Au sein de la vaste zone humide qui s’étire le long de la Seine entre Bardouville et Yville-sur-Seine (ZNIEFF de type II Zone alluviale de la Boucle d’Anneville-Ambourville), de vastes prairies humides s’étendent entre l'ouest de la commune de Berville-sur-Seine et le Nord du village d’Yville, sur des terrains alluviaux récents.
L'itérêt écologique de cette zone a motivée son intégration, en grande partie, à la ZSC FR2300123 "Boucles de la Seine Aval", dans le cadre du dispositif Natura 2000.
L’inondabilité de cette zone à la mauvaise saison varie selon la topographie. Les inondations favorisent le développement d’habitats, d’une flore et d’une faune de grand intérêt patrimonial notamment dans les dépressions humides et les milieux aquatiques.
Ces terres argilo-limoneuses lourdes ont une vocation essentiellement herbagère. Ainsi, bon nombre de prairies mésohygrophiles et hygrophiles font l’objet d’une fauche, souvent en juin, puis sont suivies d’une mise au parc des troupeaux en été. D’autres, notamment celles qui sont les plus aisément ressuyées, sont utilisées uniquement comme pâtures.
Les prairies de fauche (alliances phytosociologiques de l’Arrhenatherion elatioris et du Bromion racemosi) sont utilisées de façon plus ou moins intensive.
Les pâtures hygrophiles sont souvent à rattacher à l’association de l’Hordeosecalini-Lolietum perennis, classique dans ce type de systèmes prairiaux.
Le paysage est structuré par des réseaux de haies et d’alignements de saules et frênes taillés en têtards. De nombreux fossés, de nombreuses mares et dépressions humides complètent cette mosaïque. Quelques boisements, notamment de peupliers, s’y intercalent également.
Parmi les espèces remarquables pour la Haute-Normandie, on trouve notamment :
-l’Euphorbe des marais (Euphorbia palustris), espèce rare en Haute-Normandie et dans les régions voisines, caractéristique des mares et des fossés en zone alluviale de qualité,
-l’exceptionnelle Berle à feuilles larges (Sium latifolium),
-l’Hottonie des marais (Hottonia palustris) dans certaines mares, légalement protégée,
-les Oenanthes fistuleuse et à feuille de Silaüs (Oenanthe fistulosa et O. silaifolia), rares et vulnérables,
-la Groenlendie dense (Groenlendia densa) et la Laîche aigüe (Carex acuta), très rares et menacées,
-l’Orge faux-seigle (Hordeum secalinum), assez rare en Haute-Normandie mais bien représentée en basse vallée de Seine et notamment sur ce site,
-le Brome rameux (Bromus racemosus), l’Epiaire des marais (Stachys palustris), la Laîche distique (Carex disticha), le Silaum à feuille de Silaüs (Silaum silaus), le Pigamon jaune (Thalictrum flavum), assez rares.
Les milieux les plus remarquables sont les prairies les plus inondables et extensives, les dépressions, les abords de fossés et les mares, où se concentrent les stations d’espèces végétales les plus intéressantes.
Le patrimoine faunistique de cette zone humide comprend notamment les éléments suivants :
-la Pie-grièche écorcheur (Lanius collurio), passereau rare dans la région et inscrit à l’annexe I de la directive "Oiseaux" de l’Union Européenne, utilise les milieux bocagers, notamment les haies d’épineux pour faire son nid, et les prairies pour chasser.
-les passereaux prairiaux comptent notamment des effectifs notables de Tarier des prés (Saxicola rubetra), de Bergeronnette printanière (Motacilla flava flava) et de Pipit des prés (Anthus pratensis),
-le Vanneau huppé (Vanellus vanellus), limicole rare en tant que nicheur, se reproduit dans ou proximité des pâtures humides,
-plusieurs couples de Chevêche d’Athéna (Athene noctua) ont été recensés ; ce petit rapace nocturne cavernicole qui se raréfie, niche dans les vieux saules ou frênes têtards et chasse dans les prairies, de même que le Rougequeue à front blanc (Phoenicurus phoenicurus), assez rare dans la région,
-la Cigogne (Ciconia ciconia) qui niche au Nord de la ZNIEFF, lieu-dit le Marais du Parc.
-parmi les mammifères, les chiroptères comptent plusieurs espèces rares et menacées en Haute-Normandie qui utilisent le bocage et les prairies comme terrains de chasse : le Murin de Bechstein (Myotis bechsteini) et le Murin à oreilles échancrées (Myotis emarginatus) ; plusieurs autres espèces déterminantes ont également été recensées : le Putois (Mustela putorius), la Musaraigne aquatique (Neomys fodiens), le Campagnol amphibie (Arvicola sapidus), la Crocidure leucode (Crocidura leucodon).
Les évolutions de ces marais sont liées aux contraintes économiques actuelles de l’élevage, qui peuvent amener certains agriculteurs à délaisser les prairies humides. Celles-ci risquent d’être transformées en carrières, plantées de peupliers ou surtout transformées en champs de maïs.
Ainsi, un soutien ciblé des pratiques extensives d’élevage, notamment de fauche, sont justifiées pour pérenniser le patrimoine naturel et paysager de ce marais alluvial.