Formation ombrophile d'altitude, sous le vent du massif montagneux qui présente un grand intérêt biologique et patrimonial. Elle renferme plusieurs formations forestières (forêt ombrophile sub-montagnarde, forêt ombrophile tropicale montagnarde, forêt d'altitude), dans lesquelles différents faciès peuvent être distingués. L'inventaire floristique préliminaire (80 phanérogames et 108 ptéridophytes, soit un total de 188 plantes vasculaires), sans être une présentation exhaustive, donne un aperçu de la diversité exceptionnelle de cette zone.
Dans ces formations hautes, recueillant 3 à 5m d'eau par an, les végétaux sont agencés en strates avec les arbres de grande taille (30m de haut et plus, 1m de diamètre et plus, avec parfois des empattements à la base du tronc). Cette structuration génère une certaine pénombre dans le sous-bois et une diversité de micro-climat qui détermine la richesse en taxons. C'est de ce fait l'une des plus belles forêts denses humides de Guadeloupe. Sa complexité et sa richesse en endémisme des Petites Antilles voire de quelques îles lui confèrent une valeur patrimoniale régionale, déjà reconnue et signalée par des botanistes, tels que DUSS, STEHLE et QUESTEL. Ils signalent, dans cette forêt primitive, des arbres plusieurs fois centenaires dont Sterculia caribaea de 35m de haut et 15m de circonférence, et Ficus insipida de 20m de circonférence.
C'est aussi une zone à forte densité de Sloanea caribaea (Châtaignier), Amanoa caribaea (Bois rouge carapate, endémique de la Guadeloupe et de Dominique) et Dacryodes excelsa (Gommier blanc encens) parmi les grands arbres. Les arbres de seconde grandeur sont représentés notament par Richeria grandis (Marbri), Byrsonima trinitensis (Mauricif, endémique de la Guadeloupe, Dominique et Martinique), Ormosia krugii (Caconnier, espèce de Puerto-Rico de Guadeloupe et de Martinique), et d'autres Cordia reticulata (Bois chypre, endémique des Petites Antilles), Marila racemosa (endémique des Petites Antilles), Aniba bracteata (Bois jaune), ...
Dans les sous-bois sombres et humides, de cete sylve pluviale, les fougères abondent. Avec ses 108 taxons, c'est l'une des formations végétales les plus riches en ptéridophytes. En effet, la majorité des familles de fougères tropicales américaines est présente depuis les Cyateacées (Cyathea muricata, C. grandifolia ou fougère arborescente, endémique des Petites Antilles), Selaginellacées (Selaginella flabellata, endémique des Petites Antilles), Polypodiacées (Blechum ryanii, endémique des Petites Antilles, Tectaria spp., Nephrolepis spp.), Diplazium legalloi, Danae stenophylla, Ctenitis excelsa, autres endémiques des Petites Antilles... Les orchidées (Epidenddrum sp.), les Aracées (Philodendron spp.) et les Héliconiacées (Heliconia spp.) ne sont pas en reste dans ce type forestier où le bioclimat leur est également propice.
On observe notamment à Fond Bernard, une dégradation progressive et peu contrôlable de cette remarquable forêt départentalo-domaniale, par l'agriculture. Notons à Trianon la sylvculture de Mahogany (Swietenia macrophylla). Il y a risque d'extension ou d'implantation de cultures sur les derniers plateaux encore recouverts d'une forêt de qualité, et situés juste en dehors de la limite domaniale. Des espèces à tendance mésophile (Margarita nobilis,...) s'installent dans cette interface inférieure.
Le statut de forêt primaire est l'argument premier de l'inscription de la zone en ZNIEFF. Les menaces signalées plaident pour une protection sévère de ce précieux massif en grande partie primaire ou faiblement modifié dans sa limite inférieure. Nul doute que des inventaires ultérieurs conduiront à augmenter considérablement le nombre de phanérogames présents.
Unité écologique, à cheval sur la limite de la forêt domaniale et délimitée :
- au sud par les plantations de Mahogany à Trianon, au sud-est par les franges forestières limitrophes aux cultures de bananes de Fond Bernard et au sud-ouest par les bananeraies de Mont Val ;
- à l'ouest par les crêtes de Petite Négresse et Ananas ;
- à lest par la Ravine Flore et la Ravine de Fumée ;
- au nord par la courbe de niveau 1000m au haut de la Forêt de Fumée. Les limites au nord ne correspondent pas à une chute de biodiversité mais à une limite topographique. Des prospections ultérieures pourront justifier un complément ou une extension de la ZNIEFF voire la délimitation d'une autre ZNIEFF.