A1-7 - Grottes marines et surplombs médiolittoraux

Typologie nationale des habitats marins benthiques de la Manche, de la Mer du Nord et de l'Atlantique (NatHab-Atl)

Source de l'ajout à la typologie

L’habitat A1-7 Grottes marines et surplombs médiolittoraux a été ajouté dans la version 1 (Michez et al., 2013) de la typologie sous la codification P19.01 Grottes marines et surplombs intertidaux avec neuf sous-habitats. La codification devient P20.01 dans la version 2 (Michez et al., 2015) puis A1-7 dans la version 3 (Michez et al., 2019). Deux sous-habitats sont ajoutés dans la version 3 (A1-7.10 et A1-7.11) sur la base de EUNIS 2012.

Facteurs abiotiques

Etage : Médiolittoral ; Frange infralittorale supérieure
Nature du substrat : Roche
Répartition bathymétrique : >0m
Hydrodynamisme : Modéré à Fort
Salinité : Milieu marin
Température : Variable
Lumière : Variable
Régime trophique : Mésotrophe

Caractéristiques stationnelles

Les grottes de l’étage médiolittoral sont des anfractuosités de taille variable dans les falaises rocheuses de l’estran. Cela implique que tout ou une partie de la grotte est découverte à marée basse, découvrant les organismes qui s’y développent. Comme sur tous les estrans, ceux-ci sont dès lors potentiellement soumis aux variations de lumière, température, vent, taux d‘humidité (dessiccation), etc. En fonction de sa profondeur et de sa topographie, la grotte va jouer un rôle tampon plus ou moins fort vis-à-vis de ces facteurs en atténuant la lumière ainsi que les variations de température et d’humidité. Ces effets permettent à des espèces des étages inférieures (espèces subtidales ou « infralittorales »), de vivre en milieu intertidal. Ces espèces dites sciaphiles se retrouvent soit sur les parois rocheuses soit dans les cuvettes plus ou moins conséquentes qui peuvent tapisser le fond de la grotte. Elles cohabitent avec des espèces de niveaux plus élevés formant des assemblages d’espèces très originaux ne se rencontrant pas ailleurs.
Les surplombs rocheux (blocs cyclopéens, pics rocheux …) créant des abris conséquents face à la lumière directe et donc à la dessiccation font également partie de cet habitat. Ils impliquent qu’une partie de la roche reste à l’abri de la lumière toute au long de la journée, et sur une surface conséquente (plusieurs m²).

Variabilité

Les cortèges d’espèces associées vont varier en fonction d’une large gamme de paramètres : profondeur de l’anfractuosité, taille de l’ouverture, orientation de l’ouverture, orientation par rapport aux houles dominantes, écoulement d’eau douce, etc...
Niveau hypsométrique : le niveau hypsométrique de l’ouverture, la hauteur et/ou la largeur de celle-ci conditionnent la connexion avec les eaux marines, l’importance des échanges avec l’atmosphère et la pénétration de la lumière.
Taille de la grotte : la taille des grottes varie en fonction de la nature de la roche. De l’ordre du mètre pour les plus modestes (surplombs), celle-ci peut atteindre plusieurs dizaines de mètres de profondeur (jusqu’à atteindre la centaine de mètres). Ce facteur va déterminer la capacité de la grotte à atténuer la dessiccation, la lumière et à tamponner les variations de température.
La hauteur de plafond va également conditionner la présence ou l’absence de taxons d’origine terrestre. Ainsi les grottes qui sont totalement submergées à marées basse en sont dépourvues.
Orientation de la grotte : la pénétration de la lumière et donc de la chaleur dans la grotte dépend de l’orientation géographique de son ouverture (de façon caricaturale plein nord ou plein sud) et donc des espèces associées.
Nature de la roche : la nature de la roche, et en particulier sa perméabilité est un facteur de présence ou d’absence de certains organismes (microalgues, algues filamenteuses, lichens, faune fixée) qui ont besoin d’une texture de substrat particulière pour se développer.
Conditions hydrodynamiques : le régime hydrodynamique local, en particulier l’importance de la houle va conditionner la pénétration de l’eau marine dans la grotte et sa projection sur les parois et le plafond de la grotte. Celles qui sont les plus exposées aux houles du large sont aspergées jusqu’au plafond sur lesquels la faune marine peut se développer tandis que celles de milieux abrités hébergent souvent des plantes et de la faune d’origine terrestre en hauteur. Les sous-habitats de niveau trois sont décrits sur leur page INPN respective.

Communautés ou espèces caractéristiques

L’habitat A1-7 n’est pas caractérisé par une espèce ni par une communauté spécifique mais se reconnait visuellement par sa structure géomorphologique caractéristique.

Espèces associées

La liste des espèces associées aux grottes médiolittorale est conséquente et aucune d’entre elles n’est spécifique de cet habitat. Au contraire, elles sont communes dans les habitats subtidaux (ou parfois intertidaux) dans lesquelles elles trouvent leurs conditions d’existence optimales et sont souvent plus abondantes. Parmi elles, les plus remarquables sont les algues rouges Phymatolithon lenormandii, Hildenbrandia rubra, Peyssonnelia rubra, Hildenbrandia rivularis, Rhodochorton purpureum, Lomentaria articulata, Catenella caespitosa, Wahlenbergiana mucosa, Plumaria plumosa, Palmaria palmata, Mastocarpus stellatus, Osmundea pinnatifidaHymeniacidon perlevis, Halichondria (Halichondria) panicea, Terpios fugax, Clathrina coriacea, Myxilla (Myxilla) rosacea, Aplysilla rosea. Parmi les autres organismes encroûtants, les bryozoaires Microporella ciliata, Schizoporella spp., Electra pilosa dominent, tandis que les botrylles (Botryllus, Botrylloides) et autres ascidies coloniales (Didemnidae, Morchelium) apparaissent sporadiquement.
La diversité en anémones est élevée avec Sagartia elegans, Sagartia troglodytes, Urticina felina, Actinia fragacea, Cereus pedunculatus, Balanophyllia (Balanophyllia) regia, Corynactis viridis, Aulactinia verrucosa. Les polychètes Sabellla spallanzanii, Sabellaria alveolata, Spirorbis spp. et Spirobranchus spp. sont des habitants communs des grottes médiolittorales. De même, les mollusques Mytilus spp. et Patella spp. sont très courants, au même titre que les crustacés Ligia oceanica, Semibalanus balanoides, Perforatus perforatus et Pollicipes pollicipes. Il est possible de trouver dans les grottes une très large diversité d’organismes typiques de l’infralittoral mais cet aspect est très peu documenté.
Enfin les grottes peuvent abriter des espèces d’oiseaux nicheurs telles que le crave à bec rouge (Pyrrhocorax pyrrhocorax), le pigeon biset (Columba livia), le pipit maritime (Anthus petrosus), des chauve-souris comme le grand rhinolophe (Rhinolophus ferrumequinum) ou des plantes telles que la fougère trichomanès (Vandenboschia speciosa anciennement Trichomanes speciosum)

Dynamique temporelle

La dynamique temporelle de l’habitat « Grottes marines et surplombs médiolittoraux » est relativement méconnue. Néanmoins les rares données disponibles suggèrent une forte stabilité au cours du temps. D’un point de vue annuel, les variations observées concernent essentiellement les algues rouges situées à l’entrée des grottes qui sont plus abondantes en été. La faune quant à elle ne semble pas directement affectée par les saisons malgré les changements de température de l’eau apportée par la marée. D’un point de vue interannuel, les suivis disponibles ne montrent pas de variations fortes, le cortège d’espèces présent paraissant très stable

Habitats pouvant être associés ou en contact

L’habitat A1-7 peut être en contact avec les habitats suivants :
- A1-1 Roches ou blocs supralittoraux : en milieu exposé à très exposé en contact bathymétrique supérieur.
- A1-2 Roches ou blocs médiolittoraux à dominance algale : dans les zones plus abritées, contact de même niveau en mosaïque.
- A1-3 Roches et blocs médiolittoraux à dominance animale
- A1-4 Roches ou blocs médiolittoraux à très faible couverture macrobiotique : en contact de même niveau en mosaïque.
- A1-6 Cuvettes en milieu rocheux : en contact bathymétrique ou de même niveau en mosaïque.
- B1-6 Roches ou blocs infralittoraux à dominance animale : au niveau inférieur, en contact bathymétrique inférieur.

Confusions possibles

L’habitat A1-7 ne peut être confondu avec d’autres habitats. Toutefois, si les grottes sont aisément identifiées, la reconnaissance des surplombs peut être plus délicate et en tout état de cause, il se trouve en continuité directe avec les autres habitats rocheux du médiolittoral. Comme évoqué ci-dessus un surplomb rocheux est une structure conséquente qui empêche la lumière du soleil d’atteindre directement le sol, tamponne clairement la température et empêche la dessiccation des organismes fixés présents.

Répartition géographique

L’habitat est réparti sur l’ensemble des côtes rocheuses françaises présentant des fractures ou des variations abruptes de la nature de la roche. Il semble relativement rare en Mer du Nord et en Manche Orientale. Il est bien représenté en Manche occidentale, principalement sous la forme de surplombs. La mer d’Iroise recèle une grande richesse de grottes de toutes tailles (Ouessant, Presqu’ile de Crozon, Cap Sizun). La côte rocheuse du sud Bretagne, et en particulier les iles de Groix et Belle Ile, présente également un nombre important de grottes médiolittorales. Enfin le littoral de Charente et le Pays Basque présentent également des grottes de moindre importance.

Fonctions écologiques

Les grottes ne jouent pas de rôle écologique d’importance, hormis pour les oiseaux qui y nichent, les mammifères qui y hibernent et les plantes endémiques qu’elles abritent. Elles ont un rôle en enseignement en écologie marine pour leur valeur pédagogique dans la formation des étudiants. De par leur nature, elles constituent un patrimoine naturel important en tant qu’enclave du milieu subtidal dans un milieu qui découvre et se retrouve directement accessible à marée basse.

Statut de conservation

Au titre de la DHFF (92/43/CEE), cet habitat est inclus dans l’Habitat d’Intérêt Communautaire (HIC) 1170 « Récifs ». Il peut également correspondre à l’HIC 8330 « Grottes marines submergées ou semi-submergées » sous réserve de respect des critères d'identification de l'HIC (notamment de structure) et à l’HIC 1130 « Estuaires » ou l’HIC 1150 « Lagunes côtières » sous réserve de respect des critères d'identification géomorphologiques et de délimitation physiographiques de l'HIC.

Tendance évolutive

Aucune tendance évolutive n’est à noter pour cet habitat. Il faut noter néanmoins que les modifications de plans de houle dominants (à moyen terme) et le réchauffement climatique (à long terme) pourraient entraîner de profondes modifications dans les communautés abritées par la grotte.

Auteur(s)

Tauran A., Grall J.

Date de rédaction

2020

Bibliographie

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