Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats
Les unités marines des Cahiers d'Habitats ne sont plus utilisées suite à la publication de l'interprétation française des HIC marins (de Bettignies et al., 2021). L’interprétation française de l'unité HIC est disponible ici, ainsi que les correspondances avec la typologie nationale d'habitats benthiques (NatHab-Atl).
En mode abrité, et semi-abrité, sur les fonds rocheux et de galets infralittoraux, la forêt de Laminaires voit la disparition des espèces de mode exposé au profit essentiellement de Laminaria saccharina. Celle-ci, présente de 0 à -20 m ne constitue cependant pas une véritable forêt dense comme il s'en développe en milieu exposé.
L'étendue de la frange exondable est variable, mais toujours restreinte. Le plus souvent, cet habitat est caractérisé par des courants de marée plus ou moins violents et par la présence de sable en suspension qui, sans créer de turbidité, n'en affecte pas moins le peuplement.
Elle est liée à la topographie et à la proximité des fonds sédimentaires qui influent sur le couvert algal. La vitesse du courant dans des chenaux resserrés donne naissance à des faciès particuliers. Le gradient latitudinal n'apparaît pas sur les côtes françaises étant donné que les limites sud des espèces dominantes sont situées en zone tempérée chaude ou en zone subtropicale.
Laminaria saccharina représente l'espèce dominante de l'habitat, elle est associée à Sacchoriza polyschides, Chorda filum et à plusieurs espèces de Cystoseires (Cystoseira baccata, C. foeniculata, C. tamariscifolia...). Les rhodophytes sont nombreuses : Asparagopsis armata, Gracilaria verrucosa, Gracilariopsis confervoides, Antithamnion plumosa, Brongniartella byssoides... ainsi que des phéophycées : Cladostephus spongiosus, Halopteris filicina, Desmarestia viridis...
Ces supports algaux, nombreux et denses, permettent à de nombreux épiphytes de s'installer : des hydraires, des anémones (Anemonia viridis, Aiptasia couchi), des bryozoaires Scrupocellariidés, des Eponges (Polymastia mammilaris, Suberites carnosus, Stolonica socialis), des ascidies (Morchellium argus, Aplidium elegans...), des polychètes (Bispira volutacornis, Spirographis spallanzanii). De nombreux poissons de petite taille s'abritent sous le couvert végétal et sont peu différents de ceux de mode exposé (Blenniidés, Cottidés, Cyclopteridés, Gobiesocidés, Gobiidés, Gadidés). Le bulbe de Sacchoriza est un abri privilégié pour le Lépadogaster à deux taches (Lepadogaster bimaculatus), le Petit Liparis (Liparis montagui)...
En présence de sédiment sableux en suspension, le faciès est caractérisé par l'algue brune Halidrys siliquosa et l'éponge Ciocalypta penicillus, qui hébergent de nombreux épiphytes : Calliblepharis caliata, Cutleria multifida, Scinaia spp, Desmarestia aculeata, Taonia atomaria.
La transition entre les modes exposé, semi-abrité et abrité n'est pas toujours aisée à percevoir, mais la diminution des Laminaires au bénéfice des Cystoseires et de la Sargasse (Sargassum muticum, espèce introduite) est un bon indicateur.
Typologie ZNIEFF-Mer (1994) : III.9.1.2, 9.3.5, 9.4.1, 9.4.2
Typologie Marine Biotopes (1996) : MIR (19 faciès)
Typologie EUNIS (1999) : A3.2
La durée de vie de L. saccharina n'est pas connue, et la grande majorité de la flore est annuelle. Le caractère pérenne de la forêt de Laminaires est ici très amenuisé.
Cet habitat se trouve au contact de la roche infralittorale en mode exposé (fiche : 1170-5) et des habitats sédimentaires UE 1110 ou 1160. Plus en profondeur, il est remplacé par les fonds circalittoraux.
Elle est peu différente de celle de l'habitat infralittoral en mode exposé (fiche : 1170-5). Cependant, certains sites, toujours en milieu abrité, mais à forts courants de marée, sont très caractéristiques de cet habitat : la baie de Saint-Malo et le golfe du Morbihan.
Cet habitat est caractérisé par sa forte production primaire, bien que les surfaces dominées par L. saccharina ne représente que de l'ordre de 3 % de l'espace occupé par les autres Laminaires. La densité et l'enchevêtrement de la sous-strate algale en fait un milieu riche en abris, propice à de très nombreuses espèces dont seulement quelques-unes sont herbivores. La production du champ d'algues est un fois de plus exportée vers les aires adjacentes, sédimentaires notamment.
Cet habitat ne fait pas, ou peu, l'objet d'une exploitation goémonière.
La Sargasse (Sargassum muticum), importée avec les Huîtres japonaises, a vu son aire de répartition s'étendre de 1969 à 1995, de la mer du Nord à l'Espagne. Elle affectionne particulièrement cet habitat, là où les courants sont importants. Elle s'est avérée petit à petit une compétitrice efficace de Laminaria saccharina, de Cystoseira nodicaulis, C. baccata, C. tamariscifolia, Gracilaria verrucosa, Scytosiphon lomentaria. En Normandie, elle serait responsable de la disparition de Laminaria saccharina. Saccorhiza polyschides et, à un moindre degré, Halidrys siliquosa peuvent également souffrir de cette compétition. De façon inverse, la Sargasse offre des supports et des abris. Des crustacés Peneidés, Palaemonidés et Hippolytidés trouvent refuge sous sa canopée et font l'objet d'une prédation par les jeunes Bars. Selon les auteurs et les sites, les espèces animales liées à la Sargasse varient entre 20 et 50.
La Sargasse occupe des espaces où les courants sont trop forts pour être supportés par d'autres espèces. Vu l'aire colonisée, le substrat spécifique (galets et cailloutis plus ou moins ensablés), la faible biomasse produite et l'importance des épibiontes, les inconvénients créés par cette introduction semblent aujourd'hui minimisés. Des interactions d'ordre biotique sont venues réguler l'extension et intégrer cette espèce exotique.
Cet habitat n'offre quantitativement pas la même richesse que la roche infralittorale en mode exposé (fiche : 1170-5) ; néanmoins, les Cystoseires et la Sargasse offrent une infinité de niches et d'abris pour de nombreuses petites espèces et stades juvéniles qui ont un rôle trophique indéniable dans l'ensemble des systèmes adjacents.
Les impacts économiques de l'invasion de la Sargasse ont été notables (gêne à la navigation, à l'ostréiculture) dans certains secteurs lors de la phase invasive, dans le golfe du Morbihan par exemple. Les nuisances décrites dans les années 70 et 80 sont aujourd'hui amoindries sans que l'on en connaisse les véritables raisons. Une analyse site par site peut révéler des situations contrastées vis-à-vis des impacts locaux d'une introduction accidentelle, mais, globalement, la Sargasse semble aujourd'hui avoir trouvé sa niche.
Les zones colonisées par la Sargasse méritent un suivi attentif afin d'évaluer les modifications locales de la biodiversité engendrées par l'introduction involontaire de cette espèce.
Bensettiti F., Bioret F., Roland J. & Lacoste J.-P. (coord.) 2004. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 2 - Habitats côtiers. MEDD/MAAPAR/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 399 p. + cédérom. (Source)
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