Ulmo minoris-Fraxinetalia excelsioris H. Passarge 1968

Prodrome des végétations de France décliné (PVF2)

Synécologie

Végétations de climax édaphique sur station à très bonne alimentation en eau, à l’origine de sols hydromorphes de type rédoxysol voire réductisol, engorgés par une nappe d’eau peu circulante et donc faiblement oxygénée, au contraire des végétations alluviales des Populetalia albae. On retrouve donc typiquement ces forêts dans des dépressions, avec engorgement du sol sous l’effet d’une nappe perchée, ainsi que sur les terrasses (banquettes) situées en bas de versant. Dans ce dernier cas, la présence d’un cours d’eau en contrebas est fréquente, mais les végétations des Ulmo minoris-Fraxinetalia excelsioris sont alors localisées sur les terrasses supérieures peu soumises à l’influence de la rivière et de ses crues, entre le versant (occupé par des forêts mésophiles des Fagetalia sylvaticae) et la rivière bordée de végétation des Populetalia albae. Les contraintes dues à l’engorgement prolongé à faible profondeur par une eau faiblement oxygénée limitent fortement la dynamique du Hêtre. Dans de rare cas (vallon frais sur éboulis calcaire grossier), le sol n’est pas hydromorphe, l’omniprésence des postpionnières est alors davantage due à leur très forte dynamique et aux difficultés de germination du Hêtre sur substrat grossier (déterminisme rappelant celui des forêts d’éboulis des Aceretalia pseudoplatani, ordre avec lequel ces forêts font transition). D’autres facteurs écologiques limitent également la dynamique du Hêtre dans ces situations topographiques, comme les fonds de ravin très confinés et froids, de même que les colluvions limono-argileuses très épaisses à l’origine d’une très forte réserve en eau favorisant le Frêne commun ou le Chêne pédonculé.

Ces forêts sont à distinguer des sylvofaciès de recolonisation (à Chêne pédonculé et Frêne commun), de taillis ou de taillis-sous-futaie (à Chêne pédonculé, Chêne sessile, Frêne commun, Érable sycomore, Charme commun, Tilleuls…) et des hêtraies-chênaies-charmaies du Carpino betuli-Fagion sylvaticae R. Boeuf, Renaux & J.-M. Royer in R. Boeuf 2011, très couramment observés et autrefois regroupés au sein du Carpinion betuli Oberd. 1957 (notamment dans les travaux des années 1960 à 1970 : Noirfalise 1969, Rameau 1974…). Bien que ce traitement en taillis favorise le développement de la strate herbacée, dont certaines espèces sont communes avec les Ulmo minoris-Fraxinetalia excelsioris (Primula elatior par exemple sur les stations fraîches), la distinction est possible grâce aux espèces hygrophiles à hygroclines. Une rapide analyse du sol (sondage à la tarière pour identifier les traces d’hydromorphie) fourni également des informations utiles sur l’intensité des contraintes liées à l’hydromorphie.

Si les conditions stationnelles sont contraignantes pour certains arbres, elles sont en revanche très favorables à l’expression de la flore herbacée, avec des niveaux de fertilité élevés, et des sols frais mais suffisemment bien drainé en surface pendant la saison de végétation pour le système racinaire des herbacées.

Nom cité du syntaxon

Ulmo minoris-Fraxinetalia excelsioris H. Passarge 1968 (Pflanzengesellschaften des nordostdeutschen Flachlandes : 59-60, 91 et tab. 8-9).

Synonymes

Querco roboris-Fraxinenalia excelsioris H. Passarge 1968 ; Corresp. : Acero-Ulmion Scamoni et H. Passarge 1959.

Type nomenclatural

Typus ordinis : Fraxino excelsioris-Quercion roboris H. Passarge & Ger. Hofm. 1968 désigné in Willner (Phytocoenologia 45 (1-2) : 186).

Physionomie

Peuplement dominé par les postpionnières, en premier lieu Quercus robur et Fraxinus excelsior, accompagnées (notamment en condition neutrophile à calcicole). Acer pseudoplatanus, A. platanoides, et Alnus glutinosa peuvent être présents de manière plus disséminée. Stades pionniers et dégradés à Populus tremula, Salix caprea, accompagnés sur substrat acide par Betula pubescens et B. pendula. Dans la strate muscinale, les espèces les plus fréquentes sont Brachythecium rutabulum, Eurhynchium striatum, Thuidium tamariscinum, Hypnum cupressiforme et Rhytidiadelphus triquetrus.

Combinaison caractéristique d'espèces

Caractéristiques et différentielles d’ordre :
Caractéristiques : Eurhynchium striatum, Ficaria verna, Loncomelos pyrenaicus, Plagiomnium undulatum, Poa trivialis, Potentilla sterilis et Quercus robur. Il est possible d’ajouter en outre Deschampsia cespitosa, Heracleum sphondylium et Viburnum opulus, même si elles sont communes avec les Alno glutinosae-Ulmenalia minoris Rameau ex subord. nov. Salix caprea, espèce des coupes forestières, trouve souvent ici un développement plus important que dans les forêts mésophiles. Acer campestre, Carpinus betulus, Convallaria majalis, Festuca heterophylla, Luzula pilosa et Polygonatum multiflorum sont différentielles par rapport aux autres ordres des Geranio robertiani-Fraxinenea excelsioris. Elles se retrouvent dans les végétations plus mésophiles des Fagenea sylvaticae (H. Passarge 1968, R. Boeuf 2014) stat. nov. (pour Festuca heterophylla, Polygonatum multiflorum), en particulier le Carpino betuli-Fagion sylvaticae R. Boeuf, Renaux & J.-M. Royer in R. Boeuf 2011 (Carpinus betulus, Convallaria majalis, Loncomelos pyrenaicus et Luzula pilosa), végétations plus mésophiles vers lesquelles l’ordre fait transition.

Bibliographie

 Renaux B., Timbal J., Gauberville C., Thébaud G., Bardat J., Lalanne A., Royer J.-M. & Seytre L., 2019. Contribution au Prodrome des végétations de France : les Carpino betuli-Fagetea sylvaticae Jakucs 1967. Doc. phytosoc., série 3, 11 : 1-423. (Source)