ZNIEFF 220013568
VALLEE DE LA MUZE

(n° regional: 02TAR103)

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DESCRIPTION

La Muze et ses tributaires ont découpé la dalle structurale du Lutétien pour former des digitations complexes dans le plateau agricole du Soissonnais. Le site occupe les versants et le fond de la vallée.

Les parties hautes du site, plateau et haut de versant, reposent sur les calcaires du Lutétien. Le bas des pentes est constitué de sables cuisiens, plus ou moins colluvionnés d’éléments des couches supérieures. Le fond de la vallée repose sur de la tourbe dans ses parties amont, puis sur des alluvions modernes tourbeuses et, enfin, sur des alluvions non tourbeuses à partir de Lhuys.

Les versants en exposition sud sont occupés par des pâtures à bovins (parfois abandonnées), sur une superficie importante dont les cortèges végétaux s’apparentent de très près aux pelouses calcicoles. On identifie divers types :

- pelouses de l’Alysso alyssoidis-Sedion albi, sur les écorchures et les dalles rocheuses ;

- pelouses du Koelerio macranthae-Phleion phleioidis, sur les sols calcaro-sableux squelettiques ;

- pelouses du Mesobromion sur les sols plus évolués.

Des pelouses secondaires intéressantes se retrouvent au niveau des talus de routes et de chemin de fer.

A la périphérie des pelouses, se trouvent différentes ceintures comprenant :

- la pelouse-ourlet (à rattacher encore au Mesobromion dans bien des cas) ;

- les ourlets thermophiles du Geranion sanguinei ;

- les ourlets forestiers mésophiles du Trifolion medii ;

- les fourrés thermophiles de recolonisation forestière du Berberidion.

Une grande partie des versants est couverte par des boisements jeunes et souvent peu structurés, mais qui sont tous à rapprocher du Carpinion avec des variantes thermophiles à Iris fétide (Iris foetidissima) ou, plus fraîches, en pente nord.

Le fond de vallée est presque intégralement voué à la culture du peuplier. Pourtant, dans quelques zones, persistent les traces de ce qui devait former le paysage de cette vallée il y a quelques dizaines d’années :

- les pâtures (Cynosurion et Mentho-Juncion dans les parties humides), qui constituent un noyau entre Lhuys et Bruys ;

- les roselières, présentes à l’aval de Branges, aujourd’hui très sèches et en cours de boisement ;

- les cladiaies turficoles, relictuelles sur le site ;

- les prairies tourbeuses oligotrophes et les bas-marais alcalins (Molinion et Hydrocotylo-Schœnion), qui ne sont plus représentés que par des lambeaux, confinés aux layons de chasse dans les marais ;

- les aulnaies riveraines (Alnion et Alno-Padion très localement).

Des étangs ont été ouverts près du « Moulin de Loupeigne ». Creusés dans la tourbe, ils ont permis le développement de végétations originales :

- herbiers à Charophytes (Charetea fragilis), dans les vasques tourbeuses peu profondes ;

- herbiers flottants du Nymphaeion albae et de l’Hydrocharition morsus-ranae ;

- herbiers aquatiques du Potamion pectinati ;

- végétation des rives exondées tourbeuses jeunes.

Des cultures et des villages complètent cette zone, marquée également par le passage d’une voie ferrée.

INTERET DES MILIEUX

Bas-marais alcalin de l’Hydrocotylo-Schœnion, représenté ici par un groupement, unique en Picardie, présentant de fortes affinités avec le Caricion davallianae, alliance montagnarde à planitiaire-continentale des sols tourbeux.

- Pelouses pionnières riches en thérophytes de l’Alysso-Sedion, très rares en Picardie ;

- Pelouses calcaro-sableuses du Koelerio-Phleion, en grande régression et présentant des affinités steppiques et continentales remarquables ;

- Divers groupements du Mesobromion :

. pelouses du Chamaecytiso supini-Prunelletum grandiflorae, unité thermocontinentale limitée à la bordure nord-est du Tertiaire parisien, exceptionnelle en Picardie ;

. pelouses mésoxérophiles du Festuco lemanii-Anthyllidetum vulnerariae, association inféodée au Tertiaire parisien en Picardie ;

. pelouse-ourlet du Coronillo-Brachypodietum, accueillant de nombreuses espèces d’orchidées et de papillons.

- Herbier aquatique du Myriophyllo-Nupharetum luteae, en régression en Picardie ;

- Cladiaies turficoles relictuelles ;

- Layons tourbeux des roselières (du Molinion), habitats d’espèces protégées ;

- Ruisselets de tête de bassin favorables aux invertébrés aquatiques ;

- Roselières encore peu boisées, favorables à l’avifaune ;

- Marges des cultures et jachères très diversifiées et riches en messicoles rares.

Les pelouses calcaires sont inscrites à la directive "Habitats" de l’Union Européenne.

La vallée de la Muze présente des caractéristiques exceptionnelles en terme de biogéographie (fortes influences subcontinentales) et de conservation des milieux.

INTERET DES ESPECES

Sur les pelouses :

- l’Ophrys araignée (Ophrys sphegodes ssp. sphegodes*), en voie de disparition en Picardie ;

- la Germandrée des montagnes (Teucrium montanum*), rare en dehors du Tertiaire parisien ;

- le Silène à oreillettes (Silene otites), élément steppique des pelouses sableuses ;

- l’Orobanche améthyste (Orobanche amethystea), exceptionnelle en Picardie ;

- l’Alysson calicinal (Alyssum alyssoides), présent sur les écorchures et les dalles rocheuses ;

- le Lézard des souches (Lacerta agilis), présent ici en densité remarquable ;

- la Mante religieuse (Mantis religiosa), élément méridional cantonné au sud de la Picardie ;

- l’Azuré des coronilles (Plebejus argyronomon), de plus en plus rare en Picardie ;

- la Decticelle chagrinée (Platycleis albopunctata), en grande régression dans le nord de la France ;

- la Pie-grièche écorcheur (Lanius collurio), inscrite à la directive "Oiseaux", qui fréquente aussi les haies des prairies.

Dans les marais et les étangs :

- le Dactylorhize négligé (Dactylorhiza praetermissa*), en danger en Picardie ;

- le Mouron délicat (Anagalis tenella*), présent sur les rives exondables ;

- la Gentiane pneumonanthe (Gentiana pneumonanthe*), menacée en Picardie ;

- le Ményanthe trèfle-d’eau (Menyanthes trifoliata*), en danger de disparition ;

- la Parnassie des marais (Parnassia palustris*), rarissime dans les zones humides continentales ;

- la Grassette commune (Pinguicula vulgaris*), dont c’est ici la plus importante station du nord de la France ;

- le Séneçon à feuilles spatulées (Senecio helenitis*), exceptionnel en Picardie ;

- l’Utriculaire vulgaire (Utricularia vulgaris*), en danger de disparition en Picardie ;

- la Laîche de Davall (Carex davalliana), élément montagnard qui se trouve ici dans son unique station de Picardie ;

- l’Orthetrum brun (Orthetrum brunneum), très rare en Picardie ;

- le Cordulegastre annelé (Cordulegaster boltonii), dont les larves se développent dans les ruisselets ;

- l’Agrion délicat (Ceriagrion tenellum), qui affectionne les étangs tourbeux ;

- le Busard des roseaux (Circus aeruginosus), inscrit à la directive "Oiseaux".

Dans les bois :

- la Prêle d’hiver (Equisetum hyemale*), présente dans les sous-bois des frênaies alluviales ;

- l’Iris fétide (Iris foetidissima), espèce méditerranéo-atlantique rare ;

- le Pic noir (Dryocopus martius), inscrit à la directive "Oiseaux".

FACTEURS INFLUENCANT L’EVOLUTION DE LA ZONE

- Abandon des pratiques pastorales sur les prairies humides et les marais, qui conduit à un embroussaillement rapide et à une régression des espèces liées à ces milieux.

- Plantation massive de peupliers, souvent accompagnée d’un drainage des stations, détruisant les sols en place, par minéralisation de la tourbe, et modifiant donc la flore originelle.

- Maintien d’un pâturage bovin peu intensif sur les prairies des versants, permettant la conservation de types pelousaires remarquables.

- Substrat géologique très aride sur les versants, limitant l’évolution des pelouses abandonnées.

- Création de plans d’eau, dans les zones tourbeuses, permettant un rajeunissement des milieux, mais entraînant également une eutrophisation des eaux liée à l’élevage du poisson.

- Entretien des layons de chasse dans les marais, permettant la survie d'espèces et de milieux gravement menacés et palliant ponctuellement l’abandon des pratiques de fauche dans les marais.

- Brûlage intempestif des roselières et autres végétations de marais, accélérant l’atterrissement et l’eutrophisation des marais.

- Migration de fertilisants et de biocides depuis les cultures du plateau vers les pelouses et les pâtures, nuisible à la flore et à la faune.

N.B. : Les espèces végétales dont le nom latin est suivi d'un astérisque sont légalement protégées.

Comments on the delimitation

Les contours du site reprennent pour l'essentiel les limites entre la vallée et le plateau agricole, soit la convexité sommitale des versants. A l'aval, la vallée s'ouvre et change de nature et d'occupation des sols à partir de Mont-Notre-Dame.