ZNIEFF 230030723
LE MARAIS ALLUVIAL DE QUILLEBEUF-SUR-SEINE

(n° régional : 85110001)

Commentaires généraux

Cette ZNIEFF de type I fait partie du vaste ensemble écologique du Marais-Vernier, formé par le Marais neuf alluvial et le Marais tourbeux de l’ultime boucle de la Seine entre Rouen et Le Havre. Au sein de cette zone, les communes de Quillebeuf-sur-Seine surtout, mais aussi de Marais-Vernier, accueillent sur leur territoire des marais alluviaux de grand intérêt.

Le Marais alluvial ou Marais moderne a été séparé du Marais tourbeux ou Marais ancien par la Digue des Hollandais construite au XVIIème siècle. C’est donc un polder gagné sur la mer ou Marais désséché. Il est essentiellement occupé par des prairies mésohygrophiles. Celles-ci sont parfois séparées de quelques cultures, et souvent parcourues de fossés et de mares. Quelques haies vives sont isolées. Les sols lourds développés sur des alluvions récentes argileuses et limoneuses y ont été largement drainés.

Ces prairies mésohygrophiles et mésophiles sont valorisées par la fauche et/ou le pâturage. Les prairies de fauche (alliance du Bromion racemosi, association dominante de l’Hordeo secalini-Lolietum perennis) sont utilisées plus ou moins intensivement, et sont le plus souvent suivies d’un pâturage estival du regain. Les mares et fossés en eau abritent des groupements hydrophytiques remarquables (Hydrocharition morsus-ranae, Lemnion gibbae, etc).

Les bords de Seine ont été endigués. Néanmoins, des groupements végétaux halophiles ont malgré tout pu s’implanter dans les secteurs où les digues sont partiellement abimées. Des tapis de Scirpe maritime (Scirpus maritimus) du groupement du Scirpetum maritimi y colonisent les vases salées, avec quelques touffes de Jonc de Gérard (Juncus gerardii). Entre les blocs disjointoyés se développent des mégaphorbiaies à Oenanthe safranée (Oenanthe crocata). La strate arborescente est surtout composée de Saules blancs (Salix alba) de l’alliance du Salicion albae et de quelques aulnes (Alnus glutinosa).

Les vasières exondées à marée basse, les milieux aquatiques de l’Hydrocharition et du Lemnion gibbae sont des milieux qui relèvent de la Directive Habitats de l’Union Européenne.

Cette mosaïque de prairies humides et mésophiles, de mares et de milieux littoraux constitue une entité écologique riche et diversifiée, malgré la présence de cultures interstitielles.

Les espèces déterminantes de ZNIEFF (exceptionnelles à assez rares et menacées en Haute-Normandie) sont assez nombreuses dans cette vaste zone.

Dans les fossés en eau se trouvent de belles populations des rares Spirodèle à plusieurs racines (Spirodela polyrhiza) et Lenticule gibbeuse (Lemna gibba), des très rares Morrène aquatique (Hydrocharis morsus-ranae) et Wolffie sans racines (Wolffia arrhiza).

Les mares et fossés abritent des populations parfois importantes de Renoncule de Baudot (Ranunculus baudotii), Baldellie fausse-renoncule (Baldellia ranunculoides susbp. ranunculoides) qui est légalement protégée, Butome en ombelle (Butomus umbellatus), Oenanthes fistuleuse et aquatique (Oenanthe fistulosa, O. aquatica), Guimauve officinale (Althaea officinalis), Rorippe des marais (Rorippa palustris), Scirpe de Tabernaemontanus (Scirpus tabernaemontani), Massette à feuilles étroites (Typha angustifolia), etc. Des prairies argileuses accueillent de nombreux pieds de l’exceptionnelle Bugrane épineuse (Ononis spinosa).

On observe en bordure de la Seine les rares Oenanthe safranée (Oenanthe crocata), Scirpe maritime (Scirpus maritimus), Aristoloche (Aristolochia clematitis), le très rare Jonc de Gérard (Juncus gerardii), l’exceptionnel Glaux maritime (Glaux maritima), etc.

Les espèces assez rares sont entre autre le Chou noir (Brassica nigra), le Pigamon jaune (Thalictrum flavum), l’Epiaire des marais (Stachys palustris), le Saule cendré (Salix cinerea), l’Orge faux-seigle (Hordeum secalinum), la Gesse des bois (Lathyrus slvestris), etc.

Le patrimoine faunistique est assez important, spécialement pour l’avifaune. Ainsi, parmi les oiseaux, on note:

-La nidification possible du Busard Saint-Martin (Circus cyaneus), espèce inscrite à l’annexe I de la Directive Oiseaux de l’Union européenne,

-des colonies du rare Vanneau huppé (Vanellus vanellus) et quelques couples de Petit Gravelot (Charadrius dubius) près des mares,

-des populations de Tarier des prés (Saxicola rubetra) et de Bergeronnette flavéole (Motacilla flava flavissima), assez rares dans la région,

-le Grèbe castagneux (Tachybaptus rufficollis) sur des mares ceinturées d’hélophytes,

-le rare Faucon hobereau (Falco subbuteo),

-la Bouscarle de Cetti (Cettia cetti) assez rare,

-de nombreux oiseaux d’eau (Anatidés, limicoles, Ardéidés), passereaux, rapaces, etc. utilisent comme halte migratoire les milieux aquatiques et amphibies (mares, dépressions humides, prairies inondées, vasières, etc).

Ce secteur du Marais Vernier se situe en effet au carrefour de la voie migratoire atlantique et de l’axe de la vallée de la Seine.

L’entomofaune comprend de nombreuses espèces remarquables. Parmi les odonates, ont été recensés dans les mares et fossés : l’Agrion de Vander Linden (Cercion lindenii), le rare Agrion mignon (Coenagrion scitulum), le très rare Agrion vert (Erythromma viridulum).

Parmi les orthoptères, on note la présence du Conocéphale des roseaux (Conocephalus dorsalis) et du Tétrix riverain (Tetrix subulata), considérés comme assez rares en Haute-Normandie.

La batrachofaune comprend entre autre la Rainette verte (Hyla arborea), menacée aux échelles régionale, nationale et européenne, et le Triton crêté (Triturus cristatus), inscrit à l’annexe II de la Directive Habitats, qui fréquente certaines mares prairiales près de Quillebeuf.

S’agissant de l’évolution récente des milieux, les prairies humides ont été très nettement dégradées par le drainage, l’intensification et surtout la mise en cultures (perte de 2000 ha sur l’ensemble du Marais-Vernier depuis le Plan Marshall d’après guerre).

Un soutien des pratiques pastorales extensives (fauche et pâturage) s’avère donc incontournable pour maintenir la qualité biologique et paysagère de ce marais, et pérenniser sa fonctionnalité ainsi que son intérêt agricole traditionnel.

La gestion des nombreuses mares doit aussi permettre de maintenir des écosystèmes aquatiques ou amphibies riches en espèces rares : il conviendrait notamment de limiter le surpiétinement de certaines mares par le bétail au milieu des pâtures, et surtout les traitements phytosanitaires directs.

Commentaires sur la délimitation
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