ZNIEFF 030030008
Savane Renner

(n° régional : 00100001)

Commentaires généraux

La ZNIEFF de la Savane Renner (type I), incluse dans la ZNIEFF de type II Savanes et pripris de du Sinnamary au Kourou, se situe le long de la route qui mène au pas de tir Soyouz depuis le carrefour Changement avec la RN 1.

Il s'agit d'une vaste savane herbacée dont l'étendue des perspectives offre l'un des plus beaux et des plus typiques paysages de savane guyanaise. Cette ZNIEFF de savane côtière peu prospectée jusqu'à ce jour se distingue par sa richesse spécifique, végétale et animale, et notamment par la rareté des espèces qu'elle abrite.

Elle fait partie de l'ensemble des savanes sèches littorales de Guyane, principalement localisées entre Cayenne et Organabo dans la plaine côtière ancienne. Celles-ci se trouvent sur des sols argileux marins, consolidés et en grande partie recouverts de sédiments sableux fins datant du Pleistocène. Ces sols sont le plus souvent exondés. L'origine des savanes n'est probablement pas entièrement naturelle. Elle est due à un ensemble de facteurs liés entre eux, d'ordre climatique (saison sèche plus marquée sur la bande côtière), paléoclimatique (témoin d’une part des époques plus froides et plus sèches du Pleistocène et de l'Holocène durant lesquelles la Guyane était en partie recouverte de savane, d’autre part des époques plus chaudes et humides pendant lesquelles la plaine côtière était partiellement inondée par les transgressions marines), édaphique (sols peu favorables à une couverture forestière) et anthropique (localisation des communautés amérindiennes d'autrefois et de la population actuelle sur la bande côtière ; maintien de la physionomie des savanes par les feux saisonniers).

La Savane Renner présente un ensemble de faciès très divers illustrant les différents types de savanes guyanaises : savanes basses et hautes herbacées, savanes marécageuses, savanes arbustives. Des fourrés sclérophylles parsèment la zone, bordée de forêts galeries et bosquets marécageux à Palmiers bâches (Mauritia flexuosa) au nord, à la lisière avec les pripris.

La savane basse sur sols sableux se présente sous l'aspect d'une grande étendue de petites herbes en touffes de 10 à 30 cm de haut laissant entre elles des plages de sol nu. Dans cette savane herbacée, la flore y est dominée par des Cyperaceae et des Poaceae, auxquelles se mêlent principalement des Burmanniaceae, Asteraceae, Gentianaceae, Melastomataceae, Polygalaceae et Lentibulariaceae (entre autres, Utricularia cucullata, espèce déterminante). Ponctuellement, la physionomie est marquée par quelques arbustes nains particulièrement bien adaptés aux feux, émergeant du tapis herbacé notamment à proximité des lisières des fourrés sclérophylles. Ce sont principalement deux espèces de Malpighiaceae : Byrsonima verbascifolia (" z'oreil d'âne ") se présentant sous la forme de sous-arbrisseaux nains (savane à nanophanérophytes) de 30 à 60 cm, aux grandes feuilles duveteuses caractéristiques ; et Byrsonima crassifolia, espèce ligneuse se présentant sous la forme de petits arbres tortueux constituant une formation transitoire (" savane à poiriers ") avec les milieux paraforestiers (le passage répété du feu ne lui permettant pas cette évolution). Dans les secteurs préservés des incendies, un faciès écologique et paysager non dégradé s'observe, correspondant à une savane haute herbeuse et arbustive, floristiquement plus riche que la savane basse, et transitoire avec les groupements paraforestiers périphériques. La flore herbacée est dominée par les Poaceae ainsi que des Cyperaceae (Rhynchospora barbata, caractéristique du milieu) et Rubiaceae, alors que Curatella americana (Dilleniaceae) domine la flore des buissons et petits arbres, accompagné de Byrsonima crassifolia, de Melastomataceae et de Clusiaceae. Dans les secteurs plus humides, la savane basse marécageuse est principalement composée de Poaceae, de Cyperaceae, accompagnées de Fabaceae, Lentibulariaceae et Lamiaceae. Quelques espèces sont communes aux marais (Cyperaceae, Onagraceae, Blechnaceae comme la fougère Blechnum serrulatum). Mais la physionomie de cette formation est marquée essentiellement par les buissons de Rhynchanthera grandiflora (Melastomataceae), remarquable par ses grandes fleurs violettes, et par les massifs denses d'Heliconia psittacorum (Heliconiaceae), un petit balisier aux bractées rouge orangé.

Mais la spécificité de cette savane tient à la présence de nombreux affleurements rocheux dispersés ça et là et qui possèdent une flore tout à fait originale et remarquable, une quinzaine d'espèces n'ayant été répertoriées quasiment que de cette zone en Guyane comme Evolvulus filipes (Convolvulaceae), les petites fougères Isoetes sp. et Ophioglossum nudicaule (espèce protégée). Notons aussi la présence sur un des plus grands affleurements rocheux de l'orchidée protégée Cyrtopodium andersonii, seule station littorale de l'espèce. La savane abrite également de nombreuses espèces déterminantes de Cyperaceae comme Bulbostylis stenocarpa, Eleocharis mitrata et Rhynchospora triflora.

Enfin, cette savane est l'unique biotope connu d'une espèce d'Iridaceae du genre Trimezia nouvelle pour la science. Cette espèce, recherchée partout dans les savanes ces 3 dernières années, n'a jamais été trouvée ailleurs. Elle est donc extrêmement rare. Notons que sa principale station a déjà été détruite par des travaux et on ne compte aujourd'hui plus que deux pieds !.

Cette ZNIEFF présente probablement un cortège quasi-complet de l'avifaune caractéristique des habitats de savane, mais l'inventaire reste incomplet. On note toutefois la présence du Bruant des savanes (Ammodramus humeralis), du Sporophile plombé (Sporophila plumbea), du Tangara à camail (Schistoclamys melanolepis), de la Sturnelle des prés (Sturnella magna), de l'Elénie huppée (Elaenia cristata), du Colibri rubis-topaze (Chrysolampis mosquitus), de l'ariane à poitrine blanche (Amazilia brevirostris) et de l'Engoulevent minime (Chordeiles acutipennis). Chez les rapaces, la Buse à queue blanche (Buteo albicaudatus), mais aussi le rare Busard de Buffon (Circus buffoni) se maintiennent ici en trouvant leur biotope de prédilection non perturbé, les grandes zones ouvertes herbeuses.

Parmi l'herpétofaune, la savane Renner abrite autour de ses lisières les lézards Kentropyx striata et Cnemidophorus cryptus. La Tortue charbonnière (Chelonoidis carbonaria) est bien représentée au sein des petits bosquets qui parsèment la savane. Ponctuellement, certains plans d'eau avec une lisière arborée servent de site de reproduction pour la petite Rainette Dendropsophus gaucheri.

La savane Renner est peu menacée dans son intégrité car elle se trouve dans l'enceinte du CSG. Néanmoins, la présence proche du pas de tir de la fusée Soyouz engendre parfois quelques travaux qui ont pu s'avérer néfaste pour des populations de plantes extrêmement rares. Etant donné la valeur biologique de cette savane, une attention toute particulière doit être portée à l'impact de chaque aménagement sur la zone.

Commentaires sur la délimitation

La ZNIEFF est délimitée comme suit:

N: La limite nord borde les savanes qui entourent l'ancien tracé de la RN1 (dite "route de l'Espace"), depuis le point A jusqu'au point F. Cette limite remonte vers les points B (bordure des forêts inondées de la crique Changement) puis vers la mangrove adulte (points C à D) pour redescendre vers le sud vers l'extrémité est de la savane (point E) et intersecte la route de l'Espace au point F.

S: La savane s'étend au sud de la route de l'Espace du point F au point A, jusqu'à la lisière des forêts de la plaine côtière ancienne au sud de la route. La limite recoupe la route de Paracou au point G.

Coordonnées des points mentionnés (WGS84, UTM 22 nord):

A (289055m; 589471m) - B (288397m; 590204m) - C (289553m; 591683m) - D (291160m; 590885m) - E (295971m; 586963m) - F (295354m; 586229m) - G (290643m; 588026m)