La ZNIEFF de type II de la plaine alluviale et du cours de l'Aisne depuis Autry jusqu'à Avaux, d'une superficie de près de 12 000 hectares, correspond à la fusion des ZNIEFF 210000982, 210000745 et 210000746. Cette fusion a été réalisée afin de respecter l'identité géomorphologique du territoire représenté par la vallée de l'Aisne. Elle comporte, outre la rivière et les ruisseaux, un système complexe de noues et de bras morts d'origine naturelle ou lié à la création du canal des Ardennes. Ces eaux eutrophes portent une végétation caractéristique riche en espèces patrimoniales et sont colonisées en bordure par des peuplements amphibies, auxquels succèdent des roselières, mégaphorbiaies et magnocariçaies. Les prairies de fauche, avec les prairies pacagées hygrophiles, sont bien représentées au niveau du lit majeur de l'Aisne. Les formations ripicoles, souvent menacées par la populiculture, se rencontrent çà et là le long de la rivière et des cours d'eau. Cependant les cultures gagnent du terrain et représentent actuellement 20% de la superficie du territoire de la vallée.
La végétation aquatique est représentée par des communautés à hépatiques (avec Ricciocarpus natans, assez rare en Champagne-Ardenne) et lentilles d'eau (petite lentille d'eau, lentille à trois lobes, lentille minuscule, lentille à plusieurs racines), des colonies d'utriculaire, des groupements du Nymphaeion (à nénuphar jaune, petit nénuphar, cératophylle épineux, myriophylle verticillé...) et du Potamion (avec le potamot à feuilles pectinées, le potamot à feuilles luisantes, le potamot à feuilles crépues, le potamot à feuilles perfoliées, l'élodée du Canada, l'élodée à feuilles étroites, le myriophylle en épis, la renoncule à feuilles capillaires, etc.) et ponctuellement des communautés flottantes à callitriches. On peut y observer deux espèces protégées au niveau régional, le rubanier nain et l'aloès d'eau (présent uniquement, pour la Champagne-Ardenne, dans quelques stations de la vallée de l'Aisne). Ils figurent, de même que l'utriculaire vulgaire, le potamot à feuilles flottantes et le potamot des Alpes, sur la liste rouge régionale des végétaux.
Le long des fossés et des noues (anciens méandres de l'Aisne), au bord de certaines mares et au niveau des vases et graviers exondés de la rivière se rencontrent des groupements amphibies. Ils recèlent quatre espèces rares inscrites sur la liste rouge régionale : le faux riz, le scirpe épingle, la berle à larges feuilles et le catabrose aquatique. Ils sont accompagnés par le bident tripartit, le bident radié, la menthe pouliot (rare dans les Ardennes), le cresson des champs, la renoncule scélérate, le jonc fleuri, l'œnanthe aquatique, la sagittaire flèche d'eau...
Localement se développent dans la rivière des végétations plus ou moins immergées à renoncule flottante, renoncule à feuilles capillaires, menthe aquatique, potamot à feuilles flottantes...
La gamme des groupements prairiaux est très étendue en fonction de la nature du sol, de l'inondation ou du traitement (fauche, pâture ou traitement mixte) : les prairies de fauche relèvent de l'Arrhenatherion elatioris (dans les zones peu ou pas inondées) ou du Bromion racemosi (dans les secteurs plus humides). Elles sont riches en graminées (les plus communes étant la houlque laineuse, le pâturin des prés, le pâturin trivial, la fléole des prés, l'avoine élevée, l'orge faux-seigle, la fétuque des prés) et en légumineuses (lotier corniculé, trèfle rampant, trèfle des prés, gesse des prés, vesce à épis, etc.). On y rencontre également le narcisse des poètes (protégé en Champagne-Ardenne, non revu récemment) et l'orchis grenouille (inscrits tous les deux sur la liste rouge régionale), la potentille rampante, le plantain lancéolé, la cardamine des prés, le salsifis des prés, l'oseille sauvage, la renoncule rampante... Dans les zones plus humides, les prairies sont souvent alternativement fauchées et pâturées : la flore est riche en espèces hygrophiles telles que le brome en grappes, le silaüs des prés, la gratiole officinale (protégée sur tout le territoire français), la germandrée des marais (protégée au niveau régional) l'œnanthe à feuilles de silaüs (protégé en Champagne-Ardenne et inscrit sur la liste rouge régionale), la stellaire des marais (inscrite sur la liste rouge régionale), le jonc diffus, le séneçon aquatique, l'achillée sternutatoire, la menthe pouliot (rare dans les Ardennes), la laîche hérissée, l'œnanthe fistuleuse, le léontodon d'automne, le colchique, la laîche des renards, etc.
Sur le finage d'Amagne (Fond Grujin) se rencontre une variante oligotrophe de la prairie humide : cette prairie pacagée montre de petites dépressions humides avec l'ophioglosse (fougère inscrite sur la liste rouge régionale), la primevère officinale, la laîche glauque, la bugrane épineuse, l'œnanthe fistuleuse, la listère ovale, le gaillet vrai, la laîche des renards, le brome en grappes, la fétuque roseau...
Localement, sur la commune de Seuil (entre les Sarts et les Sartis), la prairie calcicole fauchée présente une variante relevant du Mésobromion (à brome dressé, petite sanguisorbe, sauge des prés, chardon roulant, bugrane rampante, brunelle vulgaire, gaillet boréal, renoncule bulbeuse, luzerne lupuline, léontodon changeant, ail des vignes, etc.).
Certaines prairies sont aujourd'hui fertilisées et/ou pâturées par les bovins : les graminées sont alors dominées par la crételle, la houlque laineuse, la trisète dorée, le ray-grass d'Italie et l'ivraie vivace. Elles sont accompagnées par le trèfle rampant, le trèfle fraise, la renoncule rampante, la potentille des oies, la menthe pouliot, le plantain à larges feuilles, la patience crépue, le cirse des champs, la menthe aquatique, la pâquerette, etc.
Les milieux marécageux sont plus localisés et constitués surtout par des roselières (phalaridaies, phragmitaies, typhaies et glycériaies à germandrée des marais, protégée au niveau régional, rubanier rameux, gaillet des marais, scirpe maritime, épiaire des marais, renouée amphibie, prêle des eaux, œnanthe aquatique...), ainsi que par des mégaphorbiaies (à laiteron des marais, protégé en Champagne-Ardenne et inscrit sur la liste rouge régionale, véronique à longues feuilles, inscrite sur la liste rouge régionale et située à sa limite d'aire de répartition absolue, reine des prés, lysimaque vulgaire, salicaire, pigamon jaune, épiaire des marais, guimauve officinale, lycope d'Europe, liseron des haies, etc.), des cariçaies à grandes laîches (laîche distique, laîche aiguë, laîche des rives, laîche vésiculeuse, laîche des renards, laîche faux-souchet...) et des cariçaies à petites laîches (laîche en ampoules).
Les boisements sont peu abondants (7%) et constitués par l'ormaie-frênaie riveraine à orme lisse (inscrit sur la liste rouge régionale), qui peut localement s'étoffer et donner une aulnaie-peupleraie à grandes herbes (angélique sylvestre, reine des prés, iris faux-acore, gaillet des marais, lysimaque nummulaire, bardane des bois, grande consoude, etc.).
Par rapport aux inventaires des ZNIEFF initiales, on peut déplorer la disparition de l'œnanthe à feuilles de peucédan, du ményanthe trèfle d'eau, de l'inule des fleuves, de l'inule grande aunée, du souchet brun, du faux nénuphar, de la patience parelle et du scirpe à tiges trigones.
Les libellules sont bien représentées, avec 37 espèces répertoriées dont onze sont rares et inscrites sur la liste rouge des Odonates de Champagne-Ardenne : le gomphe vulgaire, le gomphe similaire (situé à sa limite nord de répartition), le gomphe à pinces, l'agrion gracieux, l'agrion nain, le leste sauvage, la libellule fauve, la cordulie métallique, l'aeshne isocèle, l'aeshne printanière et la grande aeshne. Ils sont accompagnés par des espèces plus communes, comme par exemple la libellule déprimée, la libellule à quatre taches, la cordulie bronzée, l'orthétrum réticulé, le sympétrum rouge sang, le sympétrum strié, l'anax empereur, l'aeshne bleue pour les libellules, l'agrion élégant, l'agrion à larges pattes, l'agrion jouvencelle, l'agrion aux longs cercoïdes, l'agrion au corps de feu, l'agrion porte-coupe, la naïade aux yeux rouges, la naïade au corps vert, le caloptéryx éclatant, le leste vert, le leste verdoyant, le leste fiancé pour les demoiselles. Certains papillons s'y rencontrent également, comme par exemple le machaon, l'azuré commun, la piéride du navet, la petite tortue, le Robert-le-diable, le fadet commun et le cuivré de la verge d'or, ce dernier étant inscrit sur la liste rouge régionale des Lépidoptères. La présence d'une éphémère rare en France (Heptagenia fuscogrisea) a été signalée sur le site.
La rivière abrite la truite et le chabot inscrit sur l'annexe II de la directive Habitats.
Le pélodyte ponctué est également bien représenté : totalement protégé en France depuis 1993, ce petit crapaud est également inscrit à l'annexe III de la convention de Berne, dans le livre rouge de la faune menacée en France (catégorie "vulnérable") et sur la liste rouge régionale. On peut aussi y rencontrer le triton alpestre, la grenouille rousse, la grenouille verte...
Les prairies de l'Aisne font partie des plus beaux sites ornithologiques français et sont considérées comme un site d'importance internationale pour la migration des oiseaux d'eau. De nombreuses espèces y stationnent au printemps (et en automne) en exploitant les zones inondées. Des barges à queue noire, avocettes élégantes, échasses blanches, grandes aigrettes, plusieurs centaines de canards (souchet, pilet, siffleur, chipeau, colvert, sarcelle d'hiver, fuligule milouin, fuligule morillon), des chevaliers (combattant, gambette, aboyeur, sylvain, culblanc), des bécasseaux (cocorli, variable et minute), des pluviers (dorés et argentés) profitent, lors de leur remontée au nord de l'Europe, des grandes surfaces de prairies inondées que leur offre la plaine alluviale de l'Aisne. Le balbuzard pêcheur vient pêcher dans la rivière aux périodes de migration ; de nombreuses grues cendrées (plus d'une cinquantaine en 1994) hivernent sur le site (notamment vers Terron-sur-Aisne), ainsi que des oies cendrées, des canards siffleurs, des sarcelles d'hiver, des garrots à oeil d'or, des harles bièvre, des pluviers dorés, des grands cormorans, des fuligules... Au total ce sont plus de 120 espèces qui utilisent la vallée comme voie migratrice et site d'hivernage, une vingtaine d'entre elles étant inscrite à l'annexe I de la directive Oiseaux.
En période de nidification, la vallée constitue une richesse originale exceptionnelle : elle abrite les populations nicheuses de près d'une vingtaine d'espèces rares à très rares en Champagne-Ardenne, notamment le courlis cendré dont la population, forte d'une cinquantaine de couples (la seule de toute la Champagne-Ardenne), s'inscrit parmi des dix premières sur le plan national. La présence des prairies humides encore préservées sur la vallée permet d'accueillir le râle des genêts, avec des effectifs fluctuant d'une année sur l'autre : la vallée de l'Aisne héberge pratiquement la seule population digne de ce nom dans la région (seuls quelques couples persistent encore dans la Bassée et la Voire). Protégé en France, le râle des genêts est inscrit à l'annexe II de la convention de Ramsar (en tant qu'espèce menacée à l'échelle mondiale), à l'annexe I de la directive Oiseaux, à l'annexe II de la convention de Berne, sur la liste rouge des espèces d'oiseaux menacés au niveau international et dans le livre rouge de la faune menacée en France (dans la catégorie "vulnérable"). Les nichées du râle des genêts, du courlis cendré et de la marouette ponctuée (ces deux derniers dans une moindre mesure) sont régulièrement détruites lors des fauches précoces, mais certaines prairies ont bénéficié en 1995 de la mise en place des OGAF Environnement. L'écosystème prairial est aussi déterminant pour le maintien du tarier des prés, dont c'est une des plus importantes stations de la région. Il abrite de même les trois pies-grièches de la région : la très rare pie-grièche à tête rousse, la pie-grièche grise et la pie-grièche écorcheur. Les autres espèces nicheuses de la liste rouge régionale sont la marouette ponctuée, le traquet tarier, le vanneau huppé, le rougequeue à front blanc et le pipit farlouse (dans les milieux herbacés et prairiaux), le petit gravelot et l'hirondelle des rivages (rives du cours d'eau et des noues), le phragmite des joncs et la rousserolle verderolle (milieux marécageux) et le faucon hobereau qui fréquente les grandes vallées herbagères.
Les bassins de décantation de la sucrerie de Saint-Germainmont sont un haut lieu de stationnement des oiseaux migrateurs, principalement en fin d'hiver et en début de printemps. C'est, maintenant que les bassins de la sucrerie d'Attigny ont été détruits, le seul site régulier de reproduction du gorge bleue à miroir dans toute la Champagne-Ardenne, ainsi qu'un site important pour le tadorne de Belon.
C'est enfin un des sites régionaux les plus favorables pour le retour de la cigogne blanche qui y a niché récemment et pour le maintien de la cigogne noire, qui vient se nourrir dans la ZNIEFF .
On peut y observer aussi des bergeronnettes (grise et printanière), le tarier pâtre, la locustelle tachetée, l'accenteur mouchet, la grive litorne, des espèces plus forestières (pipit des arbres, troglodyte mignon, sittelle torchepot, grive musicienne, geai des chênes, loriot d'Europe, fauvettes diverses), la rousserolle effarvatte et le bruant des roseaux qui nichent dans les roselières... La zone est régulièrement survolée par les rapaces qui y chassent et qui y ont installé leur nid (buse, milan noir, épervier d'Europe, hibou moyen-duc).
Le site est également fréquenté par de nombreux mammifères (chevreuil, sanglier, chat sauvage, hermine...).
La ZNIEFF de la vallée de l'Aisne s'inscrit dans un contexte patrimonial important : elle fait partie de la ZICO CA 08 (vallée de l'Aisne) et a été proposée dans le cadre de la directive Habitats pour Natura 2000 (site n° 53 : prairies de la vallée de l'Aisne). Elle présente encore un bon état général, avec une bonne potentialité biologique, mais les prairies sont menacées par le drainage, la mise en culture progressive, la conversion en pâturage (pour les prairies de fauche) ou une intensification du pâturage (pour les prairies déjà pacagées). La populiculture est en extension (prairies et boisements alluviaux). Les rives de l'Aisne subissent une forte pression humaine (pêcheurs), certains secteurs se trouvant, par suite des passages fréquents et successifs, dénués de toute végétation.
Les limites de la ZNIEFF correspondent aux limites des habitats de la vallée de l'Aisne de Autry à Avaux.