ZNIEFF 930020417
MONTAGNE D'AUROUZE - PLATEAU ET PIC DE BURE - FORÊT DOMANIALE DES SAUVAS - TÊTE ET COMBE DE LA CLUSE

(n° régional : 05123192)

Commentaires généraux

Description

Etabli dans la partie centre ouest du département des Hautes Alpes, à l’ouest de la ville de Gap et au sud du massif du Dévoluy, ce site grandiose de 3261 hectares s’étend autour du plateau et du Pic de Bure (2709m), ceinturés de vertigineuses et spectaculaires parois calcaires.

Cinq grandes combes permettent d’accéder au plateau, dont les plus parcourues sont la Combe Ratin en versant nord et les combes de Mai et d’Aurouze en versant sud. Le plateau de Bure est également un lieu de recherche important avec la présence d’un observatoire astrophysique.

Le substrat géologique est composé par une couverture sédimentaire de terrains tertiaires et secondaires. Les lauzes siliceuses du Maestrichtien et les lauzes argileuses du Campanien (Sénonien) constituent ainsi le plateau et les hautes crêtes rocheuses. Elles surmontent les niveaux de marnes jaunissantes, les bancs marno calcaires et les calcaires lithographiques beiges du Néocomien, ainsi que les niveaux calcaires et marneux du tithonique et du Dogger.

L’ensemble est en grande partie recouvert par des éboulis stabilisés ou encore mobiles et par des cônes de déjections.
Localisé dans la zone biogéographique des Préalpes delphino provençales, comme l’ensemble du massif du Dévoluy, le site est soumis aux influences climatiques océaniques encore marquées de la région nord dauphinoise qui se combinent avec les influences méditerranéennes du sud des Alpes.
Réparti entre 1280 m et 2708 m d’altitude, le site est compris dans les étages de végétation montagnard, subalpin et alpin.

Ce site d’altitude élevée présente essentiellement des milieux de rocailles ou des milieux herbacés ouverts. Il englobe les immenses et austères combes d’éboulis calcaires, qui prennent naissance sous le plateau, entrecoupées de falaises calcaires, de bois de pins et de pelouses d’altitude. Ce formidable ensemble, à la configuration complexe, permet l’existence de biotopes très divers, propices à la cohabitation d’espèces végétales variées, dont de nombreuses endémiques, ainsi que la présence d’une entomofaune montagnarde et d’une faune mammalienne et avienne fort riche et variée.

Milieux remarquables

Une très importante diversité d’habitats est représentée sur le site. Les trois habitats déterminants que compte le site se rapportent à des éboulis calcaires fins, représentés notamment par des formations à Liondent des montagnes (Leontodon montanus) et à Bérardie laineuse (Berardia subacaulis) [assoc. phyto. Leontodontetum montani (61.2321) et Berardietum lanuginosi (61.2322)], et aux entrées de grottes et les balmes thermophiles à annuelles [asso. phyto. Anthrisco caucalidis Asperugetum procumbentis) (65)] accueillant une végétation de petites plantes annuelles, dont de nombreuses espèces à forte valeur patrimoniale.

De nombreux autres habitats remarquables sont présents, notamment parmi les formations herbacées. Ce sont en particulier les pelouses calcicoles alpines et subalpines à Séslérie bleutée (Sesleria caerulea) et Laîche toujours verte (Carex sempervirens) [all. phyto. Seslerion caeruleae (36.43)] installées sur sols superficiels, les pelouses écorchées à Avoine toujours verte (Helictotrichon sempervirens) des Alpes du Sud [sous all. phyto. Ononido cristatae Helictotrichenion sempervirentis (36 432)], qui colonisent les fortes pentes caillouteuses calcaires sèches, les prairies sèches méso xérophiles à Brome dressé (Bromus erectus) [all. phyto. Mesobromion erecti (34.3265)] et les pelouses pionnières calcicoles écorchées sur dalles rocheuses calcaires à Orpins (Sedum pl. sp.) et Joubarbes (Sempervivum pl. sp.) [all. phyto. Alysso sedion albi (34.1)].

Parmi les formations arbustives et sous arbustives, généralement associées à la dynamique succédant à ces formations herbacées, figurent également un certain nombre d’habitats remarquables tels que les landes xérophiles d’adret à Genévrier nain (Juniperus nana) et/ou Raisin d’ours (Arctostaphylos uva ursi) [all. phyto. Juniperion nanae (31.43)].

Si les milieux forestiers sont peu étendus sur le site, les pinèdes de Pin à crochets sur calcaire (42.4)], habitat dont la conservation est prioritaire dans le cadre de la Directive Habitats, figurent parmi ceux qui sont à remarquer d’emblée.

Les milieux rocheux, très étendus sur ce site, à forte connotation minérale, comprennent eux aussi des habitats remarquables, à forte valeur patrimoniale, comme les éboulis thermophiles à Calamagrostis argenté (Achnatherum calamagrostis) [all. phyto. Stipion calamagrostis (61.3)], les éboulis calcaires alpins [all. phyto. Thlaspion rotundifolii (61.2)] et les formations végétales des rochers et falaises calcaires [all. phyto. Potentillion caulescentis et Violo biflorae Cystopteridion fragilis (62.15)].

Parmi les habitats liés aux zones humides, rares dans le massif, mentionnons également l’existence de formations végétales de sources (54.1), groupements végétaux ponctuels à forte valeur patrimoniale et de façon très localisée, des bas marais alcalins à Laîche de Davall (Carex davalliana) [all. phyto. Caricion davallianae (54.23)].

Flore

Le site comprend vingt six espèces végétales déterminantes, dont neuf sont protégées au niveau national : la Berce naine (Heracleum pumilum), petite ombellifère des éboulis calcaires alpins et subalpins, endémique delphino provençale, le Panicaut blanc des Alpes (Eryngium spinalba), ombellifère épineuse des éboulis thermophiles et des pelouses sèches, endémique des Alpes sud occidentales, l'Orchis de Spitzel (Orchis spitzelii), qui occupe les pinèdes du site, la Rhapontique à feuilles d'Aunée (Rhaponticum heleniifolium subsp. heleniifolium), la Serratule à feuilles de chanvre d'eau (Klasea lycopifolia), composée liée aux prairies de fauche d’une très grande rareté et en régression marquée, la Corbeille d'argent du mont Aurouse (Iberis aurosica), l'Androsace de Suisse (Androsace helvetica), l'Androsace pubescente (Androsace pubescens) et l'Ancolie de Bertoloni (Aquilegia reuteri), superbe renonculacée endémique des Alpes du Sud-Ouest. Huit autres espèces végétales déterminantes sont protégées en Provence Alpes Côte d’Azur : la Biscutelle à tiges courtes (Biscutella brevicaulis), crucifère des éboulis et rocailles calcaires, l'Ophioglosse commun (Ophioglossum vulgatum), le Chardon du Mont Aurouse (Carduus aurosicus), endémique locale des éboulis calcaires fins, la Vesce du mont Cusna (Vicia cusnae), remarquable légumineuse des éboulis calcaires dont il s’agit ici de la seule station départementale et de l’une des deux stations françaises connues, la Laîche mucronée (Carex mucronata), historiquement citée et à rechercher sur les escarpements rocheux, le Pâturin vert glauque (Poa glauca), le Saxifrage du Dauphiné (Saxifraga delphinensis), rare endémique delphino provençale des falaises calcaires ombragées, et la Renoncule à feuilles de parnassie (Ranunculus parnassifolius subsp. heterocarpus), très rare renonculacée à fleurs blanches des éboulis calcaires, localisée à quelques m² sur le site. Les autres espèces végétales déterminantes du site sont : la Passerage de Villars (Lepidium villarsii), l'Oeillet à tiges courtes (Dianthus subacaulis), caryophyllacée des pelouses rocailleuses et des éboulis calcaires, le Gaillet des rochers (Galium saxosum), le Jonc à fruits globuleux (Juncus sphaerocarpus), l'Avoine des Abruzzes (Helictochloa versicolor subsp. praetutiana), graminée franco italienne des pelouses calcaires d’altitude, distribuée dans les montagnes du sud de l’Italie et dans les Alpes du Sud, récemment découverte en France, le Pigamon simple (Thalictrum simplex), la Renoncule à feuilles de Rue (Callianthemum coriandrifolium), la Potentille des neiges (Potentilla nivalis), le Raisin d'ours des Alpes (Arctostaphylos alpinus) et le Cotonéaster intermédiaire (Cotoneaster x intermedius).

Il abrite également six espèces végétales remarquables, dont deux sont protégées au niveau national : la Bérardie laineuse (Berardia subacaulis), composée archaïque endémique des Alpes sud occidentales typique des éboulis calcaires à éléments fins et l'Ancolie des Alpes (Aquilegia alpina), belle renonculacée aux grandes fleurs d'un bleu vif. La Minuartie des rochers (Minuartia rupestris subsp. rupestris) est protégée en Provence Alpes Côte d’Azur. Les autres espèces végétales remarquables du site sont : le Sélin à feuilles de silaus (Katapsuxis silaifolia), le Genépi noir (Artemisia genipi) et l'Anémone de Haller (Anemone halleri), qui fleurit au printemps sur des pelouses ventées du site.

Faune

Treize espèces animales patrimoniales, dont quatre sont déterminantes, ont été dénombrées sur le site.

Chez les mammifères il s’agit d’une espèce de chauve souris forestière déterminante, la Barbastelle (Barbastella barbastellus) et du Cerf élaphe (Cervus elaphus), grand ruminant remarquable, aujourd’hui plutôt forestier, en expansion géographique et numérique en France et dans la région, présent jusqu’à 2 500 m.

Les oiseaux sont représentés par la Chevêchette d’Europe (Glaucidium passerinum), petite chouette des forêts claires montagnardes, espèce euro-sibérienne déterminante et rare de la taïga et des forêts claires de résineux dans les Alpes (mélézins, sapinières, pessières, cembraies), de l’Aigle royal (Aquila chrysaetos), de l’Autour des palombes (Accipiter gentilis), du Lagopède des Alpes (Lagopus mutus), galliforme adapté aux rudes conditions hivernales, du Tétras lyre (Tetrao tetrix), en régression forte sur les massifs montagneux externes des Alpes.

La Couleuvre verte et jaune (Hierophis viridiflavus), espèce remarquable à répartition majoritairement Franco-Italienne qui privilégie les fourrés et les friches, peut également s'y rencontrer.

Quant aux insectes, ils sont représentés par deux espèces de Charançon déterminants, Otiorhynchus bigoti, espèce de haute montagne, localisée vers 2500 m d’altitude et endémique du plateau de Bure et Otiorhynchus coachei. Ces deux espèces sont accompagnées par deux lépidoptères : l’Azuré du Serpolet (Maculinea arion), espèce remarquable et protégée au niveau européen, inféodée aux bois clairs et ensoleillés, pelouses et friches sèches avec présence de ses plantes hôtes, des serpolets et de sa principale fourmi hôte, Myrmica sabuleti, jusqu’à 2400 m d’altitude et l’Apollon (Parnassius apollo), espèce remarquable d'affinité montagnarde, protégée au niveau européen, peuplant les rocailles, pelouses et éboulis à Crassulacées et Saxifragacées entre 500 et 2 500 m d’altitude.

Enfin, du côté des mollusques, citons la présence du le Maillot des rochers (Pupilla sterrii), espèce remarquable localisée dans le Jura et les Alpes, liées aux milieux montagnards orientaux de la région et vivant dans les habitats rocailleux et ensoleillés.

 

Fonctionnalité/Liens éventuels avec d’autres ZNIEFF

Cette ZNIEFF de type 1 est incluse dans la ZNIEFF de type 2 « 930012803 - Dévoluy méridional : massif de Bure - Gleize   vallée de Chaudun - Charance ».

L’enjeu principal pour ce site consiste en la conservation des habitats d’espèces végétales liées aux rocailles et éboulis calcaires, ainsi qu’aux pelouses subalpines.

Commentaires sur la délimitation

Le site englobe les plus hautes crêtes du Dévoluy méridional. Sa délimitation obéit à une logique de massif et inclut les versants de part et d’autre de la crête principale. Les limites excluent cependant les secteurs les plus fortement anthropisés : domaine skiable de Superdévoluy et reboisements monospécifiques de pins. Cet espace ainsi défini, s’assure d’englober des habitats et espèces d’intérêt exceptionnel. Ses limites s’appuient, lorsque c’est possible, sur les éléments topographiques, géographiques et paysagers les plus marqués, quand il en existe.