Citation de cette fiche : Yésou P., 2003. Le Goéland cendré : Larus canus Linné, 1758. Pages 219-220, in : Évolution holocène de la faune de Vertébrés de France : invasions et disparitions (M.Pascal, O. Lorvelec, J.-D. Vigne, P. Keith & P. Clergeau, coordonnateurs), Institut National de la Recherche Agronomique, Centre National de la Recherche Scientifique, Muséum National d'Histoire Naturelle (381 pages). Rapport au Ministère de l'Écologie et du Développement Durable (Direction de la Nature et des Paysages), Paris, France. Version définitive du 10 juillet 2003.
Le Goéland cendré
L'aire de reproduction du Goéland cendré, circumpolaire, est limitée à l'Hémisphère Nord.

La récente révision systématique de plusieurs espèces de Goélands et la difficulté à distinguer les restes squelettiques du Goéland cendré de ceux de congénères incitent à la prudence quant à l'identification passée de l'espèce dans les assemblages paléontologiques et archéologiques.
Quoi qu'il en soit, l'espèce a été signalée dans trois sites des périodes froides du Pléistocène supérieur de France (Mourer-Chauviré, 1975 ; Vilette, 1983) et ne l'a jamais été de sites holocènes à l'exception de l'attribution prudente d'un reste osseux des couches boréales du site du Monte Leone (Bonifacio, Corse-du-Sud ; Vigne et al., 1997). Ce reste a été attribué à L. audouinii par Thibault & Bonaccorsi (1999) et son identification initiale n'a pas résisté à la révision finale du matériel de ce site (Cuisin, 2001).

Cette espèce migratrice hiverne de longue date en France en nombre important (Dubois et al., 2000), mais y niche rarement. Les quelques mentions de sa reproduction au 19ème siècle sont contestées (Debout, 1989 ; Yésou, 2002). Les premières reconnues valides pour le territoire sont relatives à des observations réalisées en 1966 dans le Delta de la Dranse près du Lac Léman (Pricam, 1969), puis en 1976 sur les dunes de Merlimont dans le Pas-de-Calais (Milbled & Apchain, 1979), enfin, en 1995 quand fut découverte la colonie de la banlieue de Lille qui héberge le tiers de l'effectif de couples reproducteurs de France, estimé compris entre 20 et 30 à la fin des années 1990 (Sueur, 2002). D'autres sites ont été occupés sans suite, d'abord en 1973 en Vendée, puis en Picardie, Normandie, Pays de la Loire, Auvergne, Champagne-Ardenne et Alsace (Géroudet & Dupuich, 1994 ; Sueur, 2002).
Pour Goethe (1983), l'arrêt des destructions de laridés, puis les mesures de protection à leur égard, associées à l'accès à de nouvelles sources trophiques en rapport avec l'évolution de l'agriculture et l'eutrophisation de plans d'eau, sont autant de facteurs non exclusifs susceptibles d'avoir jouer un rôle significatif dans cette invasion (Goethe 1983).

Apparemment non reproducteur par le passé sur territoire européen de la France, c'est sur la base de considérations biogéographiques et historiques que le Goéland cendré est rangé ici au nombre des espèces allochtones du territoire et l'ayant envahi de façon probablement sub-spontanée dans la dernière moitié du 20ème siècle.

Cette espèce se nourrit essentiellement d'invertébrés et de petits vertébrés collectés tant en milieu aquatique que sur des milieux terrestres (labours et prairies). Son impact sur ses milieux d'accueil n'a pas fait l'objet d'études spécifiques en France.

Le Goéland cendré est inscrit sur la liste des Oiseaux protégés en France, à l'annexe II de la Directive Oiseaux et à l'annexe III de la Convention de Berne. L'unique mesure de gestion adoptée à son égard a été le classement en Réserve Naturelle de son site de reproduction du Delta de la Dranse où des aménagements ont été réalisés afin de favoriser sa reproduction (Sueur & Dupuich, 1999).

Ressources
Experts
Fiche rédigée par Pierre YESOU
Bibliographie

Cuisin J., 2001. L'avifaune. In : J.-D. Vigne, dir., L'abri du Monte Leone, grand site mésolithique insulaire méditerranéen, Doc. Archéol. Fr., à paraître.

Debout G., 1989. Goéland cendré. In : Atlas des oiseaux nicheurs de Normandie et des îles Anglo- Normandes (Groupe Ornithologique Normand Ed.), Le Cormoran, 7 : 215.

Géroudet P. & Dupuich H., 1994. Goéland cendré. In : Nouvel atlas des oiseaux nicheurs de France. 1985-1989 (Yeatman-Berthelot D. & Jarry G. eds). Société Ornithologique de France, Paris : 322-323.

Goethe F., 1983. Common Gull (Larus canus, L.). In : Ecology of the Wadden Sea (Wolff W.J. Ed.). Balkema, Rotterdam.

Milbled T. & Apchain C., 1979. La colonie de laridés de Merlimont-Plage. Le Héron, 4 : 54-60.

Mourer-Chauviré C., 1975. Les oiseaux du Pléistocène moyen et supérieur de France. Thèse d'État Université Claude Bernard, Lyon, n° 75-14.

Pricam R., 1969. Le Goéland cendré (Larus canus L.) niche sur le Léman. L'Oiseau & R.F.O., 39 : 8-14.

Sueur F., 2002. Goéland cendré Larus canus. In : Oiseaux marins nicheurs de France métropolitaine (1960-2000) (Cadiou B., Pons. J.-M. & Yésou P., Coordinateurs). Rapport au Ministère de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement. G.I.S. Oiseaux Marins, Muséum National d'Histoire Naturelle, Paris : 63-65.

Sueur F. & Dupuich H., 1999. Goéland cendré. In : Oiseaux menacés et à surveiller en France. Liste rouge et recherche de priorités. Populations. Tendances. Menaces. Conservation (Rocamora G. & Yeatman-Berthelot D., Coordinateurs). Soc. Études Ornitho. France / L.P.O., Paris : 168-169.

Thibault J.-C. & Bonaccorsi G., 1999. The birds of Corsica. British Ornithologists' Union, BOU Checklist n° 17.

Vigne J.-D., Bailon S. & Cuisin J., 1997. Biostratigraphy of amphibians, reptiles, birds and mammals in Corsica and the role of man in the Holocene faunal turnover. Anthropozoologica, 25 : 587-604.

Vilette P., 1983. Avifaunes du Pléistocène final et de l'Holocène dans le sud de la France et en Catalogne. Laboratoire de Préhistoire Paléthnologique, Atacina, Carcassonne, F, 11 : 190 pp.

Yésou P., 2002. Les oiseaux marins nicheurs en Vendée au XXe siècle. La Gorgebleue, 17 : 31-41.