Typologie nationale des biocénoses benthiques de Méditerranée (NatHab-Med)

Etage : Bathyal
Nature du substrat : Roche partiellement sédimentée
Répartition bathymétrique : Entre 200 et 600 m de profondeur
Situation : Mer ouverte, large
Hydrodynamisme : Courants modérés
Salinité : 38
Température : 13°C
Lumière : Absente
Régime trophique : Oligotrophe

Ce « faciès » à grands invertébrés dressés est dominé par des antipathaires et/ou gorgonaires. Il n’est pas considéré comme un faciès mono-spécifique mais plus comme un assemblage d’organismes dominé principalement par des antipathaires avec souvent des gorgonaires (Michez et al., 2014 ; Fourt et al., 2014). Les connaissances sur les cnidaires profonds sont généralement assez limitées (Mortensen et Buhl-Mortensen, 2004). Les récentes études italiennes sur les fonds rocheux profonds ont apporté un certain nombre de connaissances sur ce « faciès » mais pour la Méditerranée française, les informations restent encore restreintes.
Durant les campagnes MedSeaCan et CorSeaCan, la présence récurrente d’agrégations d’antipathaires et/ou gorgonaires, sans prédominance d’une espèce particulière, a été observée. Le faciès n’étant pas dominé par une seule espèce, il a été décidé de l’ajouter à la typologie en le mettant entre guillemets. Il en est de même pour le « faciès » des coraux profonds (V.3.1.d.) et le « faciès » à grande éponges (V.3.1.e.) (Michez et al., 2014).
En Méditerranée française, l’assemblage d’organismes de ce faciès peut être caractérisé par les antipathaires suivant : Antipathes dichotoma, Leiopathes glaberrima et Parantipathes larix (Fourt, com. pers.). Le plus fréquemment représenté est L. glaberrima. A ces trois antipathaires s’ajoutent un certain nombre de gorgonaires tels que Callogorgia verticillata, Eunicella cavolini et d’autres. Ce faciès est rencontré sur des fonds rocheux légèrement sédimentés (Bo et al., 2011) entre 100 et 600 m de profondeur en Méditerranée française (Fourt et Goujard, 2012 ; Fourt et al., 2013a, b, c et d). L’analyse des données des campagnes MedSeaCan et CorSeaCan permettront de mieux connaitre ce « faciès » de Méditerranée française, pour lequel des expertises complémentaires sont nécessaires.

Ces espèces sont longévives. Au sud-ouest de la Sardaigne, des individus datant d’environ 2 000 ans ont été datés et observés (Bo et al., 2015).

Assemblage à dominance d’antipathaires, notamment de Leiopathes glaberrima, mais aussi d’Antipathes dichotoma et de Parantipathes larix souvent accompagnés de gorgonaires tels que Callogorgia verticillata et Eunicella cavolini.

Au large des côtes de la Calabre, des gorgonaires telles que Eunicella cavolini, Callogorgia verticillata, Paramuricea macrospina ont été observées en assemblage avec Antipathes dichotoma. Des anémones, des ophiures, des crinoïdes (Antedon cf. mediterranea), des nudibranches, des éponges encroûtantes, des ascidies, des bryozoaires ou encore des annélides y ont également été retrouvés (Bo et al., 2011). Acanthogorgia hirsuta, Viminella flagellum, Leptometra phalangium et des Poecillastra compressa ont été observées au nord-ouest de la Sicile (banc de Marco) avec des communautés de Leiopathes glaberrima (Bo et al., 2014). En Sardaigne, des alevins de Scyliorhinus canicula ont été recensés dans les forêts de Leiopathes glaberrima (Cau et al., 2014). Parantipathes larix et Antipathes dichotoma créent des refuges pour Lappanella fasciata (Bo et al., 2011 ; 2012).
Les données issues des campagnes MedSeaCan et CorSeaCan ont montré que ce faciès est principalement constitué par Leiopathes glaberrima mais que la composition en espèces caractéristiques et associées est assez floue. On note cependant souvent, en complément des 3 antipathaires et 2 gorgonaires qualifiés de caractéristiques, la présence d’Antipathella subpinnata, Acanthogorgia hirsuta et de Paramuricea spp., mais aussi des scléractiniaires Dendrophyllia cornigera et Madrepora oculata , des spongiaires Poecillastra compressa et Hamacantha falcula, ainsi que des téléostéens Anthias anthias et Helicolenus dactylopterus.

Des fonds rocheux entre 200 et 600 m de profondeur caractérisés par des assemblages multispécifiques d’organismes dominés par des antipathaires (Antipathes dichotoma, Leiopathes glaberrima et Parantipathes labrix) et/ou des gorgonaires.

Biocénose de la roche du large (RL) (IV.3.5.)
Biocénose des roches bathyales (V.3.1.)
Faciès à Viminella flagellum (V.3.1.a.)
Faciès à Callogorgia verticillata (V.3.1.b.)
Faciès à Acanthogorgia hirsuta (V.3.1.c.)
"Faciès" des coraux profonds (V.3.1.d.)
"Faciès" des grandes éponges (V.3.1.e.)

Dans le haut de l’étage bathyal, entre 200 et 600 m de profondeur au niveau des têtes de canyons de Méditerranée française et de certains bancs rocheux. Ce « faciès » a en particulier été observé au niveau du canyon de Boucart, de Planier, de Cassidaigne, de Drammont et de Pampelonne, de Centuri nord et de Saint Florent (Fourt et Goujard, 2012 ; Fourt et al., 2013).
Antipathes dichotoma et Leiopathes glaberrima ont été observés en mer Tyrrhénienne où ces communautés ont pu être étudiées plus en détails (Bo et al., 2008, 2009, 2011, 2012, 2014 et 2015 ; Aguilar et Marín, 2013 ; Cau et al., 2014). Parantipathes larix est l’un des antipathaires les moins bien connu de Méditerranée mais deux forêts denses de cette espèce ont été observées entre 100 et 200 m de profondeur au sud-est de l’ile de Montecristo (Toscane, mer Tyrrhénienne ; Bo et al., 2014).

Les cnidaires coloniaux dressés qui forment ce « faciès » ont un rôle important pour la biodiversité profonde dans ces écosystèmes (Bo et al., 2008 ; 2009). Ils fournissent également des services écosystémiques (Aguilar et Marín, 2013). Une grande variété d’organismes sessiles et vagiles trouvent un refuge ou une source de nourriture dans ces « forêts » animales (Bongiorni et al., 2010 ; Cerrano et al., 2010). Ces forêts peuvent servir de nurserie à de nombreuses espèce (par ex. Leiopathes glaberrima pour les petites roussettes, Cau et al., 2014).

Pour l’Atlantique Nord-Est, ces habitats sont identifiés dans la "Liste des espèces et des habitats menacés et / ou en déclin» (Commission OSPAR, 2008) relative à la convention OSPAR (Conventions d'Oslo et de Paris pour la protection de l'environnement marin du Nord-Est Atlantique). La FAO (Food and agriculture organization) préconise de protéger les zones profondes contre les impacts de la pêche en créant des « sanctuaires » ou des zones de non prélèvement (FAO, 2009). Les antipathaires, ou « coraux noirs » sont également recherchés pour la fabrication de bijoux (Deidun et al., 2010).

Ce « faciès » étant riche en espèces associées d’intérêt commercial, il est soumis à de forts impacts de la pêche récréative et professionnelle profonde (Bo et al., 2015). Par des chalutages et/ou des engins de pêche perdus, ces organismes fixés profonds subissent de nombreux dommages comme la destruction partielle des colonies ou des arrachages complets (Bo et al., 2014 ; Mytilineou et al., 2014). Une pêche trop intensive engendrerait une diminution importante de ce faciès peu résilient, et aux espèces longévives à croissance lente. Ces espèces peuvent néanmoins être protégées contre l’action de la pêche par une topologie et une géomorphologie particulières du substrat. Ce phénomène a été observé au sud-ouest de la Sardaigne où des individus millénaires ont été observés et datés (Bo et al., 2015).
La Commission européenne a proposé des règlementations contre l'utilisation de la pêche au chalut et aux filets sur les écosystèmes des canyons sous-marines dans les eaux de la Méditerranée (European Commission, 2003). Des études complémentaires sur ce « faciès » profond permettraient de mieux cibler des actions de protection alliant préservation des fonctions écosystémiques et activités socio-économiques.

Palomba L., Chevaldonné P.

2016

La Rivière M., Michez N., Delavenne J., Andres S., Fréjefond C., Janson A-L., Abadie A., Amouroux J-M., Bellan G., Bellan-Santini D., Chevaldonné P., Cimiterra N., Derolez V., Fernez T., Fourt M., Frisoni G-F., Grillas P., Harmelin J-G., Jordana E., Klesczewski M., Labrune C., Mouronval J-B., Ouisse V., Palomba L., Pasqualini V., Pelaprat C., Pérez T., Pergent G., Pergent-Martini C., Sartoretto S., Thibaut T., Vacelet J., Verlaque M., 2021. Fiches descriptives des biocénoses benthiques de Méditerranée. UMS PatriNat éd., Paris : 660 pp. (Source)

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 Fourt, M., Goujard, A. & Bonhomme, D. 2013. Traitement des données acquises dans le cadre de la campagne « CORSEACAN » (têtes des canyons méditerranéens corses). Phase 2 – Boite 11. Agence des aires marines protégées, GIS Posidonie. 112 pp.

 Fourt, M., Goujard, A. & Bonhomme, D. 2013. Traitement des données acquises dans le cadre de la campagne « CORSEACAN » (têtes des canyons méditerranéens corses). Phase 2 – Boite 12. Agence des aires marines protégées, GIS Posidonie. 170 pp.

 Fourt, M., Goujard, A. & Bonhomme, D. 2013. Traitement des données acquises dans le cadre de la campagne « CORSEACAN » (têtes des canyons méditerranéens corses). Phase 2 – Boite 13. Agence des aires marines protégées, GIS Posidonie. 233 pp.

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