La ZNIEFF de la Roche Koutou et Savanes-Roches annexes (type I) est située à 80 kilomètres au sud de Maripasoula, entre les rivières Malani et Litani.
Il s'agit d'un massif forestier d'où émergent plusieurs savanes-roches, dont un magnifique piton rocheux qui domine de plusieurs centaines de mètres les vallées alentours. Cet inselberg culmine en effet à 560 mètres, altitude remarquable pour un inselberg en Guyane, et offre ainsi un paysage exceptionnel.
Ces reliefs résultent de l'affleurement de roches granitiques très anciennes (2,2 milliards d'années) formant le socle du Bouclier des Guyanes s'étendant du Venezuela à l'Amapa. Le relief actuel est le résultat de phases d'aplanissement et d'érosion physico-chimique engendrées par les phases climatiques sèches et humides et les variations du niveau des mers accompagnant les cycles glaciaires. Lors de ces dernières grandes périodes de refroidissement climatique, la diminution de la pluviométrie a déterminé une réduction très importante de l'étendue de la forêt au profit de grande zone de savanes qui réunissaient alors ces sommets. Cette extension des milieux ouverts de savanes (maximale vers - 18000 ans) a permis à certaines espèces d'étendre leur répartition, puis lors de la reconquête de l'espace par la forêt, celles-ci ont pu se maintenir dans certains sites ponctuels répondant jusqu'à ce jour à leurs exigences écologiques. L'ensemble de ces savanes-roches constitue donc de véritables systèmes insulaires, refuges d'espèces présentes sous la forme de populations isolées et relictuelles, témoignant de ces phases climatiques sèches anciennes. Les peuplements isolés les uns des autres par le massif forestier peuvent ainsi présenter des originalités propres à chaque inselberg ou groupe d'inselbergs ; différences pouvant s'observer même entre des sites proches.
En plus des milieux liés aux inselbergs, la zone regroupe divers écosystèmes forestiers allant de la forêt dense et haute de basse altitude jusqu'aux forêts marécageuses et ripicoles des vallées alluvionnaires. Il faut souligner ici qu'il s'agit d'une des rares régions de Guyane (avec le mont Saint Marcel et les massifs des Emérillons-monts Bakra et des Mitarakas) présentant un inselberg d'altitude supérieure à 500 mètres.
Les formations liées aux affleurements granitiques vont de la forêt basse de transition à la savane-roche proprement dite.
La forêt basse d'inselberg (voûte de 5 à 15 mètres de hauteur), se matérialise par une ceinture de quelques dizaines de mètres de large au pied des pentes granitiques dénudées, assurant la transition entre la savane-roche et la forêt haute de terre ferme. Le substratum qui affleure çà et là est recouvert par un sol peu épais, constitué par l’arène granitique et par l'accumulation des débris végétaux fixés par un chevelu racinaire dense et superficiel. Ce milieu, temporairement xérique, n'est guère favorable au développement de grands arbres. Au contraire, cette formation est constituée de petits arbres souvent ramifiés à la base (port buissonnant), tortueux et penchés, portant de nombreux épiphytes à faible hauteur en raison d'un éclairement relativement important. On y note également Cecropia granvilleana (Urticaceae), endémique de Guyane française et uniquement connu de cinq localités.
La savane-roche est une formation herbacée, basse et discontinue, laissant apparaître des plaques de roche nue, tapissée seulement d'algues bleues (Cyanobactéries) qui lui donnent sa couleur noire et jouent un rôle fondamental dans l'altération du granite et sa colonisation ultérieure par les végétaux. Comme la plupart des savanes-roches de Guyane, celles de la ZNIEFF présentent des faciès à Bromeliaceae. La physionomie est en effet ici marquée par les "coussins" denses de Pitcairnia geyskesii (espèce protégée). Les feuilles de cette Bromeliaceae forment des rosettes épineuses, et les rhizomes, rampant sur les rochers, sont protégés des prédateurs et de l'évaporation par d'épais manchons de feuilles sèches persistantes. À ces peuplements monospécifiques de Pitcairnia viennent se mêler d'autres plantes herbacées lorsque les conditions écologiques deviennent moins contraignantes (pentes moins fortes, accumulation de débris végétaux et constitution d'un sol au niveau des fissures et anfractuosités). On y trouve ainsi également Ichthyothere granvillei (Asteraceae), la Melastomataceae Ernestia confertiflora, l'orchidée protégée Cyrtopodium andersonii, aux grands pseudobulbes dressés et aux inflorescences jaunes. Toutes ces plantes montrent des adaptations remarquables à la sécheresse.
Au total, une vingtaine d'espèces végétales déterminantes y ont été recensées, dont de nombreuses sont directement liées aux savanes-roches telles Anemia villosa (Anemiaceae), Calea solidaginea subsp. deltophylla (Asteraceae), Begonia heloisana (Begoniaceae), Evolvulus filipes (Convolvulaceae), Clidemia attenuata (Melastomataceae), Turnera subulata (Passifloraceae).
Anemopaegma robustum (Bignoniaceae) et Oxalis juruensis (Oxalidaceae) ne sont, à ce jour, connus de Guyane française que d'une seule collecte sur la Roche Koutou.
La faune de cette zone reste méconnue en dehors d'un premier inventaire herpétologique ayant révélé la présence notamment de deux espèces de grenouilles peu communes, Allophryne ruthveni et Leptodactylus bolivianus.
Cette région d'inselbergs a la particularité de présenter une fragmentation de populations d'espèces végétales et animales en autant de peuplements de type insulaire, dans une matrice générale de forêt tropicale humide. Cette particularité présente un intérêt scientifique très important. La région constitue en effet un véritable laboratoire pour comprendre l'histoire des forêts en offrant l'opportunité d'aborder plusieurs questions fondamentales concernant l'évolution des espèces et des milieux.
Cet espace naturel remarquable bénéficie désormais de la protection du Parc Amazonien de Guyane.
La ZNIEFF est délimitée de la manière suivante :
N : Au Nord, la limite suit un affluent de la rivière Malani, situé immédiatement au nord de la Roche Koutou, depuis sa source (point A) jusqu’au point B, puis poursuit en ligne droite jusqu’au point C, situé de nouveau sur un affluent de la rivière Malani et enfin suit cet affluent jusqu’à sa source (point D).
E : A l'Est, la limite rejoint en ligne droite le point E, source d’un affluent de la rivière Malani, et le suit jusqu'au point F de confluence avec un autre affluent, situé au sud de la roche Koutou.
S : La limite sud suit ensuite cet affluent jusqu’à sa source (point G).
W : A l'Ouest, la ZNIEFF continue en ligne droite jusqu’au point H, source d’un affluent de la rivière Alitani, puis suit cet affluent jusqu’à son point de confluence avec un deuxième affluent que la limite suit alors jusqu’à sa source (point I). La limite ouest rejoint ensuite en ligne droite le point A.
Coordonnées des points mentionnés (WGS84, UTM 22 nord):
A (154971m; 323388m) - B (159283m; 324900m) - C (160504m; 324891m) - D (161171m; 324891m) - E (161454m; 323692m) - F (161864m; 321732m) - G (156779m; 321297m) - H (155917m; 321626m) - I (154777m; 322847m)