ZNIEFF 420030387
Milieux tourbeux des Blanches Roches, du Rond Perthuis, de la Maxe, du Ruisseau de la Truite et de la Vallée des Framboises

(n° regional: 1677086)

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La ZNIEFF I des tourbières de Salm est composée d’un complexe de tourbières de pente et de quatre tourbières de cirques glaciaires présentant des aspects, des degrés d’évolution et des états de conservation différents.

Au sein du massif du Donon dominé par la hêtraie-sapinière, cette ZNIEFF offre un échantillon des milieux les plus rares : diverses tourbières acides, hautes, actives ou dégradées, tourbière de transition, bas marais, gouilles végétalisées ou non, etc. Ces formations ouvertes sont accompagnées de tourbières boisées, bétulaie ou sapinière-pessière à sphaignes, de saulaie à Saule à oreillette (Salix aurita) et d’aulnaie. Aux environs se développent des boisements originaux, sapinière hyperacidiphile à luzules, bétulaie pubescente sur bloc à Sorbier des oiseleurs, érablaie-sapinière hygroacidicline. En outre, le Chaos de la Maxe constitue un habitat rare dans le massif vosgien : la pessière de cirque glaciaire (Ficht, C., 1999).

Le petit massif du Rond Perthuis est marqué par son altitude élevée et l’influence des dépressions atlantiques apportées par les vents de secteur sud-ouest. Cela entraine une forte pluviosité (1067 mm de précipitations annuelles, répartis sur 154 jours de pluie) et une température moyenne annuelle de 8.6°c avec 106 jours de gel/an. Ces importantes quantité d’eau, bien réparties tout au long de l’année, les températures basses, limitées par l’altitude, et les sols acides nés du soubassement gréseux triasique expliquent la formation de tourbières. Elles se forment soit dans des cirques glaciaires barrés à l’aval par des moraines quaternaires (tourbières de cirques), soit dans les zones de suintement permanents (tourbières de pentes).

Les cuvettes glaciaires creusées dans le grès triasique marquent la limite des glaciers de la dernière glaciation, dite « du Würm » (entre 15 000 et 10 000 ans av J.C. en Alsace). Après la fonte définitive des glaciers, se forment des lacs glaciaires colonisés par des sphaignes, qui croissent perpétuellement en se décomposant par le bas, formant ainsi la tourbe. Cette matière végétale est mal décomposée et mal minéralisée car les décomposeurs et les bactéries se trouvent pénalisés par le froid, l’acidité et la désoxygénation liée à l’engorgement en eau. Lorsqu’elle atteint le fond de l’ancien lac, la couche de sphaignes se bombe, continuant sa croissance, créant des « bultes » autour desquelles l’eau se fraye un passage dans un réseau irrégulier de chenaux appelés « Schlenken » (Ochsenbein, G., 1978). Douze espèces de sphaignes ont ainsi été recensées sur la seule tourbière de la Maxe (AFRPN, non daté).

Le sol qui en résulte impose des conditions tout à fait particulière aux plantes qui y vivent, les isolant du substrat et les privant de tout apport minéral. Deux solutions originales ont été élaborées par la flore : la symbiose et la prédation. La symbiose avec un champignon (mycorhize) est déployée par la Canneberge (Vaccinium oxycoccos), la Myrtille (Vaccinium myrtillus) et la Myrtille des marais (Vaccinium uliginosum), l’Andromède à feuilles de polium (Andromeda polifolia), les Bruyères et les Orchidées. Dans ce cas l’azote atmosphérique est capté par les mycorhizes et rendu assimilable pour la plante. La prédation concerne les plantes dites « carnivores », notamment le Rossolis à feuilles rondes (Drosera rotundifolia) (Ochsenbein, G., 1978) présent en très grand nombre (plusieurs centaines de pieds) sur les tourbières de La Maxe mais aussi au Rond Perthuis Supérieur.

La tourbière de la Maxe a retenu depuis plus d’un siècle l’attention des botanistes (Ochsenbein, G., 1978) en raison notamment de la présence de l'Andromède à feuilles de polium qui trouve ici sa seule station du département. D’autres plantes remarquables des tourbières méritent d’être citées : la Linaigrette engainante (Eriophorum vaginatum), la Listère cordée (Listera cordata), la Circée des Alpes (Circaea alpina) montagnarde "localisée" en Alsace présente dans le Vallon des Framboises et la Canneberge "localisée" en Alsace mais bien représentée sur plusieurs stations.

Quelques pieds d’Osmondes royales (Osmunda regalis), grande fougère recherchant une certaine « hygrothermie », s’installent dans des enclaves de micro-climat proche du climat océanique : précipitations abondantes, variations réduites des températures, clémentes en hiver et fraîches en été. En limite orientale de son aire européenne de répartition en Alsace, la population régionale de cette espèce se limite à une vingtaine de stations, toutes dans le Bas-Rhin.

Un inventaire des champignons identifiés par la Société Mycologique de Strasbourg sur le site de la tourbière de La Maxe entre 2002 et 2009 mentionne 254 espèces (et 6 variétés ou formes) de 87 genres différents ont été inventoriées, 26 de ces espèces étant considérées comme patrimoniales.

L'évolution naturelle qui mène des lacs de cirques glaciaires aux tourbières se poursuit par le boisement et les tourbières évoluent lentement vers la forêt sur tourbe. L’évolution de la Maxe a été ralentie par l’exploitation de la tourbe pendant environ vingt ans au début du XIX°s. Les trois autres tourbières montrent un état plus avancé de colonisation ligneuse.

Le Triton alpestre (Ichthyosaura alpestris) et le Triton palmé (Lissotriton helveticus) se reproduisent dans les gouilles, l’Etang du Coucou et l’Etang des Framboises. Ces milieux et leur périphérie abritent de plus une musaraigne aquatique du genre Crossope, très probablement la Crossope aquatique (Neomys fodiens). Le Lézard vivipare (Zootoca vivipara) s’observe dans les milieux ouverts, tourbières ou clairières.

Les oiseaux ont notamment été étudié par Berger J.-M. et montrent un cortège classique des forêts résineuses avec la présence notable du Cassenoix moucheté (Nucifraga caryocatactes) et du Pic cendré (Picus canus).

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Le périmètre est conçu pour englober un ensemble cohérent d’habitats d’espèces remarquables, inféodées aux milieux tourbeux montagnards.

La ZNIEFF est dessinée à partir des données disponibles concernant ce groupe d’espèces, sur un pas de temps déterminé (2001-2012), des connaissances bibliographiques concernant leurs exigences vitales (qualitativement et en termes de surfaces) et à partir des connaissances des habitats biologiques en présence.

Les contours de la ZNIEFF suivent des limites topographiques (cirques notamment) mais aussi des pistes forestières. Outre les tourbières à l'origine du classement, le périmètre inclut assez largement leurs alentours directs ainsi que la tête de bassin du ruisseau des framboises et le chaos de la Maxe.