Parution : 21 octobre 2020 Catégorie : Inventaires d'espèces
Les poissons diadromes, qui réalisent des migrations entre mer et rivière, ont été fortement fragilisés par les activités humaines jusqu'à totalement disparaitre de certains bassins. C'est ce que montre un article scientifique publié par l’INRAE, en association avec l'OFB, l'Université de Lorraine et l’UMS PatriNat.
Sur la base de l'analyse d'un large éventail de sources historiques, les auteurs ont reconstitué la distribution passée de 8 taxons diadromes (du milieu du 18e siècle au début du 20e siècle) et ont constaté que ces derniers occupaient la plupart des principaux cours d'eau français (Figure 1).
Figure 1. Nombre potentiel de taxons diadromes dans les principaux cours d’eau français (modifiée de Merg et al. 2020)
En comparant cette distribution passée avec les données actuelles de présence des taxons diadromes, ils ont quantifié la perte de richesse sur 555 sites. Ils ont ainsi pu constater que 45% des sites, qui étaient autrefois habités par des poissons diadromes, ont actuellement perdu la totalité de leur assemblage. Et parmi les 8 taxons étudiés, 5 ont perdu plus de 50% de leur aire de distribution d'il y a deux siècles (Figure 2). Ces observations sont cohérentes avec le déclin massif de ces espèces qui a été observé notamment en Europe au cours du siècle dernier.
Figure 2. Disparition (rouge) et maintien (bleu) du linéaire de cours d'eau potentiellement colonisé (en 103 km) pour 8 taxons diadromes (modifiée de Merg et al. 2020)
Les auteurs ont ensuite mis en évidence les principaux facteurs responsables de ces pertes. Les résultats montrent que la hauteur des ouvrages mais aussi la forte densité des obstacles rencontrés sur le parcours migratoire ont un impact considérable sur le déclin des taxons. Plusieurs auteurs ont d'ailleurs souligné le rôle des grands barrages dans ce déclin, mais cette étude montre aussi que ses causes sont potentiellement multiples et cumulatives.
Finalement, plusieurs scénarios de restauration de la continuité écologique ont été testés et ont montré que l'effacement de certains ouvrages pourrait permettre à ces espèces de reconquérir une partie du linéaire historiquement colonisé. Les auteurs concluent que ces mesures de restauration doivent cependant être adaptées aux particularités de chaque bassin afin de limiter le nombre d'obstacles à supprimer ou à aménager par des dispositifs de franchissement efficaces.
Grande alose Alosa alosa © B. Stemmer Truite de mer _Salmo trutta _ © Hans-Petter Fjeld - CC BY-SA 2.5 Lamproie marine Petromyzon marinus © F. Melki / Biotope Esturgeon Acipenser sturio © Wrangel
- Lire l'article « Modeling diadromous fish loss from historical data: Identification of anthropogenic drivers and testing of mitigation scenarios » - Télécharger les données historiques sur le GBIF : Historical occurrences of diadromous fishes in French rivers between 1750 and 1980, INRAE - Journée mondiale des poissons migrateurs