Citation de cette fiche : Lorvelec O., Clergeau P. & Vigne J.-D., 2003. Le Pélican frisé : Pelecanus crispus Bruch, 1832. Page 58, in : Évolution holocène de la faune de Vertébrés de France : invasions et disparitions (M.Pascal, O. Lorvelec, J.-D. Vigne, P. Keith & P. Clergeau, coordonnateurs), Institut National de la Recherche Agronomique, Centre National de la Recherche Scientifique, Muséum National d'Histoire Naturelle (381 pages). Rapport au Ministère de l'Écologie et du Développement Durable (Direction de la Nature et des Paysages), Paris, France. Version définitive du 10 juillet 2003.
Le Pélican frisé
L'actuelle aire de reproduction du Pélican frisé, proche de celle du Pélican blanc (Pelecanus onocrotalus), est très morcelée. Elle s'étend du Monténégro à l'ouest de la Chine, entre le 30ème et le 50ème parallèle Nord. En hiver, les populations asiatiques de l'espèce migrent vers le sud, alors que les populations européennes se dispersent en Europe (del Hoyo et al., 1992).
La forte discontinuité actuelle de cette aire de reproduction et l'absence de variabilité géographique au sein de l'espèce amènent Voous (1960) à parler d'une aire relictuelle et d'un processus d'extinction en liaison avec les nuisances et les perturbations des milieux engendrées par l'Homme.

Si, en France, les références archéologiques consultées n'ont pas fourni de données certaines permettant d'affirmer la présence d'oiseaux du genre Pelecanus pendant le Pléistocène supérieur ou l'Holocène, Yeatman (1971) cite des résultats de fouilles à Glastonberry, en Angleterre, qui contiennent des ossements du Pélican frisé, datant de l'Âge du Bronze. Sur ce site, la présence de jeunes laisse supposer la reproduction locale de l'espèce à cette époque.
Par ailleurs, la référence à Pline l'Ancien (livre X, 66), considérée par Vansteenwegen (1998) comme attestant la présence et la reproduction de Pélicans en Gaule, ne permet pas, d'une part de déterminer de quelle espèce il s'agit, d'autre part d'affirmer que l'espèce se reproduisait à cette époque en Gaule du Nord.

Au 19ème siècle, le Pélican frisé était encore observé dans le sud et l'est de l'Allemagne quand, dans le même temps, il disparaissait de Hongrie (Yeatman, 1971).
Selon Dubois et al. (2000), il est peu probable que les rares observations d'animaux erratiques réalisées en France à la fin du 20ème siècle relèvent d'animaux d'origine sauvage.

C'est donc sur la base d'éléments biogéographiques, archéozoologiques et historiques et avec une part d'incertitude que le Pélican frisé est rangé ici au nombre des espèces autochtones de France. Il en aurait disparu pour des raisons anthropiques à une période difficile à cerner avec précision dans l'état actuel des connaissances, mais qui pourrait se situer au début de l'Ère Chrétienne.

Ressources
Experts
Fiche rédigée par Olivier LORVELEC
Insitut National de la Recherche Agronomique
Campus de Beaulieu - Avenue du Général Leclerc
35042 Rennes Cedex

Philippe CLERGEAU
Muséum National d'Histoire Naturelle
Conservation des espèces
57 rue Cuvier
75005 Paris

Jean-Denis VIGNE
Muséum national d'Histoire naturelle
Anatomie Comparée
55 rue Buffon
75005 Paris
Bibliographie

Del Hoyo J., Elliot A. & Sargatal J. (editors), 1992. Handbook of the Birds of the World. Vol. 1. Ostrich to Ducks. Lynx Edicions, Barcelona, E : 696 pp.

Dubois Ph.J., Le Maréchal P., Olioso G. & Yésou P., 2000. Inventaire des Oiseaux de France. Avifaune de la France métropolitaine. Nathan, Paris, F : 397 pp.

Yeatman L., 1971. Histoire des oiseaux d'Europe. Bordas, Paris, F : 365 pp.

Vansteenwegen Ch., 1998. L'histoire des Oiseaux de France, Suisse et Belgique. L'évolution des populations, le statut des espèces. Delachaux et Niestlé SA, Neuchâtel, SW, Paris, F : 336 pp.

Voous K.H., 1960. Atlas of European birds. Elsevier, Amsterdam, NL : 284 pp.