Querco petraeae-Carpinetalia betuli Moor ex R. Bœuf 2014

Prodrome des végétations de France décliné (PVF2)

Synécologie

Chênaies sessiliflores-charmaies des régions à mésoclimat sec, à climat d’abri, en condition mésophile à xérophile, acidicline à calcaricole.
Les contextes topographique et pédologique sont souvent assez favorables au bilan hydrique, avec des sols assez profonds (mais jamais hydromorphes). Le déterminisme est essentiellement climatique, avec un climat sec défavorable aux hêtraies (précipitations généralement inférieures à 700 mm/an, parfois beaucoup moins).
Ce déterminisme est bien différent de celui des hêtraies calcicoles sèches des Cephalanthero damasonii-Fagetalia sylvaticae, qui occupent des stations sèches (sol squelettique, exposition chaude, fort drainage interne) mais en contexte général arrosé favorable au Hêtre et à ses espèces affines.
Le caractère souvent améliorant du sol dans le bilan hydrique (bonne réserve utile) et de la situation topographique oppose en outre ces forêts aux chênaies pubescentes des Quercetalia pubescenti-petraeae. Ainsi, les forêts des Querco petraeae-Carpinetalia betuli « fuient » souvent les sols et les situations topographiques les plus sèches sous les climats les plus secs, où elles sont remplacées par des chênaies mixtes et pubescentes des Quercetalia pubescenti-petraeae).
En contexte méditerranéen, dans l’aire des Quercetea ilicis Braun-Blanq. in Braun-Blanq., Roussine & Nègre, 1952), c’est dans les vallons frais et en bas de versant frais qu’on retrouve le Querco petraeae-Carpinetalia betuli avec l’Erythronio dentis-canis-Carpinion betuli (Horvat 1958) Marinček in S. Walln., Mucina & Grass 1993.

Nom cité du syntaxon

Querco petraeae-Carpinetalia betuli Moor ex R. Bœuf 2014 (Les végétations forestières d’Alsace : 95).

Synonymes

Carpino betuli-Fagetalia sylvaticae Scamoni & H. Passarge 1959 p.p. ; Dactylido glomeratae-Carpinetalia betuli H. Passarge & Hoffmann 1968 nom. inval. (art. 3d, 11) ; Querco petraeae-Carpinetalia betuli Moor 1976 nom. inval. (art. 8).

Type nomenclatural

Carpinion betuli Issler 1931.

Combinaison caractéristique d'espèces

Boeuf (2014) cite comme caractéristiques Quercus petraea, Prunus avium, Carpinus betulus, Tilia cordata, Rosa arvensis, Campanula trachelium, Dioscorea communis, Luzula forsteri, Potentilla sterilis, ainsi que Hypericum montanum, Buglossoides purpureocaerulea, Melittis melissophyllum, Poa nemoralis et Vinca minor. En outre Ruscus aculeatus est ajoutée car l’auteur mentionne l’existence de cet ordre dans d’autres parties du territoire français. L’analyse réalisée ici à l’échelle de la France et des territoires limitrophes permet d’affiner cette liste, établie principalement pour l’Alsace.
Les caractéristiques de cet ordre, qui le différencient des deux autres, sont en grande partie communes avec les forêts mésophiles des ordres de la classe voisine (Fagetalia sylvaticae Tüxen in Bärner 1931, Carpino betuli-Fagenalia sylvaticae (Scamoni & H. Passarge 1959) R. Boeuf & Royer in R. Boeuf 2014, Ulmo-Fraxinetalia excelsioris H. Passarge 1968, Alno incanae-Fraxinetalia excelsioris (Oberd. 1953) H. Passarge 1968 et Ulmo-Fraxinetalia excelsae Passarge 1968).
Elles indiquent des sols souvent épais, la sécheresse étant avant tout de nature climatique.
Les espèces suivantes sont de bonnes caractéristiques d’ordre : Carpinus betulus, Prunus avium, Tilia cordata, Ulmus minor pour les arbres, Ajuga reptans, Arum maculatum, Cardamine pratensis, Carex sylvatica, Crataegus laevigata, Dactylis glomerata subsp. lobata, Dryopteris filix-mas, Euonymus europaeus, Geranium robertianum, Glechoma hederacea, Geum urbanum, Luzula forsteri, Polygonatum multiflorum, Potentilla sterilis, Scilla bifolia, Veronica chamaedrys et Vinca minor pour les herbacées. Elles sont exclues des autres forêts thermophiles, notamment de celles des Cephalanthero damasonii-Fagetalia sylvaticae (Rameau ex Boeuf et Royer in Boeuf 2014 ou des Quercetalia pubescenti-petraeae. En outre, le cortège des acidiclinophiles différencie bien plusieurs associations de cet ordre, sur sols désaturés, des hêtraies calcicoles sèches du Cephalanthero damasonii-Fagetalia sylvaticae. Parmi elles, Eurhynchium striatum et Rhytidiadelphus triquetrus sont de bonnes caractéristiques, mais cette liste serait probablement à compléter car les bryophytes terricoles ont été insuffisamment prises en compte dans les relevés.
À noter qu’il ne semble pas possible de trouver de véritables caractéristiques d’ordre parmi les espèces du groupe écologique des thermoxérophiles. Celles qui sont présentes dans les différentes alliances de cet ordre sont en fait des caractéristiques de classe (par exemple Hypericum montanum, Buglossoides purpureocaerulea et Melittis melissophyllum, citées dans Boeuf 2014).
Il est en revanche possible de citer des caractéristiques thermoxérophiles au sein des alliances. Ceci n’est pas étonnant, vu que cet ordre est le moins thermoxérophile de la classe, comme exposé ci après (voir synécologie). Dans les régions à la pluviomètrie limite pour le Hêtre, les caractéristiques thermoxérophiles de la classe (plus celles citées dans les niveaux syntaxonomiques inférieurs) permettent de faire la distinction entre les chênaies-charmaies des Querco petraeae-Carpinetalia betuli et les sylvofaciès sans Hêtre de hêtraies-chênaies-charmaies des Carpino betuli-Fagenalia sylvaticae. On recherchera notamment parmi elles les caractéristiques exclusives des Quercetea pubescentis (absentes des Cephalanthero damasonii-Fagenalia sylvaticae). Enfin, et comme le préconisait Rameau (1996) [6], la compréhension du passé sylvicole des peuplements est indispensable, afin de déméler les causes naturelles des causes anthropiques dans la composition dendrologique d’un peuplement.

[6] « Il faut insister sur les risques qui existent toujours dans l’interprétation d’une forêt, de confondre l’état actuel avec la véritable végétation potentielle ou de rechercher d’hypothétiques relations entre le peuplement actuel et les facteurs stationnels en ignorant totalement la dimension anthropique du milieu. L’analyse phytosociologique doit absolument intégrer ces réalités dynamiques : tout groupement forestier défini est à restituer dans le contexte dynamique et anthropique. Il en va de la crédibilité scientifique du phytosociologue(Rameau 1996).

Bibliographie

 Renaux B., Timbal J., Gauberville C., Boeuf R., Thébaud G., Bardat J., Lalanne A., Royer J.-M. & Seytre L., 2019. Contribution au prodrome des végétations de France : les Quercetea pubescentis Doing-Kraft ex Scamoni & H. Passarge 1959. Doc. phytosoc., série 3, 10 : 41-136. (Source)