ZNIEFF 220220007
PRAIRIES, LANDES ET BOIS HUMIDES DU BAS-BRAY DE SAINT-GERMER DE FLY A LACHAPELLE-AUX-POTS

(n° regional: 60PDB102)

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DESCRIPTION

La zone du Bas-Bray se singularise par l'importance des milieux acides et humides, exploités par la sylviculture et par l'élevage. Les affleurements importants d'argiles kimméridgiennes et de sables wealdiens, au sein de la boutonnière (anticlinal évidé) du Bray, permettent en effet la présence de sols acides souvent imperméables. Cette acidité est renforcée par les conditions climatiques atlantiques : précipitations élevées, nombreux jours de pluie et douceur des températures. L'origine même du mot "bray" (qui signifie "boue" en celte) exprime ces caractéristiques d'humidité.

Il en résulte la présence de milieux très précieux, voire uniques en Picardie, ultimes "irradiations" d'une influence atlantique bien marquée :

- landes à Bruyère à quatre angles (Erica tetralix) et Ajonc nain (Ulex minor) ;

- prairies oligotrophes sur sables humides à Carum verticillé (Carum verticillatum) ;

- prairies paratourbeuses acides du Juncion acutiflori.

Des pelouses sableuses à Gaillet de Harz (Galio saxatile-Festucetum filiformis) et à Nard raide (Nardus stricta) ; des pelouses à Jonc squarreux (Juncion squarrosi) ; des cariçaies (Caricion ripario-acutiformis, Caricenion rostratae) ; des prairies de fauche mésophiles (Arrhenaterion) et hygrophiles (Bromion racemosi) renforcent la mosaïque d'habitats.

Les boisements sont essentiellement des taillis sous futaie de Chênes sessiles, et comprennent de nombreux bouleaux (Querco-Betuletum). Les sous-bois sont souvent occupés par des étendues de Molinies, de Callunes ou de Fougères-aigle. Si de grands ensembles ont été plantés de Pins sylvestres ou d'Epicéas, il subsiste, dans les dépressions les plus humides, de vastes aulnaies à sphaignes et à fougères (Blechno-Alnetum), ou des saulaies.

Les activités d'élevage ont façonné les paysages remarquables du Bray humide. Ces milieux sont en effet issus du travail des hommes, notamment des moines de l'abbaye de Saint-Germer, qui ont défriché ou fait défricher ces espaces, aux XIIème et XIIIème siècles. Ils les ont ensuite asséchés et plantés de haies. Le bocage, largement anthropique, constitue un bel exemple d'adaptation aux contraintes du milieu. Il est encore assez bien conservé dans les secteurs périphériques aux forêts acides.

INTERET DES MILIEUX

Les landes humides à Bruyère à quatre angles (Erica tetralix) et à Ajonc nain (Ulex minor) (alliance de l'Ulicion minoris, association de l'Ulici minoris-Ericetum tetralicis) ; les prairies oligotrophes sèches (Nardo-Galion) ou humides (Juncion squarrosi) ; les boisements acides (Quercion robori-petraeae, dont le Querco-Betuletum pubescentis molinietosum) ; les mares et les aulnaies tourbeuses acides (Alno-Ulmion, dont le Blechno-Alnetum et le Carici elongatae-Alnetum) et les prairies de fauche (Arrhenaterion elatioris) sont des milieux rares et menacés en Europe. Ils sont, de ce fait, inscrits à la directive "Habitats" de l'Union Européenne.

Ils abritent de nombreuses espèces végétales et animales rares et menacées.

Les abords de l'Avelon ou des ruisseaux comme celui de Goulancourt comportent également des milieux intéressants, refuges pour des espèces rares. La structure bocagère est notamment favorable à l'avifaune.

Globalement, cette juxtaposition de milieux, présentant divers degrés d'acidité et d'humidité, utilisés soit à des fins sylvicoles, soit à des fins d'élevage, permet l'expression d'une biodiversité exceptionnelle et unique en Picardie.

INTERET DES ESPECES

Flore :

De nombreuses espèces assez rares à exceptionnelles sont présentes dans cet ensemble, dont les suivantes :

- la Bruyère à quatre angles (Erica tetralix*),

- la Linaigrette à feuilles étroites (Eriophorum polystachion*),

- le Gaillet de Harz (Galium saxatile*),

- le Jonc squarreux (Juncus squarrosus*),

- l'Ajonc nain (Ulex minor*),

- le Nard raide (Nardus stricta*),

- la Véronique en écus (Veronica scutellata*),

- le Carum verticillé (Carum verticillatum).

Ce dernier est exceptionnel et ses stations brayonnes atteignent en Picardie leur limite d'aire absolue vers l’est.

Une nouvelle espèce pour la Picardie a été récemment découverte dans des prairies humides, l'Eufragie visqueuse (Parentucellia viscosa).

La Pédiculaire des bois (Pedicularis sylvatica), la Scutellaire naine (Scutellaria minor), le Dactylorhize à larges feuilles (Dactylorhiza maculata subsp. ericetorum), le Blechnum en épis (Blechnum spicant), la Scorzonère humble (Scorzonera humilis), l'Epilobe des marais (Epilobium palustre), les Laîches noire (Carex nigra) et à rostre (Carex rostrata), l'Oenanthe à feuilles de Silaus (Oenanthe silaifolia) ou le Jonc bulbeux (Juncus bulbosus subsp. bulbosus) ..., sont des espèces rares ou très rares en Picardie et dans le nord de la France.

Une vingtaine d'autres espèces assez rares en Picardie ont également été recensées. Citons, entre autres, la Saxifrage granulée (Saxifraga granulata), l'Ecuelle d'eau (Hydrocotyle vulgaris), la Digitale pourpre (Digitalis purpurea), la Myrtille (Vaccinum myrtillus), le Polygale à feuilles de Serpolet (Polygala serpyllifolia), la Prêle des Bourbiers (Equisetum fluviatile), la Laîche déprimée (Carex demissa), la Laîche des Lièvres (Carex ovalis), l'Aigremoine odorante (Agrimonia repens)...

Parmi les bryophytes, plusieurs espèces de Sphaignes, assez rares à exceptionnelles, sont à mentionner : Sphagnum compactum, Sphagnum fimbriatum, Sphagnum palustre, Sphagnum angustifolium, Sphagnum denticulatum, Sphagnum subnitens, et Sphagnum papillosum.

Faune :

Parmi les oiseaux remarquables figurent deux espèces inscrites en annexe I de la directive "Oiseaux" de l'Union Européenne : la Bondrée apivore (Pernis apivorus) et le Râle des Genêts (Crex crex). Ce dernier, particulièrement menacé, est également considéré comme l'une des espèces les plus menacées du monde.

Plusieurs autres espèces sont également remarquables : le Rougequeue à front blanc (Phoenicurus phoenicurus), le Vanneau huppé (Vanellus vanellus) et la Bécasse des bois (Scolopax rusticola). Tous trois sont considérés comme des nicheurs vulnérables en Picardie.

Le Faucon hobereau (Falco subbuteo) et le Tarier pâtre (Saxicola torquata) font partie des espèces dont le statut est à surveiller en Picardie.

Les batraciens sont également bien représentés :

- la Grenouille agile : assez rare en Picardie, en limite d’aire septentrionale et inscrite en annexe IV de la directive "Habitats" ;

- le Triton crêté (annexe II de la directive "Habitats" de l’Union Européenne) est présent dans les mares, de même que la Rainette verte (annexe IV de la directive) ;

- le Triton alpestre (Triturus alpestris), vulnérable en France (livre rouge de la faune menacée en France).

La Vipère péliade, rare en Picardie, de statut " indéterminé " dans le livre rouge de la faune menacée en France, vit dans les landes à Ericacées, les moliniaies, les lisières des bois...

Trois espèces d’odonates remarquables ont pu être identifiées ;

- le Caloptéryx vierge (Calopteryx virgo), assez rare en Picardie ;

- le Cordulégastre annelé (Cordulegaster boltonii), inscrit sur la liste rouge nationale des odonates, rare en Picardie ;

- l’Orthétrum brun (Orthetrum brunneum), très rare en Picardie.

La présence du Damier de la Succise (Euphydryas aurinia), lépidoptère légalement protégé en France et inscrit en annexe II de la directive "Habitats", est particulièrement remarquable.

FACTEURS INFLUENCANT L'EVOLUTION DE LA ZONE

Les difficultés de l'élevage entraînent des évolutions de l'occupation du sol : des terres trop humides sont boisées ou converties en étangs de loisirs. Inversement, des prairies peuvent être retournées ou intensifiées.

Une agriculture adaptée aux particularités du Bray humide permet de conserver, et de faire vivre, des paysages et des milieux de très grand intérêt patrimonial. Cet intérêt, à la fois biologique et paysager, est complémentaire de la qualité architecturale et du patrimoine historique du secteur de Saint-Germer-de-Fly, de plus en plus valorisé sur le plan touristique.

N.B. Les espèces végétales dont le nom est suivi d'un astérisque sont légalement protégées.

Comments on the delimitation

La zone englobe les parties les plus humides qui sont les plus riches en habitats, flore et faune rares et menacés. Les versants plus mésophiles situés au nord sont également intéressants en dehors des quelques zones cultivées, mais possèdent une moindre concentration d'espèces et d'habitats remarquables. Ils sont cependant inclus dans la zone de type II "Pays de Bray". La zone plus urbanisée le long de la RN 31 est également évitée.