Description
A l’est de Roches-lès-Blamont, le plateau calcaire du Jurassique supérieur (Kimméridgien) est incisé par un ruisseau affluent du Gland (bassin versant du Doubs). Ce petit cours d’eau issu d’une résurgence rejoint le fond de la reculée via plusieurs cascades ; la supérieure, en particulier, présente un beau manteau tufeux. Le contexte régional karstique est marqué à la fois par la faible extension des circulations d’eau de surface et par un réseau souterrain très développé. Au cours de leur circulation souterraine, les eaux se chargent en ions calcium et en carbonates. A leur sortie (exurgence), sous l’effet des remous du cours d’eau, il se produit un dégagement de dioxyde de carbone et une précipitation de carbonate de calcium sous forme de calcaire massif. Ces dépôts, appelés « tuf » ou « travertins », peuvent former des cônes ou des manteaux au niveau de cascades. Ce phénomène est bien marqué sur ce site, où l’on trouve des manteaux de tuf actif ou fossile. De plus, la présence de certains végétaux (mousses et algues) accélère le processus de précipitation au travers de l’activité photosynthétique. Outre leur intérêt paysager, ces formations revêtent une grande valeur sur le plan écologique ; elles abritent en effet des communautés de mousses très spécialisées, strictement inféodées à ce type de milieu, comprenant certaines espèces peu communes, voire rares en Franche-Comté.
Dans le contexte géomorphologique accidenté de la zone des cascades de Roches-lès-Blamont, les boisements sont largement dominants. Différents types de groupements forestiers occupent les pentes : ils se répartissent selon l’exposition, la topographie et la granulométrie des éboulis. Ces forêts hébergent notamment le milan royal, rapace menacé, en période de nidification.
En fond de vallon, il subsiste quelques milieux ouverts, mais ceux-ci ne sont plus exploités par l’agriculture. En l’absence d’entretien, les groupements prairiaux évoluent vers une végétation exubérante de mégaphorbiaies (formations humides de hautes herbes), favorables à de nombreux insectes floricoles, notamment des papillons de jour. Une partie est plantée en feuillus. Le cours du ruisseau est souligné par une ripisylve de type érablaie-frênaie des eaux vives sur calcaire.
Cette zone revêt en outre un intérêt majeur pour des amphibiens protégés : elle abrite la salamandre, qui se reproduit dans des cours d’eau de tête de bassin de bonne qualité et le sonneur à ventre jaune, crapaud d’intérêt européen, qui se contente de milieux aquatiques exigus (comme des ornières forestières) pour y pondre.
Statut de protection
Aucune protection réglementaire de l’espace n’a été mise en place. En revanche, la présence d’amphibiens et d’oiseaux protégés confère indirectement un statut de protection au milieu : la législation interdit en effet de porter atteinte aux espèces et aux milieux qui les supportent (arrêtés ministériels des 19/11/07 et 29/10/09).
Objectifs de préservation
Puisqu’ils ne subissent pas l'influence d'éventuelles activités se situant en amont, les cours d’eau de tête de bassin de Franche-Comté comme le ruisseau de Roches-lès-Blamont devraient présenter une qualité d’eau optimale. Toutefois, les particularités des systèmes karstiques accentuent les risques d’altération, puisque des eaux polluées peuvent resurgir à distance après une circulation souterraine, sans filtration par le substrat. C’est ce qui est constaté sur ce site, car des effluents issus du village de Roches-les-Blamont se retrouvent dans les eaux de la résurgence. Or, ce type d’écosystème remarquable est particulièrement fragile et sensible à toute dégradation et les groupements tuficoles s’en trouvent affectés. En outre, tout dépôt de quelque nature que ce soit est à exclure à proximité du ruisseau.
Du fait de la géomorphologie, les habitats des versants sont essentiellement soumis à la dynamique naturelle de succession écologique. Les forêts de pente sont peu ou pas exploitées en raison de leur inaccessibilité, ce qui rehausse leur valeur sur le plan écologique.