Citation de cette fiche : Lorvelec O., Vigne J.-D., Robert I. & Clergeau P., 2003. Le Vautour percnoptère : Neophron percnopterus (Linné, 1758). Pages 201-202, in : Évolution holocène de la faune de Vertébrés de France : invasions et disparitions (M.Pascal, O. Lorvelec, J.-D. Vigne, P. Keith & P. Clergeau, coordonnateurs), Institut National de la Recherche Agronomique, Centre National de la Recherche Scientifique, Muséum National d'Histoire Naturelle (381 pages). Rapport au Ministère de l'Écologie et du Développement Durable (Direction de la Nature et des Paysages), Paris, France. Version définitive du 10 juillet 2003.
Le Vautour percnoptère
L'aire de répartition du Vautour percnoptère comprend l'Afrique de l'hémisphère nord à l'exclusion de ses zones désertiques, la frange sud de l'Europe, la péninsule arabique, le Proche et le Moyen-Orient ainsi que le sous-continent indien. La réduction récente de certaines populations de l'espèce est mise en relation avec des destructions volontaires, mais surtout des mortalités entraînées par des intoxications indirectes par rodenticides et la raréfaction, voire la disparition, des ressources trophiques que constituaient les tas d'ordure ménagères et les cadavres d'animaux domestiques d'élevages extensifs (del Hoyo et al., 1994).

Si ce rapace charognard n'a jamais été mentionné dans les faunes pléistocènes de France (Mourer-Chauviré, 1972), il est cité de celles d'Espagne septentrionale (Isturitz, Bouchud, 1952), région où il niche encore aujourd'hui. Pendant l'Holocène, il n'est signalé en France que de deux gisements datés du début de notre ère. Il s'agit de quelques restes d'un individu trouvés en compagnie de ceux de Vautours fauves, Gyps fulvus, dans le dépotoir du site urbain de la Bourse à Marseille daté des 2ème -5ème siècles après J.-C. (Jourdan, 1976), et de nombreux restes d'un individu juvénile provenant de dépôts datés de la fin 4ème début 5ème siècles après J.-C. situés dans le porche de la grotte de l'Hortus, dans la plaine héraultaise (Mourer-Chauviré, 1972). Cette dernière observation constitue actuellement la plus ancienne mention de la reproduction certaine de l'espèce en France.

Pour la période récente, l'espèce est réputée commune au 19ème siècle en Provence, Languedoc, Roussillon, dans la vallée du Rhône et les basses Alpes, sur la frange est du Massif Central et dans la chaîne des Pyrénées (Dubois et al., 2000). La description de l'aire de répartition faite par Mayaud en 1936 ne diffère guère de la précédente, mais cet auteur note une nette raréfaction de l'espèce. Son déclin débute brutalement dans les années 1880- 1910 se poursuit plus lentement par la suite, le taux de disparition étant évalué compris entre 25 et 30 % entre 1930 et 1979. À la fin du 20ème siècle, ce processus serait en cours de régression, voire s'inverserait, le Vautour percnoptère bénéficiant indirectement des mesures favorisant la réimplantation du Vautour fauve. En effet, les nouvelles colonies de ce dernier constituent des attracteurs pour le premier, qui bénéficie en outre localement de l'approvisionnement régulier de charniers (Maurin, 1994 ; Carlon, 1998 ; Dubois et al., 2000). L'aire de reproduction de l'actuelle population française de Vautour percnoptère est limitée à 3 départements de l'ouest de la chaîne pyrénéenne et à 4 départements méditerranéens centrés sur la basse vallée du Rhône (Dubois et al., 2000). L'effectif de reproducteurs de cette population a été estimé à 60 couples en 1994 (Bagnolini, 1994).

C'est sur la base de ces éléments archéologiques et historiques que le Vautour percnoptère est considéré ici comme allochtone de la faune de France. Il aurait envahi le sud du pays il y a 4 000 ans, y constituant d'importantes populations, avant de connaître un net déclin à partir de la fin du 19ème siècle, déclin enrayé depuis quelques années.

Son impact sur le fonctionnement des écosystèmes français ne fait pas l'objet d'études spécifiques. Cette espèce migratrice est inscrite sur la liste des oiseaux protégés en France, à l'annexe I de la Directive Oiseaux et à l'annexe II de la Convention de Berne (Dubois et al., 2000). Si le Vautour percnoptère ne fait pas l'objet de mesures particulières de gestion en France, il bénéficie de celles mise en place pour favoriser la réimplantation du Vautour fauve.

Ressources
Experts
Fiche rédigée par Olivier LORVELEC
Insitut National de la Recherche Agronomique
Campus de Beaulieu - Avenue du Général Leclerc
35042 Rennes Cedex

Jean-Denis VIGNE
Muséum national d'Histoire naturelle
Anatomie Comparée
55 rue Buffon
75005 Paris

Isabelle ROBERT

Philippe CLERGEAU
Muséum National d'Histoire Naturelle
Conservation des espèces
57 rue Cuvier
75005 Paris
Bibliographie

Bagnolini C., 1994. Vautour percnoptère. In : Nouvel atlas des oiseaux nicheurs de France. 1985- 1989 (Yeatman-Berthelot D. & Jarry G. eds). Société Ornithologique de France, Paris : 170-173.

Bouchud J., 1952. Les oiseaux d'Isturitz (1). Bulletin Société Préhistoire française, 49 : 450-459.

Carlon J., 1998. Resurgence of Egyptian Vultures in western Pyrénées, and relationship with Griffon Vulture. British Birds, 91 : 409-416.

Del Hoyo J., Elliot A. & Sargatal J. (Edits.), 1994. Handbook of the Birds of the World. Vol. 2. Lynx Edicions, Barcelona : 638 pp.

Dubois Ph.J., Le Maréchal P., Olioso G. & Yésou P., 2000. Inventaire des Oiseaux de France. Avifaune de la France métropolitaine. Nathan, Paris, F : 397 pp.

Jourdan L., 1976. La faune du site gallo-romain et paléochrétien de La Bourse (Marseille), Ed. CNRS, Paris : 338 pp.

Maurin H. (dir.), 1994. Inventaire de la Faune menacée en France. Nathan ed., Paris : 176 pp.

Mourer-Chauviré C., 1972. Les oiseaux des couches paléochrétiennes de la grotte de l'Hortus (Hérault). Études Quaternaire, Mémoire 2 : 289-295.