ZNIEFF 230000837
LES MARAIS D'AIZIER ET DE VIEUX-PORT

(n° regional: 85150000)

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A l’aval de la boucle de Brotonne s’étendent les marais d’Aizier et de Vieux-Port, à la limite de l’Eure et de la Seine-Maritime. Ils sont implantés entre la Seine et les pentes raides du rebord du massif forestier de Brotonne, sur des terrains alluviaux récents.

Cette zone endiguée et localement exhaussée par d’anciens dépôts de curage de la Seine (à l’amont d’Aizier) ne reçoit plus guère les crues du fleuve, sauf dans sa partie aval à l’occasion des crues exceptionnelles. Des sources issues de la nappe de la craie sourdent au pied des falaises mortes. Elles alimentent en eau alcaline le marais et plusieurs rus aux eaux très claires. A l’aval immédiat d’Aizier, certains secteurs déprimés restent ainsi inondés tout au long du printemps. Cette permanence de l’eau permet la présence d’habitats, d’une flore et d’une faune remarquables.

En bordure du fleuve, au pied des digues enrochées, l’alluvionnement naturel renouvelle les sols avec des apports de sables, limons, argiles, etc. , sur lesquels se développe une végétation pionnière. Cependant, cette végétation des vasières est essentiellement nitrophile, du fait des fortes teneurs en nitrates des alluvions de la Seine. Sur les anciennes chambres de dépôts, des sols sableux génèrent de petites dunes, aujourd’hui fixées par des fourrés de Saules.

Les marais sont principalement occupés par des boisements alluviaux eutrophes mésohygrophiles à hygrophiles (essentiellement du Salicion albae et ponctuellement de l’Alno-Padion), dominés par les Saules blancs (Salix alba), les Peupliers grisards (Populus canescens), les Frênes (Fraxinus excelsior), les Aulnes (Alnus glutinosa), etc. Les fourrés arbustifs à Saule des vanniers (Salix viminalis), Saule roux (Salix atrocinerea) et Saule cendrés (Salix cinerea) y sont également étendus, en mosaïque avec les peuplements arborés. Les mégaphorbiaies eutrophes du Calystegion sepium et les roselières du Phragmition communi occupent localement des surfaces relativement importantes. Les bords des sources et des rus sont parfois envahis par le Cresson de fontaine (Nasturtium officinale).

Quelques banquettes humides au bord des rus accueillent des tapis de Dorine à feuilles opposées (Chrysosplenium oppositifolium).

Plusieurs espèces végétales exceptionnelles à rares en Normandie orientale ont été observées :

-le Scirpe triquètre (Scirpus triqueter), plante très rare et légalement protégée en Normandie orientale, est caractéristique des vases légèrement halophiles de fond d’estuaire,

-la Pyrole à feuilles rondes (Pyrola rotundifolia var. arenaria) plante rare et légalement protégée en France, se développe sur les sols sableux des petites dunes,

-l’exceptionnel Saule rampant (Salix repens subsp. dunensis) sur les anciennes dunes,

-de nombreuses orchidées se développent dans les clairières de la partie amont du marais, notamment l’Epipactis des marais (Epipactis palustris), espèce protégée en Normandie orientale, qui forme ici l’une des plus belles stations de Normandie, et les Dactylorhizes négligé, incarnat et à larges feuilles (Dactylorhiza praetermissa, D. incarnata et D. majalis),

-la rare Oenanthe safranée (Oenanthe crocata), abondante au Sud d’Aizier.

-L’ophioglosse commun (Ophioglossum vulgatum), espèce protégée en Normandie orientale.

Une plante originaire d’Amérique, l’Impatience du Cap (Impatiens capensis), envahit les roselières, les bords des eaux et les mégaphorbiaies. Elle peut être parfois confondue avec l’Impatiens-ne-me-touchez pas (Impatiens noli-tangere), autochtone et légalement protégée en Normandie orientale, qui n’a semble-t-il pas été revue récemment sur le site.

Cette zone humide comprend de nombreux éléments faunistiques remarquables avec, pour l’avifaune :

-le Râle d’eau (Rallus aquaticus), nicheur rare en Normandie orientale, entendu toute l’année

-la Bouscarle de Cetti (Cettia cetti), assez rare, qui fréquente les buissons de saules, les mégaphorbiaies, les roselières, etc.

-le Faucon hobereau (Falco subbuteo) chassant insectes et passereaux au-dessus du marais -possible nicheur-

-le Martin-pêcheur d’Europe (Alcedo atthis), qui se reproduit dans les talus des rus entre Aizier et Vieux-Port

-des oiseaux d’eau (Anatidés, limicoles, Ardéidés…) utilisant ce secteur comme halte migratoire.

L’entomofaune comprend entre autre le Lucane cerf-volant (Lucanus cervus), espèce inscrite à l’annexe II de la Directive Habitats de l’Union européenne, qui provient certainement des bois de pente adjacents au marais. Parmi les orthoptères, le Criquet marginé (Chorthippus albomarginatus), assez rare, fréquente les prairies humides.

Les lépidoptères remarquables recensés sont le Grand Mars changeant (Apatura iris) et le Tabac d’Espagne (Argynnis paphia).

En amphibiens, le Triton crêté (Triturus cristatus), menacé en Europe et inscrit à l’annexe II de la Directive Habitats de l’Union Européenne, se reproduit dans des mares alimentées par des sources en lisière d’Aizier.

Parmi les mammifères, plusieurs espèces de chauve-souris utilisent le marais comme terrain de chasse (dont la Pipistrelle commune - Pipistrellus pipistrellus, qui se reproduit dans des maisons en lisière du marais), et la Crossope aquatique (ou Musaraigne aquatique - Neomys fodiens) est observée de temps à autre dans les rus et les sources.

Un autre intérêt écologique est à souligner : ces milieux humides en bordure de fleuve fonctionnent souvent comme des systèmes naturels d’auto-épuration de l’eau, en utilisant les nutriments dissous dans l’eau (nitrates, phosphates, etc.).

En bord de Seine, la digue de rochers à l’aval d’Aizier est en cours d’envahissement par la Vrillée du Japon (Fallopia japonica), peste végétale originaire d’Asie qui se propage à partir des sites d’anciennes décharges.

Il serait souhaitable de la faire disparaître, ou, tout au moins, de limiter son développement.

Il importe de préserver ces marais relictuels, notamment du bétonnage ou de l’enrochement des berges ainsi que des dépôts des produits de curage de la Seine. Une protection règlementaire s’avérerait tout à fait justifiée sur de telles zones humides de très grand intérêt biologique et paysager. Une protection durable et une gestion adéquate de ce site, accompagnée de la mise en place de quelques sentiers de découverte judicieusement implantés, augmenterait encore l’attractivité touristique et la valeur patrimoniale des deux villages remarquables d’Aizier et de Vieux-Port.

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