ZNIEFF 730030317
Vallons bocagers du ruisseau de Boulat et des cours d'eau tributaires

(n° régional : Z1PZ0268)

Commentaires généraux

Cette grande zone bocagère est située sur le secteur du Terrefort rattaché à la zone biogéographique, plus vaste, du Limargue. Limargue et Terrefort sont caractérisés par des paysages au relief assez doux, et sont beaucoup plus bocagers et humides que les causses avoisinants. Ils forment une zone de transition entre les causses et le Ségala. Plus spécifiquement, cette petite zone naturelle se situe dans un isolat géologique (formations calcaires marneuses du jurassique inférieur-lias) aux confins du causse de Limogne. Le ruisseau de Boulat court en surface sur toute la zone de Terrefort. En revanche, il disparaît en arrivant sur les calcaires karstiques, dans la perte du Cros. La zone est quasi entièrement couverte de prairies entourées de haies arborées. Ces prairies présentent différents niveaux trophiques et hydriques, à l’origine d’une biodiversité prairiale remarquable.

Les habitats naturels d’intérêt patrimonial présents sont tous herbacés : prairies humides atlantiques et subatlantiques du Bromion racemosi, prairies de fauche atlantiques du Brachypodio rupestris-Centaureion nemoralis, prairies hygrophiles des Eleocharietalia et végétation à Baldingère faux roseau (Phalaris arundinacea). Si les prairies de fauche atlantiques, très abondantes ici, sont globalement assez bien représentées dans les vallées du parc, les autres types de végétation sont globalement bien moins courants, car ils sont tous liés à un niveau hydrique plus élevé. Ils sont aussi globalement assez rares dans le département du Lot. La plupart des prairies sont fauchées, et souvent pâturées ensuite. Certaines prairies sont uniquement pâturées et appartiennent à des formations plus banales rattachables au Cynosurion cristati. Une pelouse silicicole, nettement plus sèche que les prairies précitées, et appartenant au Violion caninae, est également présente. Cet habitat, lié au pâturage, est rare sur le Parc naturel régional des causses du Quercy où il est cantonné au Limargue. Il devient, en revanche, beaucoup plus commun dans le Ségala lotois. Quelques habitats aquatiques et amphibies ponctuels ont été observés sur la zone : des gazons amphibies à Jonc des crapauds (Juncus bufonius), des tapis immergés de Characées (Chara sp.), ainsi que des herbiers flottants de Renouée amphibie (Polygonum amphibium). Cette dernière formation est très rare dans le Lot où elle ne semble connue que du Limargue. Les plantes inféodées aux zones humides (mésohygrophiles à hygrophiles) sont particulièrement bien représentées. On note surtout la présence d’espèces rares, localisées et protégées au niveau régional comme le Scirpe à une écaille (Eleocharis uniglumis) ou le Trèfle écailleux (Trifolium maritimum), qui n’est connu dans le Lot que dans la vallée du Lemboulas et le Limargue. D’autres espèces rares dans le Lot ont également été observées sur le site. C’est le cas de l’Œnanthe fistuleuse (Oenanthe fistulosa), de la Véronique à écusson (Veronica scutellata) et de la Gesse de Nissole (Lathyrus nissolia) qui est assez rare. D’autres espèces remarquables comme le Flûteau lancéolé (Alisma lanceolatum), l’Œnanthe à feuilles de peucédan (Oenanthe peucedanifolia), le Brome en grappe (Bromus racemosus), le Narcisse des poètes (Narcissus poeticus) et l’Orchis élevé (Dactylorhiza elata subsp. sesquipedalis) ont été observées. Concernant la faune prairiale ou inféodée aux zones humides, on note la présence de 5 espèces d’orthoptères d’intérêt patrimonial : la Courtilière commune (Gryllotalpa gryllotalpa), le Grillon des marais (Pteronemobius heydenii), la Decticelle des friches (Pholidoptera femorata), le Dectique verrucivore (Decticus verrucivorus) et le Barbitiste des Pyrénées (Isophya pyrenea). Mis à part le Dectique verrucivore qui, habituellement, affectionne plus les pelouses sèches, les autres espèces sont assez courantes dans les zones humides du département. Un papillon protégé, le Damier de la succise (Euphydryas aurinia), présente ici une population étroitement liée à la présence de la Succise des prés (Succisa pratensis), plante ponctuellement abondante dans certaines prairies oligotrophes (pauvres en éléments nutritifs). La zone bocagère est également favorable à la présence de la Pie-grièche écorcheur, qui se tient à l’affût dans les haies arbustives, et du Pic mar, qui fréquente assidûment les haies arborées et les bosquets de Chêne pédonculé (Quercus robur) du site. 3 espèces de libellules remarquables sont observables ici : l’Aeschne isocèle (Aeshna isoceles), rare en Midi-Pyrénées et dont la larve vit dans les eaux stagnantes (fossés, mares et étangs) ; le Caloptéryx méditerranéen (Calopteryx haemorrhoidalis haemorrhoidalis), qui semble localement en expansion ; et le Sympétrum jaune (Sympetrum flaveolum), également rare, au moins au niveau départemental. Ce sont également 3 espèces de coléoptères de zones humides qui sont signalées de la zone. L’Odacanthe mélanure (Odacantha melanura) est une espèce typique des marécages à haute végétation, qui grimpe ici sur les tiges de Baldingère faux roseau. Le même comportement a été observé sur la zone pour un autre carabique rare, le Démétrias impérial (Demetrias imperialis). Enfin, l’Apion varié (Ixapion variegatum), espèce toujours rare en France, est lié à la présence du Gui des feuillus (Viscum album), dont il dévore le feuillage et qui parasite localement les saules. Outre les capacités d’accueil importantes pour les amphibiens qu’offrent les cours d’eau, et surtout les nombreux fossés de la partie située dans le Limargue, une petite mare, au sud de la zone (causse), héberge une faune intéressante. En effet, au moins 5 espèces d’amphibiens l’occupent au moment de la reproduction, notamment le Triton marbré (Triturus marmoratus). Toujours au sud de la zone, et en lien direct avec le réseau karstique, plusieurs espèces animales d’intérêt patrimonial ont été observées. Des chauves-souris, dont des petits rhinolophes, sont présentes dans la perte fossile située à proximité immédiate de la perte (actuelle) du Cros. La cavité est utilisée comme gîte de transit ou d’hivernage (en fonction des espèces). Les chauves-souris peuvent également chasser les insectes alentour, notamment le long des nombreuses haies du secteur. Les cavités souterraines hébergent aussi un petit crustacé isopode cavernicole, l’Oritonisque de Vandel (Oritoniscus vandeli). Cette espèce, citée par Deharveng et Bariviera (cf. bibliographie), est une endémique de la moitié sud du Quercy. Plus au nord, elle est remplacée par un autre isopode, à peine moins rare. En plus de la présence avérée de cette espèce de très forte valeur patrimoniale, il faut signaler la présence dans une autre cavité, à moins de 4 km de cette grotte, de 2 autres espèces cavernicoles susceptibles d’être un jour découvertes sur la zone : la Duvalie cadourque (Duvalius cadurcus), coléoptère carabique endémique du causse de Limogne, et la Pseudosinelle de Balazuc (Pseudosinella balazuci), collembole lui aussi endémique du Quercy.

Cette grande zone bocagère, typique du Terrefort, héberge une faune et une flore rares en Quercy. Des espèces très localisées, dont certaines protégées, et même une espèce endémique, y sont présentes. Cette zone bénéficie actuellement du maintien d’une agriculture respectueuse du patrimoine naturel, qui a su perpétrer l’usage des prairies naturelles de fauche et maintenir un maillage de haies important.

Commentaires sur la délimitation

La zone comprend un très bel ensemble de prairies naturelles, mésophiles ou humides, bordées de haies arborées et situées dans le vallon du ruisseau de Boulat et dans les vallons de ses affluents (ruisseaux de Saint-Laurent, de Salse, de la Prade, de la Fontaine et de Caussal). Elle inclut aussi une zone bocagère plus arborée, qui entoure la perte du Cros dans laquelle disparaît le ruisseau de Boulat, et qui sert de territoire de chasse aux chiroptères présents dans la grotte.