Typologie nationale des habitats marins benthiques de la Manche, de la Mer du Nord et de l'Atlantique (NatHab-Atl)

L’habitat B3-3 Sables grossier et graviers infralittoraux en milieu à salinité variable a été créé dans la version 1 de la typologie (Michez et al., 2013) sous le code et l’intitulé M08.02 Sables grossiers et graviers sublittoraux en milieux à salinité variable. Il a été maintenu sous cette appellation dans la version 2 de la typologie (Michez et al., 2015) avant d’être modifié dans la version 3 de la typologie (Michez et al., 2019) afin de mieux cibler l’étage benthique.

Etage : Infralittoral
Nature du substrat : Sables grossiers [0,5 mm ; 2 mm ; (et graviers [2 mm ; 10 mm [)]
Répartition bathymétrique : 0-40 m environ [Dépend de la pénétration de la lumière, ce qui est très variable selon les sites. S’étend jusqu’où l’intensité lumineuse est compatible avec la vie des ma-crophytes photophiles]
Hydrodynamisme : Modéré à fort
Salinité : Euryhalin
Température : Cyclotherme journalier, bimensuel et saisonnier
Lumière : Système phytal, eaux claires ou turbides
Régime trophique : Oligotrophe à eutrophe

Gravelles propres et débris coquilliers des fonds d’estuaires et des baies sous influence d’eaux douces, rencontrés dans des zones où l’hydrodynamisme généralement fort à modéré ne permet pas le dépôt de particules fines. A proximité des embouchures estuariennes, ils proviennent essentiellement du plateau continental. En amont des systèmes estuariens, ces sédiments peuvent être le résultat de la désagrégation des versants par le fleuve, qui lors des fortes crues, charrie les particules sédimentaires d’origine continentale sur le fond. Ils peuvent également résulter du lessivage des rives ou être occasionnés par des déversements humains. Selon le régime hydrodynamique du fleuve, les particules se répartissent sur le fond en fonction de leur taille, de leur forme et de leur densité.
En aval de l’estuaire, cet habitat est paucispécifique, caractérisé par une faune éparse mais très robuste et tolérante aux variations de salinité. Plus en amont, les conditions de faible salinité, la turbidité importante et l’intensité des courants réduisent fortement l’établissement d’invertébrés macrobenthiques et les fonds subtidaux apparaissent de ce point de vue dépourvus d’endofaune.

L’habitat varie selon la combinaison des facteurs suivants :
- la courantologie locale, corrélée à la morphologie du site, au régime tidal (méso-, macro- ou mégatidal), au positionnement dans le système estuarien et à la circulation des masses d’eau ;
- la composition du substrat et sa teneur en matière organique ;
- le gradient de salinité, qui dépend de la marée et du débit du fleuve ;
- la profondeur ;
- la pollution et autres pressions anthropiques.
La composition faunistique dépend de la granulométrie du substrat, au moins dans les secteurs euhalin et polyhalin, ainsi que des gradients de salinité. En domaines oligohalin et mésohalin, le type sédimentaire joue un rôle très secondaire dans la structuration des peuplements benthiques. De manière générale, plus la granulométrie du sédiment est importante et la salinité faible, moins l’endofaune est diversifiée.

L’habitat B3-3 ne se reconnaît pas par des espèces caractéristiques mais par la bathymétrie et le type de substrat en milieu à salinité variable.

La liste fournie ne constitue pas une liste exhaustive des espèces associées à cet habitat. Dans le cadre de cette fiche, les espèces associées ont été définies comme les espèces les plus fréquem-ment citées dans la littérature pour cet habitat. La liste suivante regroupe les espèces communé-ment retrouvées dans les secteurs polyhalin, mésohalin et oligohalin de cet habitat. Pour le secteur euhalin, se référer à la liste d’espèces associées de l’habitat B3-2 Sables grossiers et graviers infralit-toraux, à laquelle peuvent être ajoutées les espèces citées ici.
Des espèces inféodées à des habitats de sédiments plus fins, associés ou en contact, peuvent être retrouvées dans les substrats grossiers, apportés par les flots.
En domaines oligohalin et mésohalin, le type sédimentaire joue un rôle secondaire dans la structuration des peuplements benthiques. On pourra ainsi trouver dans les sédiments grossiers en amont des estuaires des espèces typiques de substrats plus fins.

Cet habitat peut évoluer dans sa composition granulométrique et faunistique au fil des saisons. En période hivernale, les tempêtes et les fortes crues du fleuve auront tendance à remanier les sédiments et feront diminuer la salinité. L’endofaune qui subit ces variations sera moins abondante et diversifiée en hiver qu’en période estivale, lorsque les conditions environnementales sont plus stables.

L’habitat B3-3 peut potentiellement être en contact avec les habitats suivants (liste non-exhaustive) :
En contact supérieur avec les habitats médiolittoraux :
- A1-5 Roches ou blocs médiolittoraux avec fucales en milieu à salinité variable
- A3-3 Sédiments grossiers médiolittoraux en milieu à salinité variable
- A4-2 Sédiments hétérogènes envasés médiolittoraux en milieu à salinité variable
- A5-5 Sables médiolittoraux en milieu à salinité variable
- A6-3 Vases médiolittorales en milieu à salinité variable de la slikke
- A5-6.2 Herbiers à Zostera noltei sur sables médiolittoraux en milieu à salinité variable

En contact de même niveau ou en association avec :
- B1-8 Roches ou blocs infralittoraux en milieu à salinité variable
- B4-2 Sédiments hétérogènes infralittoraux en milieu à salinité variable
- B5-4 Sables mobiles infralittoraux en milieu à salinité variable
- B6-4 Vases infralittorales en milieu à salinité variable
- B5-5 Herbiers à Zostera marina sur sables infralittoraux
- B5-6 Herbiers à Ruppia maritima sur sables infralittoraux

En contact inférieur avec les habitats circalittoraux :
- C1-8 Roches ou blocs circalittoraux en milieu à salinité variable

Confusion possible avec les habitats B4-2 Sédiments hétérogènes infralittoraux en milieu à salinité variable et B5-4 Sables mobiles infralittoraux en milieu à salinité variable selon l’appréciation de la granulométrie du sédiment sur le terrain. Ces habitats peuvent de plus accueillir une faune similaire, voire identique, en domaines mésohalin et oligohalin. Des analyses bio-sédimentaires complètes en laboratoire permettent de distinguer ces différents habitats.
Une confusion d’ordre altitudinale peut aussi avoir lieu avec l’habitat A3-3 Sédiments grossiers médiolittoraux en milieu à salinité variable. Le relevé des coordonnées GPS couplé aux cartes marines permet de faire la distinction.
Pour ces mêmes facteurs bathymétrique et granulométrique, les habitats A4-2 Sédiments hétérogènes envasés médiolittoraux en milieu à salinité variable et A5-5 Sables médiolittoraux en milieu à salinité variable peuvent également porter à confusion.

Cet habitat a été recensé aux embouchures de tous les grands estuaires français (Seine, Loire et Gironde). Il est également présent dans les estuaires et abers de Bretagne (estuaires de la Rance, du Trieux, du Jaudy, abers de la côte des Légendes et de la Rade de Brest, rade de Lorient, rivière d’Etel, Golfe du Morbihan, estuaire de la Vilaine).
Cet habitat est relativement rare et/ou peu documenté dans les parties polyhalines et surtout méso- et oligohalines des estuaires. En effet, dans la partie amont des grands estuaires français, qui sont les estuaires les mieux documentés, la présence du maximum de turbidité (« bouchon vaseux ») et son déplacement au gré des saisons entraînent des cycles complexes de dépôts/érosions de particules fines sur les fonds. En conséquence, des fonds estuariens constitués de sables grossiers ou de graviers dépourvus de particules fines n’apparaissent souvent que de manière éphémère. Dans les petits estuaires de type ria, dont la turbidité est nettement plus faible, ces fonds sont sans doute un peu plus communs mais ils sont aujourd’hui très peu documentés et peu ou pas cartographiés.
Des prospections terrain seraient à envisager dans les milieux à salinité variable de la façade Manche – Mer du Nord – Atlantique non encore cartographiés ou dont les cartographies se révèlent trop anciennes.

L’habitat étant peu recensé et correspondant généralement à des zones de faibles étendues, il y a un manque de connaissance sur leurs structure et fonctions.

Au titre de la DHFF (92/43/CEE), l’habitat B3-3 peut être inclus dans le HIC 1110 « Bancs de sable à faible couverture permanente d'eau marine », sous réserve de limite haute du HIC au-dessus de 20m de profondeur, de continuité sédimentaire et des communautés associées depuis la zone moins profonde. L’habitat B3-3 peut également correspondre à l’HIC 1130 « Estuaires », à l’HIC 1150 « Lagunes côtières » ou à l’HIC 1160 « Grandes criques et baies peu profondes » sous réserve de respect des critères d'identification géomorphologiques et de délimitation physiographiques de l'HIC. Il peut également correspondre à l’HIC 8330 « Grottes marines » sous réserve de respect des critères d’identification de l’HIC (notamment de seuil de taille).

Pas d’information disponible.

Latry L., Blanchet H.

2020

Michez N., Aish A., Hily C., Sauriau P.-G., Derrien-Courtel S., de Casamajor M.-N., Foveau A., Ruellet T., Lozach S., Soulier L., Popovsky J., Blanchet H., Cajeri P., Bajjouk T., Guillaumont B., Grall J., Gentil F., Houbin C., Thiébaut E., 2013. Typologie des habitats marins benthiques français de Manche, de Mer du Nord et d'Atlantique : Version 1. Rapport SPN 2013 - 9, MNHN, Paris, 32 p. (Source)

 Michez N., Bajjouk T., Aish A., Andersen A. C., Ar Gall E., Baffreau A., Blanchet H., Chauvet P., Dauvin J. -C., De Casamajor M.-N., Derrien-Courtel S., Dubois S., Fabri M.-C., Houbin C., Legall L., Menot L., Rolet C., Sauriau P.-G., Thiébaut E., Tourolle J., Van den Beld I., 2015. Typologie des habitats marins benthiques de la Manche, de la Mer du Nord et de l’Atlantique Version 2. Rapport SPN 2015 - 45, MNHN, Paris, 61 p. (Source)

 Michez N., Thiébaut E., Dubois S., Le Gall L., Dauvin J.C., Andersen A. C., Baffreau A., Bajjouk T., Blanchet H., de Bettignies T., de Casamajor M.-N., Derrien-Courtel S., Houbin C., Janson A.L., La Rivière M., Lévèque L., Menot L., Sauriau P.G., Simon N., Viard F., 2019. Typologie des habitats marins benthiques de la Manche, de la Mer du Nord et de l’Atlantique. Version 3. UMS PatriNat, Muséum national d'Histoire naturelle, Paris, 52 p. (Source)

Bajjouk T., Guillaumont B., Michez N., Thouin B., Croguennec C., Populus J., Louvel‐Glaser J., Gaudillat V., Chevalier C., Tourolle J. & Hamon D., 2015. Classification EUNIS, Système d’information européen sur la nature : Traduction française des habitats benthiques des Régions Atlantique et Méditerranée. Vol. 1. Habitats Littoraux. Réf. IFREMER/DYNECO/AG/15‐02/TB1, 231 p.

 Bensettiti F., Bioret F., Roland J. & Lacoste J.-P. (coord.) 2004. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 2 - Habitats côtiers. MEDD/MAAPAR/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 399 p. + cédérom.

Blanchet H., Gouillieux B., Alizier S., Amouroux J.-M., Bachelet G., Barillé A.-L., Dauvin J.-C., de Montaudouin X., Derolez V., Desroy N., Grall J., Grémare A., Hacquebart P., Jourde, J., Labrune C., Lavesque N., Meirland A., Nebout T. [...] 2014. Multiscale patterns in the diversity and organization of benthic intertidal fauna among French Atlantic estuaries. Journal of Sea Research, 90: 95-110.
 https://doi.org/10.1016/j.seares.2014.02.014

 Chamley H. 1974. Considérations sur la sédimentologie des estuaires. Houille Blanche, 29(1–2) : 123-128.

Connor D.W., Allen J.H., Golding N., Howell K.L., Lieberknecht L.M., Northen K.O. & Reker J.B., 2004. The Marine Habitat Classification for Britain and Ireland. Version 04.05 (internet version: www.jncc.gov.uk/MarineHabitatClassification). Joint Nature Conservation Committee, Peterborough, 49 p.

Connor D.W., Dalkin M.J., Hill T.O., Holt R.H.F. & Sanderson W.G., 1997. Marine Nature Conservation Review: marine biotope classification for Britain and Ireland. Vol. 2, Sublittoral biotopes. Joint Nature Conservation Committee, Peterborough, UK.

Dauvin J.-C. 1997. Les biocénoses marines et littorales françaises des côtes Atlantique, Manche et Mer du Nord, synthèse, menaces et perspectives. Laboratoire de Biologie des Invertébrés Marins et Malacologie-Service du Patrimoine Naturel: IEGB/MNHN, Paris. Collection Patrimoines Naturels, Vol. 28, 359 p.

Desroy N. 1998. Les peuplements benthiques de substrats meubles du bassin maritime de la Rance : évolution de la biodiversité et effets de l’activité prédatrice de Nephtys hombergii (annelide polychète) sur le recrutement. Thèse de Doctorat, Université de Rennes 1, 206 p. + Annexes.

Gouillieux B., Bachelet G., de Montaudouin X., Blanchet H., Lavesque N., Desroy N., Olivier F., Nebout T., Grall J., Barillé A.-L., Hacquebart P., Meirland A., Jourde J., Labrune C., Amouroux J.-M., Derolez V., Pelaprat C. & Thorin S. 2009. Proposition d’un indicateur benthique pour la qualification des masses d’eaux de transition pour la Directive Cadre sur l’Eau. Rapport CNRS, Action Onema A 231, 109 p.
https://wwz.ifremer.fr/dce/content/download/16100/239711/version/2/file/Proposition+indicateur+invertébrés+MET+Manche+Atlantique.pdf

Janson A.-L., 2007. Evolution de la biodiversité benthique des vasières subtidales de l’estuaire de la Seine en réponse à la dynamique sédimentaire. De l’approche descriptive à l’approche fonctionnelle. Thèse de Doctorat, Université de Rouen, 282 p. + annexes.

Le Bris H., 1988. Fonctionnement des écosystèmes benthiques côtiers au contact d’estuaires : la rade de Lorient et le baie de Vilaine. Thèse de Doctorat, Université de Bretagne Occidentale, 309 p. + annexes.

Lemoine J.P. & Verney R. 2015. Fonctionnement hydro-sédimentaire de l’estuaire de la Seine. Fascicule 3.3. GIP Seine-Aval, 63 p. https://www.seine-aval.fr/wp-content/uploads/2015/04/3-3-Hydrosed.pdf

 Sauriau P.-G. & Blanchet H. 2018. Habitats marins et estuariens de l’estuaire de la Gironde : bilan des connaissances et cartographie NATURA 2000. XVème Journées Nationales Génie Côtier – Génie Civil, 703–716.