ZNIEFF 730011047
Forêts de Saleich et de l'Estelas et stations sèches de Francazal et de Salège

(n° régional : Z2PZ0302)

Commentaires généraux

Les forêts domaniales de Saleich et de l’Estélas, ainsi que les stations sèches de Francazal et de Salège, font partie du même massif karstique, situé dans le piémont pyrénéen central. En fonction de l’exposition des versants et de la nature de la roche mère, la physionomie de la végétation varie fortement. Au sud-ouest, un bel ensemble forestier est dominé par des futaies remarquables de hêtres. Il comprend aussi des peuplements denses de buis et, plus rarement, des tillaies sur des pentes instables, ainsi que des sapinières. Ces dernières apparaissent à proximité des crêtes localisées entre le Tuc aux Pentières, point culminant du site à 1 322 m d’altitude, et le pic de l’Estélas. Au nord-est, les monts des communes de Francazal et de Salège ne dépassent pas les 800 m d’altitude. Une végétation thermophile, composée de pelouses basophiles, de landes à buis ou genévriers et de boisements clairsemés à chênes pubescents, recouvre les versants en soulane. Des affleurements rocheux, des éboulis, des falaises et des dalles à orpins apparaissent çà et là. Ce territoire karstique comporte également des grottes, des talwegs encaissés, des concrétions calcaires dont un magnifique cône de tuf, des résurgences, des trous souffleurs, un réseau remarquable de galeries et de rivières souterraines...

Ces milieux souterrains abritent des animaux cavernicoles remarquables. Parmi les espèces d’arachnides dites troglobies qui effectuent tout leur cycle sous terre et n’ont jamais été rencontrées en dehors des cavités, à l’exception des espèces dites troglophiles (fréquentes dans les cavités, mais que l’on peut rencontrer à l’extérieur), l’Ischyropsalis pyrénéen (Ischyropsalis pyrenaea), un opilion, est présent. Deux autres arachnides cavernicoles ont été recensés dans les grottes : le Leptonète microphthalme (Leptoneta microphthalma) et le Neobisium d’Abeille (Neobisium abeilli). Sur les 8 coléoptères souterrains déterminants répertoriés, cinq sont protégés en France : Aphaenops pluto, Aphaenops tiresias, Aphaenops bucephalus, Aphaenops cerberus et Hydraphaenops elhersi. Citons également Moitessieria simoniana, un mollusque protégé en France, Pseudosinella impediens et Pseudosinella theodoridesi, deux collemboles déterminants, Delaya leruthi, un ver, ainsi que quatre crustacés liés aux eaux souterraines : le Niphargue robuste (Niphargus robustus), Speocyclops anomalus, Speocyclops racovitzai peyortensis et la Sténaselle de Husson (Stenasellus virei hussoni). Parmi les autres groupes d’êtres vivants, les chauves-souris sont susceptibles d’utiliser les cavités, à l’instar du Rhinolophe euryale, observé sur ce territoire. À la surface, la faune calcicole est également riche à proximité des affleurements rocheux et de leurs milieux associés. Des mollusques terrestres déterminants vivent sur des rochers ou falaises : Chondrina bigorriensis, Abida bigerrensis, ainsi que Cochlostoma nouleti et Cochlostoma obscurum obscurum qui affectionnent plutôt des milieux rocheux ombragés. D’autres animaux patrimoniaux sont liés aux résurgences et aux écoulements de surfaces. Vertigo moulinsiana, un minuscule mollusque appartenant à l’annexe II de la directive européenne « Habitats-Faune-Flore », réalise son cycle biologique dans des zones humides calcaires. Ces zones humides, rares sur ce site, sont le plus souvent limitées aux étroites berges des ruisseaux et ruisselets. Le Cordulégastre bidenté (Cordulegaster bidentata), une libellule rare en Haute-Garonne, se reproduit et chasse dans un ruisselet intraforestier présentant des concrétions calcaires formant une succession de petites vasques et de marches naturelles. C’est dans ce milieu remarquable et original, situé dans un talweg encaissé, que l’Euprocte des Pyrénées, profitant des eaux de résurgence limpides et froides, peut vivre à 600 m d’altitude. Ce type de station est rare pour cet urodèle endémique que l’on rencontre préférentiellement dans les torrents d’altitude. Cependant, au moins deux populations ont été localisées. Potentiellement, d’autres colonies d’euproctes pourraient occuper des cavités souterraines ou des ruisselets. L’Écrevisse à pattes blanches (Austropotamobius pallipes) se reproduit encore sur ce site. De jeunes individus ont été observés dans une aulnaie déconnectée d’un lit mineur principal. Cette population est fortement menacée. En effet, une forte et brutale mortalité d’individus a été constatée ces dernières années. Des indices de la présence du Desman des Pyrénées ont également été relevés à l’intérieur du périmètre de cette ZNIEFF. À proximité des affleurements rocheux, un ensemble de milieux thermophiles constitués par des pelouses plus ou moins rocailleuses, des boisements thermophiles plus ou moins ouverts et des fruticées à buis en mosaïque avec des dalles rocheuses à orpins abritent plusieurs espèces patrimoniales. Dans des boisements clairsemés, on note la Filaire intermédiaire (Phillyrea media), le Nerprun purgatif (Rhamnus cathartica) et l’Érable de Montpellier (Acer monspessulanum), trois arbustes non déterminants, ainsi que l’Asperge à feuilles aiguës (Asparagus acutifolius) et le Barbitiste des bois (Barbitistes serricauda), une sauterelle discrète et rarement observée en région Midi-Pyrénées. À proximité de boisements de chênes plus fermés dans lesquels on observe une strate herbeuse développée, deux papillons volent : la Bacchante (Lopinga achine), protégée en France, et le Miroir (Heteropterus morpheus). Un troisième rhopalocère, l’Azuré du serpolet (Maculinea arion), protégé en France, pond dans les boutons floraux des pieds de l’Origan ou de serpolets. Ces plantes hôtes croissent dans des secteurs de pelouses calcicoles ou en lisière des bosquets. Par la suite, les chenilles seront prises en charge et élevées par des fourmis. D’autres plantes, caractéristiques de pelouses ou de bois clairsemés, se développent : la Fétuque d’Auquier (Festuca auquieri), un serpolet (Thymus polytrichus), le Limodore à feuilles avortées (Limodorum abortivum), l’Ophrys jaune (Ophrys lutea), la Céphalanthère rouge (Cephalanthera rubra), le Bugle jaune (Ajuga chamaepitys) et le Bugle de Genève (Ajuga genevensis), rare en Haute-Garonne. La Scille d’automne (Scilla autumnalis), l’Œillet en delta (Dianthus deltoides) et l’Arabette à oreillettes (Arabis auriculata), très rare en Haute-Garonne, sont également mentionnés sur ce site. Dans des biotopes plus humides, ombragés ou montagnards, d’autres enjeux existent. Les plantes remarquables des mégaphorbiaies ou des talwegs forestiers sont : la Valériane des Pyrénées (Valeriana pyrenaica), l’Œillet barbu (Dianthus barbatus), le Grand pétasite (Petasites hybridus). Deux rapaces (le Milan royal et le Hibou grand-duc), ainsi que le Grand Tétras, oiseau emblématique des forêts montagnardes pyrénéennes dont les effectifs ne cessent de régresser, se reproduisent sur ce territoire. Par ailleurs, la Perdrix grise de montagne a été identifiée dans le secteur des pelouses et des landes de l’étage montagnard. Enfin, un autre orthoptère déterminant a été observé en versant nord, à plus de 900 m d’altitude. Il s’agit de l’Éphippigère gasconne (Platystolus monticolus), une sauterelle endémique des Pyrénées centrales.

La grande diversité des biotopes de ce site est favorable à la reproduction et au développement de nombreuses espèces rares et patrimoniales. Ces milieux exercent une régulation hydraulique. Les eaux, en partie souterraines, se déversent, du sud vers le nord, soit dans le bassin versant de l’Arbas, soit dans celui du Salat.

Commentaires sur la délimitation

Le site concerne les faces ouest et nord du massif de l’Estélas, situé dans le piémont pyrénéen central. Les forêts de Saleich et de l’Estélas, ainsi que les stations sèches de Francazal et de Salège, font partie du même massif karstique. Celui-ci est constitué de montagnes et collines où l’on observe un fort contraste de la végétation, en fonction de l’exposition des versants et du type de la roche mère. Les contours tiennent compte de la répartition des biotopes hébergeant des végétaux ou des animaux déterminants. En ombrée, la hêtraie recouvre, le plus souvent, les versants pentus dans des ambiances humides et montagnardes. Au contraire, des milieux xériques, liés aux affleurements rocheux, apparaissent en soulane des monts, localisés plutôt dans l’est de ce territoire. Des grottes, des cavités et des rochers calcaires sont également présents çà et là. Par ailleurs, ces milieux sont liés par l’hydrogéologie. Les eaux, en partie souterraines, se déversent du sud vers le nord, soit dans le bassin versant de l’Arbas, soit dans celui du Salat. Au sud-ouest, la limite correspond à la crête frontière avec l’Ariège ; au sud-est, la limite redescend jusqu’à Cazaux en suivant le cours du ruisseau de Rieu ; à l’est, le contour intègre les petits massifs de part et d’autre de Houillet, hébergeant notamment des enjeux liés à l’avifaune. Au nord, les limites suivent globalement le périmètre du massif forestier, et à l’ouest le périmètre se limite à la « crête de l’Homme-Mort ».