Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats
Étage mésoméditerranéen, de 10 à 50 m d’altitude.
Bords de certains marais d’eau douce en zone planitaire de Provence calcaire.
Substrat généralement tourbeux.
Surtout au niveau de résurgences d’eau douce de température assez constante (T. min. : 11,5°c et T. max : 14,5°c), appelées localement « laurons », apparaissant à la faveur de fissures dans le poudingue des galets siliceux de Crau.
Formation spatialement intermédiaire entre les formations à Molinie (Molinia caerulea) et à Choin (Schoenus nigricans), moins exigentes en eau, et les formations à Scirpes (Scirpus div. sp.), Roseau (Phragmites australis) et Marisque monospécifique des étendues marécageuses.
Individualisation phytosociologique assez délicate, car le Marisque se rencontre dès le faciès le plus humide de la prairie à Molinie et devient de plus en plus abondant vers les marais permanents pour former de vastes étendues.
Diversité typologique selon la situation topographique et les usages (feux, pâturages) qui engendrent des différents faciès exacerbés par les phénomènes de compétition.
Plusieurs variantes ont été signalées : à Pédiculaire des marais ou à Thélypteris des marais si la densité en Marisque est assez réduite, et à Gentiane des marais, si la densité en Marisque devient plus importante.
Pelouse de hauteur moyenne (quelques dizaines de cm), peu homogène, à recouvrement important en herbacées vivaces (hémicryptophytes et géophytes).
Répartition spatiale réduite à quelques m2 ou dizaines de m2.
La densité des pieds de Marisque conditionne fortement la composition floristique et la diversité de la communauté.
Confusion possible avec (i) diverses formations de prairies humides de Crau, en contact avec l’habitat (prairie à Molinie, marais à Choin ou à Carex élevé) ou (ii) avec des prairies dominées par le Marisque et diverses Cypéracées : groupement à Cladium mariscus de la basse vallée de la Durance (ex.: Mallemort), mais où les autres espèces caractéristiques de la prairie à Gentiane et Marisque sont absentes.
Spontanée :
Avec l’augmentation de l’humidité, extension des hélophytes compétitrices : Marisque, Scirpes et Roseau.
Si phénomènes d’atterrissement, progression des herbacées mésophiles : Molinie, Choin, Pimprenelle officinale (Sanguisorba officinalis), Salicaire (Lythrum salicaria), Eupatoire chanvrine (Eupatorium cannabinum)...
Liée à la gestion :
La gestion traditionnelle pratiquée en Crau, avec des incendies périodiques assez fréquents des zones à Marisque permet de conserver la communauté en limitant la prolifération du Marisque. Les herbivores ne consomment que les pousses de l’année du Marisque, seules appétantes, freinant ainsi le dynamisme de cette espèce.
Une fauche tardive permet un maintien satisfaisant de la richesse et de la diversité floristique de la communauté.
Les modifications de régime hydrique ayant localement engendré une augmentation des niveaux d’eau conduisent à une progression nette des communautés à hydrophytes ou hélophytes ubiquistes.
Prairie à Molinie (Molinia caerulea) sur calcaire et argile [Molinietum mediterraneum] [Code UE : 6410].
Prairie à Scirpe (Scirpoides holoshoenus)[Holoschoenetum].
Marais à Choin (Schoenus nigricans).
Marais à Carex élevé (Carex elata) [Caricetum elatae].
Marais à Roseau commun (Phragmites australis) et Scirpes (Schoenoplectus lacustris et S. tabernaemontani) [Scirpeto-Phragmitetum australe].
Petites pelouses (« tonsures ») à espèces annuelles des mares temporaires méditerranéennes [Code UE : 9330].
Très rare en Provence, uniquement dans la partie occidentale, en « coustière » de Crau : bordure des marais de Raphèle (marais de Meyranne et des Chanoines) et de l’Audience, Mas du Moulin, Mas de Beynes, Mas-Thibert au marais de Capeau, marais de Saint-Martin.
Localisation ancienne bien plus importante, puisque les marais d’Arles et de la vallée des Baux ont été en grande partie draînés depuis le XIXe siècle, alors que des études palynologiques récentes mettent bien en exergue la présence de formations denses à Marisque.
Formations très rares et localisées, à distribution fragmentée et endémiques de France.
Intérêt biogéographique majeur.
Grande valeur écologique et originalité fonctionnelle puisque la présence de cet habitat relique s’explique par une situation géomorphologique particulière : résurgence perçant l’épais poudingue.
Forte valeur biologique et biogéographique du fait de la présence de végétaux eurosibériens ou circum-boréaux (souvent protégés : °) en populations très isolées de l’aire générale de répartition des espèces et classiquement considérés comme des « survivants glaciaires » : Gentiane des marais (Gentiana pneumonanthe), Pigamon jaune (Thalictrum flavum), °Thélypteris des marais (Thelypteris palustris), °Pédiculaire des marais (Pedicularis palustris), °Séneçon des marais (Senecio paludosus), Scutellaire à casque (Scutellaria galericulata), °Liparis de Loesel (Liparis loeselii), Grassette du Portugal (Pinguicula lusitanica), °Gesse des marais (Lathyrus palustris) ; présence occasionnelle de °Spiranthe d’été (Spiranthes aestivalis).
Intérêt majeur pour les communautés d’invertébrés aquatiques et semi-aquatiques des « laurons » et de leurs abords. Parmi les Coléoptères remarquables, il faut citer la présence d’espèces aquatiques non méditerranéennes (ex.: Hydroporus angustatus), de phytophages (ex. : Aphthona violacea qui vit sur l’Euphorbe des marais), de nombreux hydrophiles (ex. Odacantha melanura, Microsprus sp.). Parmi les Orthoptères, Parapleurus alliaceus et Paracinema tricolor subsp. bisignata consituent de bons bio-indicateurs de ce milieu.
Espèces de l’annexe II de la directive « Habitats » :
Présence de Liparis de Loesel (Liparis loeselii), non revu depuis les années 1960.
États à privilégier :
Prairie assez dense à Marisque, mais où existent des micro-taches à recouvrement végétal réduit assurant la régénération des herbacées peu compétitrices, de haute valeur patrimoniale.
Autres états observables :
En situation de surpâturage par les taureaux, pelouse rase et piétinée à recouvrement total réduit.
Prairies fauchées.
Cette communauté régresse sérieusement depuis quarante ans avec le développement d’infrastructures (complexe industriel de Fos, autoroutes, canaux).
Communauté vulnérable du fait de l’exiguïté et de la rareté des habitats favorable et de sa localisation générale très restreinte.
Sérieuses menaces engendrées par l’invasion de végétaux exotiques à forte occupation spatiale : problèmes très sérieux posés par le Séneçon en arbre (Baccharis halimifolia) qui a envahi près d’un hectare de prairies à Marisque et Molinie, et à un degré moindre par l’Herbe de la pampa (Cortaderia selloana) et les Jussies (Ludwigia peploides, L. uruguayensis).
Des exutoires ont été bouchés par des routes ou modifiés par des canaux, engendrant une élévation de la lame d’eau et des changements profonds de la composition des biocènoses.
Une baisse de la qualité (tendance à l’eutrophisation) des eaux des laurons a été constatée ces dernières années.
Habitat sans intérêt économique particulier mais intégré dans des unités spatiales humides plus vastes et pouvant à ce titre être pâturées. Ces unités sont très relictuelles actuellement et en forte régression.
Absence de donnée.
Bensettiti F., Boullet V., Chavaudret-Laborie C. & Deniaud J. (coord.), 2005. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 4 - Habitats agropastoraux. Volume 2. MEDD/MAAPAR/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 487 p. + cédérom. (Source)