Le Goéland marin niche sur les rivages est et ouest de l'Atlantique nord, et son aire
de répartition en Europe s'étend de l'Irlande à la péninsule de Kola.
En France, des restes osseux de Goélands marins ont été identifiés dans les produits
de fouilles d'un site rural du Pas-de-Calais daté de la fin du 2ème, début du 3ème siècle après
J.-C. (Vadet, 1988). Cette donnée, si elle constitue une présomption de la présence
ancienne de l'espèce en France, ne renseigne cependant pas sur son statut local de
reproducteur à l'époque. Bien que les preuves formelles fassent actuellement défaut, le
Goéland marin aurait niché de façon localisée en Bretagne et en Normandie au 19ème siècle
(Monnat & Cadiou, 2002). Sa reproduction a été rapportée pour la première fois de façon
formelle dans les années 1925. Elle concernait à la fois l'archipel des Sept-Îles (Côtes
d'Armor, Lebeurier, 1925), et la presqu'île de Crozon (Finistère, Tristan, 1927). L'espèce a
ensuite étendu son implantation sur les côtes bretonnes, puis normandes. Cette progression
s'est poursuivie vers le sud dans les années 1980, dans plusieurs localités entre l'île de
Noirmoutier en Vendée et le bassin d'Arcachon en Gironde (Monnat & Cadiou, 2002). Au
cours de cette même décennie, des couples nicheurs se sont installés sur les toits de villes
côtières entre Dieppe en Seine-Maritime et Olonne-sur-Mer en Vendée (Cadiou, 1997 ;
Yésou, 2002). L'effectif de reproducteurs est estimé à 4100 couples à la fin des années
1990, dont près de la moitié sont localisés dans le Finistère (Monnat & Cadiou, 2002).
C'est sur la base de ces considérations biogéographiques et historiques que le
Goéland marin est rangé ici au nombre des espèces probablement allochtones du territoire
européen de la France au sens où il ne s'y serait reproduit qu'à une date récente. Il a depuis
colonisé de façon spontanée et-ou sub-spontanée une fraction notable du littoral de la
Manche et de l'Atlantique du pays pendant la deuxième moitié du 20ème siècle.
L'impact du Goéland marin sur ses écosystèmes d'accueil n'a pas fait l'objet d'études
spécifiques. Cet impact est jugé a priori globalement réduit à l'heure actuelle en raison du
faible effectif de l'espèce. Son large spectre alimentaire comporte aussi bien des proies
vivantes que des déchets, prélevés tant sur l'estran qu'en mer, voire, en milieu terrestre de
façon ponctuelle, sur des décharges d'ordures ménagères et autres sites de rejets. L'impact
de sa prédation sur les oeufs et les poussins d'autres espèces d'oiseaux de mer, quantifié à
l'échelle de colonies et jugé appréciable, n'est cependant pas évalué à l'échelle des
populations dans l'état actuelle des connaissances (Monnat & Cadiou, 2002). Outre cet
impact par prédation directe, son comportement de reproduction qui se manifeste par la
défense d'un vaste territoire par chaque couple, induit une compétition pour l'espace qui s'est
développé au détriment d'autres espèces d'oiseaux marins. C'est ainsi que, dans le
Finistère, d'importantes colonies de Goélands bruns, L. fuscus, et de Goélands argentés,
L. argentatus, ont fortement régressé sous la poussée des goélands marins (Monnat &
Cadiou, 2002). Enfin, la nidification urbaine du Goéland marin pose des problèmes
équivalents à ceux évoqués à propos du Goéland argenté, mais à une échelle moindre en
raison du nombre réduit de couples installés en ville, nombre qui ne dépasse pas quelques
dizaines actuellement.
L'espèce, inscrite sur la liste des oiseaux protégés en France et à l'annexe II de la
Directive Oiseaux, ne fait pas l'objet de mesures de gestion spécifiques en France. Elle
bénéficie cependant, de façon indirecte, du statut de protection conféré à plusieurs de ses
sites de reproduction au titre de leur intérêt pour leur avifaune marine. Par ailleurs, chaque
année, certains de ses nids installés en milieu urbain sont détruits, comme cela peut advenir
également sur des espaces protégés hébergeant des espèces sensibles à sa présence dans
le cadre d'opérations réglementaires de limitation de populations de Goélands argentés.
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Experts |
Fiche rédigée par |
Pierre YESOU
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Bibliographie |
Cadiou B., 1997. La reproduction des goélands argentés en milieu urbain : Historique et situation
actuelle. Alauda, 65 : 209-227.
Lebeurier E., 1925. Excursion aux Sept-Îles (Côtes-du-Nord). Revue française d'Ornithologie, 9 : 263-272.
Monnat J.-Y. & Cadiou B., 2002. Goéland marin Larus marinus. In : Oiseaux marins nicheurs de
France métropolitaine (1960-2000) (Cadiou B., Pons. J.-M. & Yésou P. Coord.), Rapport au
Ministère de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement. G.I.S. Oiseaux Marins, Muséum
National d'Histoire Naturelle, Paris : 80-84.
Tristan M., 1927. Expédition ornithologique aux îles du Toulinguet (Finistère) (25-27 mai 1927). Revue
française d'Ornithologie, 11 : 311-314.
Vadet A., 1988. Les ossements du site des Sablins à Etaples. Bulletin de la Société Académique du
Boulonnais, t. II (2) : 38-55.
Yésou P., 2002. Les oiseaux marins nicheurs en Vendée au XXe siècle. La Gorgebleue, 17 : 31-41.
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