D6-1 - Vases et vases sableuses circalittorales du large

Typologie nationale des habitats marins benthiques de la Manche, de la Mer du Nord et de l'Atlantique (NatHab-Atl)

Source de l'ajout à la typologie

L’habitat D6-1 (anciennement M10.01.04) a été créé dans la version 1 de la typologie (Michez et al., 2013) ainsi que l’ensemble des neuf sous-habitats de D6-1.1 à D6-1.9, correspondant à :
- M10.01.04.01 Sédiments envasés cohésifs du circalittoral du large à Ampharete falcata gazonnant avec Parvicardium pinnulatum
- M10.01.04.02 Vases molles du circalittoral du large à Foraminifères et Thyasira spp.
- M10.01.04.03 Sédiments envasés du circalittoral du large à à Styela gelatinosa, Pseudamussium peslutrae et Ascidies solitaires
- M10.01.04.04 Vases et vases sableuses eutrophisées du circalittoral du large à Capitella capitata et Thyasira spp.
- M10.01.04.05 Vases et vases sableuses du circalittoral du large à Levinsenia gracilis et Heteromastus filiformis
- M10.01.04.06 Vases sableuses du circalittoral du large à Paramphinome jeffreysii, Thyasira spp. et Amphiura filiformis
- M10.01.04.07 Vases sableuses du circalittoral du large à Myrtea spinifera et Polychètes
- M10.01.04.08 Vases sableuses du circalittoral du large à Nucula sulcata et Brissopsis lyrifera
- M10.01.04.09 Vases du circalittoral du large à Ninoe armoricana et Sternaspis scutata

Les codes ont été modifiés dans la version 3 (Michez et al., 2019).

Facteurs abiotiques

Etage : Circalittoral du large ; [en continuité avec le circalittoral côtier (C6-1 et C6-2)]
Nature du substrat : Vases et vases sableuses cohésives ; [mosaïque de faciès toujours envasés, supérieur à 20 % de vase]
Répartition bathymétrique : 80 à 120 m
Hydrodynamisme : Faible
Salinité : Milieu marin
Température : Sténotherme
Lumière : Système phytal
Régime trophique : /

Caractéristiques stationnelles

Cet habitat se caractérise par des vases et des vases ensablées cohésives où le taux de pélites est toujours supérieur à 20%. Il se rencontre à une profondeur comprise entre 80 et 120 m. Il héberge une faune dépendante de la quantité de vases et de matière organique dans les sédiments. La biocénose est généralement dominée par des polychètes comme Ninoe armoricana, Sternaspis scutata, Amphicteis gunneri, Dasybranchus gajolae, Goniada norvegica, Melinna palmata, mais peut également comporter d’importantes populations de bivalves (comme Nucula sulcata) et d'échinodermes (comme Brissopsis lyrifera). Cet habitat constitue également les "fonds à langoustines" Nephrops norvegicus.
Il se situe dans la continuité des habitats C6-1 Vases sableuses circalittorales côtières et C6-2 Vases circalittorales côtières.
Cet habitat est bien décrit par Glémarec (1969) dans le nord du Golfe de Gascogne au niveau de la Grande Vasière. Du fait de l'hydrodynamisme trop important qui y règne, il est absent de la Manche et des côtes françaises de la Mer du Nord.

Variabilité

Les sous-habitats les plus largement documentés dans le nord du Golfe de Gascogne, au niveau de la Grande Vasière, sont les sous-habitats D6-1.8 Vases sableuses du circalittoral du large à Nucula sulcata et Brissopsis lyrifera et D6-1.9 Vases du circalittoral du large à Ninoe armoricana et Sternaspis scutata. Les variations observées entre ces deux sous-habitats sont dues à la composition du sédiment, l’augmentation de la fraction sableuse favorisant l’installation des mollusques bivalves au détriment des polychètes. Les sous-habitats D6-1.2, D6-1.6 et D6-1.7 sont mentionnés comme présents dans différents secteurs du Golfe de Gascogne mais n’ont pas fait l’objet de description spécifique dans les eaux françaises.
Les occurrences des sous-habitats D6-1.1, D6-1.3, D6-1.4 et D6-1.5 ne sont pas documentées sur les côtes françaises. La présence de ces sous-habitats est en revanche mentionnée dans les eaux anglaises et irlandaises. Certains sous-habitats de niveau trois sont décrits dans leurs fiches INPN respectives.

Dynamique temporelle

Sur le plateau continental Nord Gascogne, les apports trophiques par sédimentation suivent une dynamique saisonnière. Ils sont élevés à la fin de l’hiver et au printemps avec un maximum en avril en fonction des conditions météorologiques et hydrodynamiques liées aux débits des rivières, et deviennent très faibles lorsque la stratification est établie au cours de l’été et jusqu’à la fin de l’hiver. Bien que les invertébrés benthiques subissent cette saisonnalité dans les apports trophiques, la biomasse de la macrofaune benthique de cet habitat ne montre pas de signal saisonnier et demeure stable du printemps à l’automne. Cette stabilité est probablement liée à la stabilité de l’environnement dans l’étage circalittoral du large de la Grande Vasière avec notamment une faible variation des températures à l’échelle annuelle. A l’inverse, une forte saisonnalité dans les abondances des foraminifères a été décrite dans les habitats vaseux du Golfe de Gascogne en relation avec la dynamique des blooms phytoplanctoniques.
Les descriptions à large échelle des habitats benthiques du Golfe de Gascogne datent des travaux de Michel Glémarec dans les années 1960. Des revisites partielles faites au début des années 2000 mettent en évidence des changements à long terme notables très largement imputables aux effets du chalutage, et dans une moindre mesure à une diminution des apports terrigènes. Ces changements se sont traduits ainsi, le sous-habitat D6-1.9 Vases du circalittoral du large à Ninoe armoricana et Sternaspis scutata a évolué vers un habitat de sable envasé à Ampelisca spinipes et à Aponuphis fauveli . De même, le sous-habitat D6-1.8 Vases sableuses du circalittoral du large à Nucula sulcata et Brissopsis lyrifera a évolué vers des vases à Callianassa et Brissopsis ou des sables envasés à Nephtys caeca-Terebellides sp. ou Ampelisca spinipes-Melinna palmata.
De même, le bivalve Pinna rudis qui constituait autrefois d'abondants bancs, par exemple au large de Penmarc’h, a vu ses populations en grande partie détruites par le chalutage dès les années 1960.

Habitats pouvant être associés ou en contact

L’habitat D6-1 peut potentiellement être en contact avec les habitats suivants :
En contact supérieur avec les habitats circalittoraux côtiers :
- C1 Roches ou blocs du circalittoral côtier
- C5-1 Sables fins à moyens mobiles circalittoraux côtiers
- C6-1 Vases sableuses circalittorales côtières
- C6-2 Vases circalittorales côtières
- C6-2.5 Vases circalittorales côtières à pennatulaires et langoustines

En contact de même niveau bathymétrique :
- D1 Roches ou blocs du circalittoral du large
- D3-1 Sables grossiers et graviers circalittoraux du large
- D4-1 Sédiments hétérogènes circalittoraux du large
- D5-1 Sables fins propres circalittoraux du large à dentales
- D5-2 Sables fins envasés circalittoraux du large

Confusions possibles

Cet habitat peut être confondu avec les habitats vaseux du niveau bathymétrique supérieur C6-1 Vases sableuses circalittorales côtières et C6-2 Vases circalittorales côtières.
De par la présence du polychète Dasybranchus gajolae, une confusion est possible avec l’habitat D3-1.4 Gravelles envasées du circalittoral du large à Dasybranchus gajolae.

Répartition géographique

Cet habitat est absent de la Manche et de la Mer du Nord.
En Atlantique, il se retrouve au nord du Golfe de Gascogne au niveau de la Grande Vasière. Il occupe un très vaste ensemble sur tout l'axe médian de la plateforme continentale, sur 30 à 40 milles de largeur (Le Danois, 1948). Il est plus précisément observé du sud Finistère jusqu’au plateau de Rochebonne ainsi qu’aux abords du Cap Breton.
Le sous-habitat D6-1.8 se retrouve au nord du Golfe de Gascogne plus au large que le sous-habitat D6-1.9 (vers 100 m de profondeur) qui pour sa part, se retrouve au niveau de la Grande Vasière (70 m de profondeur), le long des escarpements rocheux pré-littoraux du Sud-Finistère et plus rarement au large de la Baie de Vilaine.

Fonctions écologiques

Rôle halieutique de l’habitat : les vases et vases sableuses circalittorales du large constituent des zones de pêche importantes pour les langoustines Nephrops norvegicus qui ont un fort intérêt commercial. L’effort de pêche sur cet habitat y est fort à très fort (croisement carte exploitation halieutique et localisation habitat). Dans le Golfe de Gascogne, la pêcherie de langoustine mobilise environ 200 navires pour un volume capturé annuellement de 3500 tonnes.

Statut de conservation

Inscrit sur la liste rouge des habitats européens, cet habitat est considéré comme "en danger" en Atlantique Nord-Est. Au titre de la DHFF (92/43/CEE), L’habitat D6-1 peut correspondre à l’HIC 8330 « Grottes marines » sous réserve de respect des critères d’identification de l’HIC (notamment de seuil de taille).

Tendance évolutive

Des travaux très récents réalisés sur les communautés de poissons d’habitats analogues en Mer Celtique suggèrent que cet habitat pourrait être fortement influencé dans le futur par le champ climatique en sus de la pression de pêche par chalutage.

Auteur(s)

Lutrand A., Houbin C., Thiébaut E.

Date de rédaction

2020

Bibliography

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