupart défavorables à R. lessonae (revue dans Pagano, 1999). Il semble cependant que ce système soit stable, ne remettant pas en cause le maintien des populations de R. lessonae.
Dans le sud-ouest et le sud de la France continentale, où tout laisse penser qu'elle a été introduite, son éventuelle interaction avec les Grenouilles vertes autochtones (R. perezi et R. kl. grafi) n'a pas fait l'objet de travaux spécifiques et son impact plus général sur ses écosystèmes d'accueil n'est pas spécifiquement documenté.

Protégée par la législation française, sauf pêche destinée à une consommation familiale (Anonyme, 1993), la Grenouille verte comestible ne fait pas l'objet d'opérations de gestion particulières.

Ressources
Experts
Fiche rédigée par Alain PAGANO

Olivier LORVELEC
Insitut National de la Recherche Agronomique
Campus de Beaulieu - Avenue du Général Leclerc
35042 Rennes Cedex
Bibliographie

Anonyme, 1993. Arrêté du 22 juillet 1993 fixant la liste des amphibiens et reptiles protégés sur l'ensemble du territoire. NOR : ENVN9320304A. Journal Officiel numéro 209 du 9 septembre 1993. Direction des Journaux Officiels.

Anonyme, 2002. Rana esculenta. In : Amphibian Species of the World : an online reference (D.R. Frost, eds). V2.21 (15 July 2002). Electronic database available at http :// research.amnh.org/ herpetology/ amphibia/ index.html. American Museum of Natural History.

Arnold H.R., 1995. Atlas of amphibians and reptiles in Britain. Natural Environment Research Council, Institute of Terrestrial Ecology research publication, 10, London, UK : 40 pp.

Berger L., 1966. Biometrical studies on the population of green frogs from the environs of Poznan. Zoologica Poloniae, Wroclaw, P, 23 : 303-323.

Graf J.D. & Polls-Pelaz M., 1989. Evolutionnary genetics of the Rana esculenta complex. Pp 289-302, in : Evolution and ecology of unisexual vertebrates (R.M. Dawley & J.P. Bogart, eds.). New York State Museum Bulletin, 446, Albany, USA.

Günther R., 1997. Rana kl. esculenta Linnaeus, 1758. Pp 138-139, in : Atlas of Amphibians and Reptiles in Europe (J.-P. Gasc, A. Cabela, J. Crnobrnja-Isailovic, D. Dolmen, K. Grossenbacher, P. Haffner, J. Lescure, H. Martens, J.P Martínez Rica, H. Maurin, M.E. Oliveira, T.S. Sofianidou, M. Veith & A. Zwiderwijk, eds). Societas Europaea Herpetologica, Muséum National d'Histoire Naturelle de Paris (IEGB, SPN), Paris, F : 494 pp.

Pagano A., 1999. Les complexes hybridogénétiques de grenouilles vertes : déterminants de la distribution dans la vallée alluviale du Rhône. Thèse, Université Lyon 1, F. : 132 pp.

Pagano A., Crochet P.-A., Graf J.-D., Joly P. & Lodé T., 2001a. Distribution and habitat use of Water frog hybrid complexes in France. Global Ecology and Biogeography, 10 : 433-442.

Pagano A., Joly P., Plénet S., Lehmann A. & Grolet O., 2001b. Breeding habitat partitioning in the Rana esculenta complex : the intermediate niche hypothesis supported. Ecoscience, 8 : 294-300.