ZNIEFF 930020405
LACS ET CIRQUE GLACIAIRES DE PRELLES - LA HAUTE SAGNE - UBAC DE LA ROUITE

(n° régional : 05112166)

Commentaires généraux

Description

Etabli dans la partie centre est du département des Hautes Alpes, ce site de 521 hectares est localisé dans le massif du Champsaur au fond du vallon de Champoléon, sur la commune du même nom. Dominé au nord par la silhouette imposante et majestueuse de la montagne du Sirac (3440m), il s’inscrit dans un cadre splendide et sauvage. Il s’étend sur un versant nord, de 1630 m à 3086 m, compris entre le torrent du Champoléon ou Drac blanc et la ligne de crête joignant la Pointe des Pisses (2837 m) à la pointe des Estaris (3086 m), en passant par le col de Prelles (2808 m).
La partie nord est du site est incluse dans la zone centrale du Parc National des Ecrins, alors que sa partie sud ouest se trouve en zone périphérique.
Ce site à la géomorphologie complexe est constitué par le vallon glaciaire de Prelles, le replat frais de la Haute Sagne, le col du Cheval de Bois et la crête de la Rouite.
Le substrat géologique est assez complexe avec d’une part des roches siliceuses, dures et massives (spilites et gneiss oeillés) qui constituent le socle du site, et d’autre part l’apparition d’éléments de couverture sédimentaire avec des bancs marneux et calcaires. D’importants éboulis actifs issus de produits d’altération superficielle sont également présents. Les phénomènes d’érosion glaciaire ou l’action du gel et du dégel ont fortement marqué le paysage.
D’altitude moyenne relativement élevée, entre 1630 m et 3086 m, le site est compris dans les étages de végétation subalpin, alpin et nival.
Il englobe un remarquable complexe de zones humides d’altitude, bien développé et étendu associant des bas marais alcalins et acides, des pelouses riveraines arctico alpines, des formations végétales de sources et un lac d’altitude (le lac de Prelles à 2217m d’altitude), inclus en mosaïque dans des pelouses fraîches typiques de l’étage de végétation alpin. Les affleurements rocheux sont de nature variée avec des substrats calcaires et siliceux.

Milieux remarquables

Ce site se caractérise par la diversité des zones humides présentes : milieux vulnérables par excellence et de ce fait très sensibles aux perturbations d’origine anthropique. Trois milieux déterminants sont ainsi présents. Ce sont : les bas marais pionniers arctico alpins à Laîche bicolore (Carex bicolor) [all. phyto. Caricion incurvae (54.3)], habitat relictuel particulièrement rare et fragile bien représenté sur le site, les bas marais cryophiles d’altitude des bords de sources et suintements à Laîche des frimas (Carex frigida) [assoc. phyto. Caricetum frigidae (54.28)] et les ceintures péri lacustres des lacs froids et mares d’altitude à Linaigrette de Scheuchzer (Eriophorum scheuchzeri) [assoc. phyto. Eriophoretum scheuchzeri (54.41)].
Les autres milieux remarquables du site comprennent : les bas marais alcalins à Laîche de Davall (Carex davalliana) [all. phyto. Caricion davallianae (54.23)], les bas marais acides [all. Phyto. Caricion fuscae (54.4)], les formations amphibies à Rubanier à feuilles étroites (Sparganium angustifolium) des rives exondées, des lacs, étangs et mares (22.3).
Cette coexistence de bas marais alcalins, de bas marais acides et de formations marécageuses arctico alpines dans un espace relativement réduit contribue à l’intérêt du site. Mentionnons également l’existence de formations végétales liées aux sources oligotrophes [all. phyto. Cardamino amarae Montion fontanae et Dermatocarpion rivulorum (54.1)], groupements végétaux ponctuels à valeur patrimoniale élevée.
Les autres habitats remarquables du site comprennent les pelouses calcicoles alpines et subalpines à Séslérie bleutée (Sesleria caerulea) et Laîche toujours verte (Carex sempervirens) [all. phyto. Seslerion caeruleae (36.43)], installées sur sols superficiels ; des formations végétales de milieux rocheux comme les éboulis calcaires alpins à éléments moyens à Tabouret à feuilles rondes (Noccaea rotundifolia) [all. phyto. Thlaspion rotundifolii (61.2)], les éboulis siliceux alpins [all. phyto. Androsacion alpinae (61.11)], les rochers et falaises calcaires [all. phyto. Potentillion caulescentis (62.151)] et siliceux [all. phyto. Androsacion vandellii et Asplenion septentrionalis (62.2)].
Enfin, parmi les autres habitats d’intérêt particulier que recèle le site, il convient de mentionner des formations végétales herbacées typiques du massif alpin comme les pelouses des combes à neige acidiphiles [all. phyto. Salicion herbaceae (36.1)] et les pelouses acidiphiles à Nard raide (Nardus stricta) [all. phyto. Nardion strictae (36.31)].

Flore

Le site comprend dix espèces végétales déterminantes, dont trois sont protégées au niveau national : l'Androsace pubescente (Androsace pubescens), la Laîche bicolore (Carex bicolor), rare cypéracée des marécages arctico alpins froids d’altitude, et la Primevère du Piémont (Primula pedemontana). Trois autres espèces végétales déterminantes sont protégées en Provence-Alpes-Côte d’Azur : le Potamot des Alpes (Potamogeton alpinus), le Potamot allongé (Potamogeton praelongus), dont la présence sur le site représente l’une des rares localités de cette plante aquatique dans les Alpes, et le Trisète en épi à panicule ovale (Trisetum spicatum subsp. ovatipaniculatum), rencontré sur les crêtes élevées du site. Les autres espèces végétales déterminantes du site sont : l'Ail victoriale (Allium victorialis), anciennement signalé et à rechercher, l'Oréochlora fausse seslérie (Oreochloa seslerioides), le Scirpe de Hudson (Trichophorum alpinum), rare cypéracée des bas marais arctico alpins, et la Laîche très noire (Carex atrata var. aterrima).
Il abrite également quatre espèces végétales remarquables dont une est protégée au niveau national : l'Ancolie des Alpes (Aquilegia alpina), belle renonculacée aux grandes fleurs d'un bleu vif. Le Saule pubescent (Salix laggeri), arbuste endémique des Alpes qui pousse dans les alluvions humides et sur les berges de torrents, où il forme des fourrés ripicoles denses est quant à lui protégé en Provence Alpes Côte d’Azur. Le Génépi laineux (Artemisia eriantha) et le Genépi noir (Artemisia genipi) sont les deux dernières espèces remarquables du site.

Faune

Sur ce site, on peut observer vingt et une espèces animales patrimoniales, dont quatre sont déterminantes.
Chez les mammifères, citons notamment la présence pour les chauves-souris de la Sérotine de Nilsson (Eptesicus nilssonii) espèce nordique rare et déterminante, très localisée dans le nord de la région où elle est contactée au-dessus de 1400 m d'altitude et du Vespère de Savi (Hypsugo savii), espèce remarquable rupicole et montagnarde d’affinité méridionale, qui exploite d’une part les milieux forestiers (surtout ceux riverains de l’eau) pour la chasse et d’autre part les milieux rocheux (falaises) pour les gîtes, jusqu’à 2 400 m d’altitude. Les autres mammifères sont représentés par le Bouquetin des Alpes (Capra ibex), ongulé déterminant dont les populations locales sont issues de réintroductions et le Lièvre variable (Lepus timidus), espèce remarquable, relicte de l’époque glaciaire, fréquentant des milieux assez variés (alpages, éboulis, landes, forêts, pelouses, champs, cultures, friches) entre 1200 à 3100 m d’altitude. Le peuplement avien nicheur est riche en espèces remarquables dont certaines sont rares dans les Alpes et en Provence : l'Aigle royal (Aquila chrysaetos), la Perdrix bartavelle (Alectoris graeca), espèce méridionale de montagne recherchant les versants montagneux ouverts et ensoleillés avec des barres rocheuses, le Tétras lyre (Tetrao tetrix), espèce remarquable fragile, emblématique des Alpes, le Lagopède alpin (Lagopus mutus), espèce remarquable menacée, d’origine arctique, relique de l’époque glaciaire dans les Alpes, où elle occupe les reliefs de croupes et de crêtes, fréquemment enneigées et balayées par le vent, le Cincle plongeur (Cinclus cinclus), le Monticole de roche (Monticola saxatilis), le Tichodrome échelette (Tichodroma muraria), espèce paléomontagnarde remarquable et relativement rare, recherchant les gorges et escarpements rocheux, le Crave à bec rouge (Pyrrhocorax pyrrhocorax), nicheur remarquable peu fréquent, inféodé aux alpages où il vient s’alimenter situés à proximité de falaises où il niche, le Sizerin flammé (Carduelis flammea), nicheur localisé des forêts d'altitude, la Niverolle alpine (Montifringilla nivalis), espèce paléomontagnarde remarquable, caractéristique des pelouses avec escarpements rocheux des étages alpin et subnival des massifs montagneux les plus élevés et le Bruant fou (Emberiza cia). L’herpétofaune locale patrimoniale est représentée par le Triton alpestre (Ichthyosaura alpestris), espèce déterminante d’affinité montagnarde
Les insectes d’intérêt patrimonial sont représentés par une espèce déterminante : le Moiré aveugle (Erebia pharte), espèce alpine liée aux prairies subalpines humides et aux pelouses entre 1500 et 2000 m et sensible au surpâturage et plusieurs espèces remarquables comme le Céphalion (Coenonympha gardetta macromma), sous espèce de la sous famille des Satyrinés, endémique du centre et de l’ouest des Alpes, à aire de répartition disjointe, inféodée aux pelouses et fourrés de l’étage subalpin, l’Apollon (Parnassius apollo), espèce d'affinité montagnarde, protégée au niveau européen, peuplant les rocailles, pelouses et éboulis à Crassulacées et Saxifragacées entre 500 et 2500 m d’altitude, le Petit Apollon (Parnassius corybas sacerdos), espèce protégée en France, des bords des torrents et autres zones humides des étages subalpin et alpin, dont la chenille est inféodée au Saxifrage faux aizoon (Saxifraga aizoides) et le Criquet ensanglanté (Stethophyma grossum), orthoptère d'affinité eurosibérienne, en forte régression en dehors des Alpes, strictement liée aux prairies très humides et surfaces marécageuses.

Fonctionnalité/Liens éventuels avec d’autres ZNIEFF

Cette ZNIEFF de type 1 est incluse dans la ZNIEFF de type 2 «05_112_100   Partie sud est du massif et du Parc National des Écrins   massif du Mourre Froid   Grand Pinier   haut vallon de Chichin – face est des Bans – vallée du Fournel».

Commentaires sur la délimitation

Le site correspond à la partie moyenne et supérieure d’un versant globalement orienté à l’ubac. Délimité essentiellement par sa topographie de hautes crêtes, il englobe une importante variété d’habitats subalpins et alpins, dont certains ont une valeur patrimoniale très élevée et recèlent nombre d’espèces rares.