ZNIEFF 030020026
Savanes Counamama et Gabriel

(n° régional : 00060001)

Commentaires généraux

La ZNIEFF des Savanes Counamama et Gabriel se situe au sud de la RN1, à 1,5 kilomètres à l'est d'Iracoubo.

Il s'agit d'un ensemble de savanes incluses au sein d'un massif de forêt intacte de la plaine littorale. La Savane Counamama associe savane basse herbacée sèche et savane basse herbacée marécageuse, alors qu'au sud de la ZNIEFF, la Savane Gabriel présente un faciès de savane arbustive. Cette dernière est située sur une petite colline et parsemée de nombreuses savanes-roches, ce qui lui confère un intérêt paysager remarquable.

La ZNIEFF s'inscrit dans l'ensemble des savanes sèches littorales de Guyane, principalement localisées entre Cayenne et Organabo dans la plaine côtière ancienne. Elles se trouvent sur des sols argileux marins, consolidés et en grande partie recouverts de sédiments sableux fins datant du Pleistocène. Ces sols sont le plus souvent exondés.

L'origine des savanes n'est probablement pas entièrement naturelle. Elle est due à un ensemble de facteurs liés entre eux, d'ordre climatique (saison sèche plus marquée sur la bande côtière), paléoclimatique (témoin des époques plus froides et plus sèches du Pleistocène et de l'Holocène durant lesquelles la Guyane était en partie recouverte de savane), édaphique (sols peu favorables à une couverture forestière) et anthropique (localisation des communautés amérindiennes d'autrefois et de la population actuelle sur la bande côtière ; maintien de la physionomie des savanes par les feux saisonniers).

La Savane Counamama présente un ensemble de faciès de savanes basses herbacées exondées et marécageuses. Des fourrés sclérophylles parsèment la zone, bordée d'une forêt intacte de plaine côtière. Elle se présente sous l'aspect d'une grande étendue de petites herbes en touffes de 10 à 30 cm de haut laissant entre elles des plages de sol nu. Dans cette savane herbacée, la flore y est dominée par des Cypéracées et des Poacées, auxquelles se mêlent principalement des Burmanniacées, Astéracées, Gentianacées, Mélastomatacées, Polygalacées et Lentibulariacées. Ponctuellement, la physionomie est marquée par quelques sous-arbrisseaux nains de 30 à 60 cm qui émergent ainsi du tapis herbacé : Byrsonima verbascifolia (" z'oreil d'âne ") aux grandes feuilles duveteuses caractéristiques. Le milieu correspond alors à la savane basse à nanophanérophytes.

D'autres secteurs présentent un faciès de savane haute herbeuse et arbustive, floristiquement plus riche que la savane basse, et transitoire avec les groupements paraforestiers périphériques. La flore herbacée est dominée par les Poacées ainsi que des Cypéracées (Rhynchospora barbata caractéristique du milieu) et Rubiacées, alors que Curatella americana domine la flore des buissons et petits arbres, accompagné de Byrsonima crassifolia et de Mélastomatacées et Clusiacées.

Dans les secteurs plus humides, la savane basse marécageuse est principalement composée de Poacées, de Cypéracées, accompagnées de Fabacées, Lentibulariacées et Lamiacées. Quelques espèces sont communes aux marais (Cypéracées, Onagracées, Blechnacées comme la fougère Blechnum serrulatum). Mais la physionomie de cette formation est marquée essentiellement par Rhynchanthera grandiflora, une Mélastomatacée formant des buissons remarquables par leurs grandes floraisons violettes, et par Heliconia psittacorum, un petit balisier aux bractées rouge orangé, en massifs denses.

La Savane Gabriel présente un faciès de savane basse arbustive collinaire à Byrsonima crassifolia, ou " savane à poiriers ", espèce ligneuse se présentant sous la forme de petits arbres tortueux constituant la formation transitoire avec les milieux paraforestiers. La flore présente une composition en familles assez semblable à la savane basse herbacée, mais sensiblement plus riche en espèces. De nombreux affleurements rocheux ponctuent la savane, constituant un réseau de savanes-roches. Plus précisément six ensembles de savanes-roches y ont été dénombrés, soit une surface totale rocheuse de plus de 3000 m². Quelques espèces végétales directement liées à ce type de biotope y sont recensées. Citons notamment l’orchidée terrestre protégée Cyrtopodium andersonii, dont les populations littorales sont rares et menacées. Plusieurs plantes rares et déterminantes sont également connues de ce secteur bien qu'il n'ait pas fait l'objet d'inventaires botaniques approfondis : Paepalanthus oyapockensis (Eriocaulaceae), Lepidaploa remotiflora (Asteraceae), Rhynchospora curvula (Cyperaceae), Inga virgultosa (Fabaceae), Lacistema pubescens (Lacistemaceae), Cordiera myrciifolia (Rubiaceae).

Ce type d’habitat naturellement rare sur le littoral guyanais semble ici particulièrement bien préservé de l’invasion de plantes rudérales en raison de son imbrication dans le massif forestier et de sa relative inaccessibilité.

Ces savanes s'insèrent dans un massif de forêt intacte de plaine côtière ancienne sur sols sableux. Ceux-ci sont dominés par Parinari campestris et Protium heptaphyllum, des Licania, Inga, Iryanthera hostmanii et de nombreux palmiers : Maripa (Attalea maripa), Comou (Oenocarpus bacaba), Awara mon père (Socratea exorrhiza), Pinot (Euterpe oleracea). En sous-bois abondent divers Ischnosiphon, Piperacées, Melastomatacées et Phenakospermum guianense qui en marque la physionomie. Les lisières constituées par les groupements paraforestiers périphériques sont caractérisées par le Palmier awara (Astrocaryum vulgare) ainsi que Clusia nemorosa, Davilla aspera, Hirtella paniculata, Miconia ciliata et Tibouchina aspera.

Sur le plan faunistique, ces savanes herbacées et arbustives accueillent un cortège d'oiseaux caractéristique avec notamment plusieurs espèces strictement liées à ces habitats rares : le Sporophile plombé (Sporophila plumbea), le Tangara à camail (Schistoclamys melanolepis), le Colibri tout-vert (Polytmus theresiae). Des données anciennes d'Elénie tête-de-feu (Elaenia ruficeps) soulignent l'originalité ornithologique de ces savanes. La Savane de Counamama constitue également une station importante pour la Bécassine géante (Gallinago undulata). Au cours de leur passage migratoire postnuptial, certains limicoles recherchant préférentiellement les secteurs herbacés ras et découverts, font halte dans la savane, tout particulièrement le Pluvier dominicain (Pluvialis dominica), le Chevalier solitaire (Tringa solitaria), et probablement le Maubèche des champs (Bartramia longicauda).

Les zones marécageuses de la Savane Counamama jouent probablement un rôle important pour la reproduction des amphibiens, et leur inventaire devrait révéler à terme la présence d'espèces intéressantes.

Les savanes incluses en Guyane sont relativement rares. La plupart des savanes sont en effet très proches du littoral et accessibles directement depuis la route nationale. L'enclavement de la ZNIEFF, le fait qu'elle ne soit pas visible depuis la route et l'absence de piste d'accès, lui confèrent un caractère préservé remarquable.

Commentaires sur la délimitation

La ZNIEFF est limitée de la manière suivante :

N: Au nord, la ZNIEFF est limitée par les forêts (dégradées ou non) qui bordent la RN1 entre les points A et B (à l'intersection avec la piste) ;

E: A l'est, le chemin s'enfonçant entre la Savane de Counamama (également appelée Savane Mal Ventre) et le pripris de Trou Caimans, depuis la RN1 (point B) jusqu'aux zones habitées au point C, en excluant les zones forestières et agricoles entre la piste et les savanes.

S et W: Au sud, le zonage est bordé par la zone forestière au nord de la crique Arouague, incluant la savane Gabriel et le corridor écologique compris entre elle et la savane de Counamama. L'ouest est délimité par le domaine forestier compris entre les savanes et la rive droite du fleuve Iracoubo.

Un tampon de 100m est ajouté au zonage afin de prendre en compte la lisière des savanes.

Coordonnées des points mentionnés (WGS84, UTM 22 nord):

A (257822m; 605456m) - B (260756m; 604028m) - C (260468m; 601535m)