41.31i - Forêts de la pénéplaine intérieure à sali, moni et tossopassa inselberg et savane-roche

Catalogue des habitats forestiers de Guyane (Guitet et al., 2015)

Description et situation dans le paysage

Cf. 41.31 : Ces habitats se rencontrent uniquement dans le sud de la Guyane, dans les vallées de la Waki, de la Camopi, de la Walani et de la Yaroupi, ainsi qu’aux alentours de Trois Saut, du mont Belvédère ou du mont Arawa. Un paysage similaire pourrait aussi être rencontré plus au nord-ouest dans la région de Mofina au nord des Abattis Kotika. Ce paysage « en creux » développé sur granitoïdes est caractérisé par des modelés très plats et inondables associés à des reliefs un peu plus marqués mais de faible amplitude et aux versants doux. Encadrés par des hauts-reliefs ou des plateaux élevés, ces régions apparaissent comme des dépressions intérieures couvrant l’essentiel de la pénéplaine méridionale et du corridor central Waki-Inini. Ce grand type se confond avec l’habitat ordinaire 41.31, cependant une formation remarquable se singularise dans la plaine de la Waki, (voir habitat 41.31d) dont l’extension ne semble pas dépasser 10% de la surface totale du type générique. Ces régions n’ont été jusqu’à présent que peu explorées. Cependant, les placettes botaniques installées précédemment sur les mêmes paysages (Trois-Saut et Arawa) confirment les caractéristiques décrites ici (D. Sabatier, comm. pers.).

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : Les inselbergs et savanes-roches ont été modelés à la faveur de granites à gros grains riches en minéraux peu altérables (quartz et mica blanc) et mis à nu par l’érosion de surface. Ces affleurements granitiques sont particulièrement fréquents au sein des forêts de plateaux réguliers et irréguliers (type de paysage E et F : 55% des inselbergs recensés), dans les paysages de montagnes où ils forment des pains de sucre impressionnants (35%), dans une moindre mesure sur quelques collines isolées au sein des reliefs multi-concaves et sous forme de petits affleurements de faible extension sur la plaine côtière.

Conditions stationnelles

Cf. 41.31 : Sols dominants : arenosols et arenics acrisols à drainage superficiel ou tendance hydromorphe.

Arenosols : texture : argile 10-15% ; sables 70-90%, homogène ; composition : MO : 2-3% en surface ; P total : <0,1% ; CEC : 3-4 cmolc/kg. ; aspect : couleur jaunâtre en profondeur et brun pâle en surface. Parfois des djougoung-pété en surface.

Arenics acrisols : texture : sables 50-80%, limons 10-35% ; composition : idem ; aspect : Moins sableux et plus limoneux en profondeur - taches d’hydromorphie.

Les sols rencontrés sont très majoritairement des acrisols sableux accompagnés d’arenosols, caractérisés par une fraction sableuse très importante, dépassant 70% sur la totalité ou une grande partie du profil.

Ces sols qui logiquement devraient être très drainants de par leur texture peuvent cependant montrer des indices d’hydromorphie temporaire et de lessivage. La présence de djougoung-pété (micro-dépressions), marque particulièrement cette tendance. Ces micro-dépressions qui peuvent atteindre un mètre de profondeur, laissent apparaître des horizons de galets quartzeux en fond de cuvette, marqueurs d’épisodes alluvionnaires anciens. On y trouve aussi épisodiquement des pisolithes dont l’origine est indéterminée. L’ensemble de ces critères suggère qu’un processus de podzolisation est en cours sur cette couverture pédologique très drainante. À noter, la rareté des Rapateaceae, dans le sud de la Guyane. Cette famille ne peut donc pas être utilisée comme un indicateur d’hydromorphie sur cette partie de la Guyane.

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : À proximité des affleurements les sols s’amincissent rapidement et deviennent plus sableux dans les derniers horizons au contact de la roche-mère jusqu’à former un leptosol (sol squelettique ayant moins de 25 cm de profondeur ou moins de 20% de terre fine dans les 75 premiers cm).

Structure et physionomie forestière

Cf. 41.31 : Les forêts hautes des reliefs multi-concaves ne dépassent guère 30 m de hauteur et sont relativement ouvertes par de nombreux petits chablis et par le caractère semi-décidu plus marqué de ce couvert forestier (ouvertures temporaires dans la canopée au rythme des défoliations). La surface terrière de cet habitat est significativement plus faible que toutes les autres avec à peine plus de 20 m²/ha, du fait de la rareté des gros bois.

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : Contrairement aux autres forêts basses qui présentent une forte densité de petits arbres, on observe une diminution de la densité globale du peuplement d’arbres (<130 tiges/ha) qui se répercute sur la surface terrière (7 à 17 m²/ha maximum). La canopée peut-être assez haute en fonction de la profondeur des sols (~27 m en moyenne) mais reste très ouverte. Les palmiers de sous-bois sont peu nombreux (10 - 120 pieds/ha maximum).

Lorsque la hauteur dominante diminue sous le seuil des 15 m, les arbres de plus de 20 cm de diamètre disparaissent et la végétation est dominée par une formation sèche, poussant sur un sol sableux et pauvre formé par les produits d’altération du granite et l’accumulation de débris végétaux fixés par un chevelu racinaire dense et superficiel. Elle s’étend sur une bande plus ou moins large en fonction des conditions du milieu et de la dynamique forestière. Ce milieu est caractérisé par un grand nombre d’espèces arbustives ou de petits arbres, à port buissonnant et à troncs multiples. On retrouve dans ce milieu quantités d’épiphytes en raison de nombreux supports inclinés, de l’humidité ambiante élevée et de l’éclairement relativement important.

Composition taxonomique

Cf. 41.31 : Essences forestières : C’est l’extrême abondance des Burseraceae qui marque principalement ce paysage (¼ à ⅓ des individus). Cet effet s’explique par la conjonction d’une forte densité de sali (Tetragastris spp.) - trait déjà noté par Sabatier et Prévost sur le site Trois Saut – accompagné de moni (Protium spp.). Les Myristicaceae sont aussi très abondantes (10%), principalement le tossopassa (Iryanthera spp.) - autre trait vérifié sur les inventaires botaniques réalisés par Sabatier et collègues sur le site Arawa. Parmi les Mimosoideae, on note, en plus des Ingas spp., des abondances significatives de tamalin (Abarema spp.), de kabanafo (Abarema curvicarpa), et d'assao (Balizia pedicellaris). Le carapa (Carapa spp.) est aussi significativement abondant sur ces paysages.

Flore du sous-bois : Le sous-bois est très perturbé et caractéristique des forêts ouvertes avec de nombreuses espèces héliophiles ou associées aux forêts dégradées (ex : Phenakospermum guyannense, Scleria secans, Banara guianensis) une forte densité de petites tiges d’arbres et d’importants enlianements.

Faune : Tortues terre (Chelonoidis denticulata), marails (Penelope marail), singes saimiris (Saimiri sciureus) et sakis (Pithecia pithecia), ortalides (Ortalis motmot) et grands tinamou (Tinamus major) constituent le groupe indicateur de ces paysages. Dix espèces au total sont préférentiellement associées à ce milieu qui abrite la plus grande diversité de grands vertébrés pour la Guyane, et la plus forte abondance globale, toutes espèces confondues (20 observations/10 km, à Yaroupi). Ces paysages semblent particulièrement peu favorables aux hoccos, et les tapirs y ont été rarement observés.

L'habitat particulier sur djougoung-pété associé à ce type principal se distingue aussi du point de vue faunistique (voir habitat 41.31d).

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : Essences forestières : Si les stades arbustifs constituent des îlots de composition très typée au sommet et sur les flancs des reliefs (abondances de Clusiaceae et de Myrtaceae), les formations arborées qui font transition ne montrent pas quant à elles de franche modification de composition par rapport à la flore locale. On note cependant parmi les espèces d’arbres pouvant se développer sur ces sols squelettiques à tendance xérique, certaines familles a priori mieux adaptées car plus abondantes telles que les Combretaceae, les Malvaceae, les Mimosoideae, les Sapotaceae et les Urticaceae. Parmi les palmiers, on note parfois la présence de Syagrus (S. inajai en lisière et surtout S. stratincola en fourrés denses).

Flore du sous-bois : Les lianes et les Bromeliaceae terrestres se font plus abondantes à mesure que le sol s’amincit et que les arbres se raréfient, notamment les espèces du complexe Pitcairnia (P. cremersii dans le centre, P. saxosa dans le sud-est et P. geyskesii dans le sud-ouest), et l’ananas sauvage (Ananas ananassoides et parguazensis) toutes protégées. Ces milieux pourraient constituer des refuges pour des espèces reliques des forêts sèches et des savanes qui étaient probablement beaucoup plus étendues lors des épisodes les plus secs du quaternaire.

Enjeux de biodiversité

Cf. 41.31 : Fort (diversité de la faune)

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : Fort (originalité de la flore)

Enjeux de production de bois

Cf. 41.31 : Faible (potentiel et exploitabilité)

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : Faible (potentiel et exploitabilité)

Enjeux biomasse et carbone

Cf. 41.31 : Moyen

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : Faible

Enjeux de protection des sols et des paysages

Cf. 41.31 : Moyen

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : Fort (fréquentation des paysages)

Fréquence du type forestier

Cf. 41.31 : 8%

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : <0,5%

Protection du type forestier

Cf. 41.31 : 66%

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : ~80%

Intégration dans les ZNIEFF de type 1

Cf. 41.31 : 3%

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : n.d.

Intégration dans les ZNIEFF de type 2

Cf. 41.31 : 18%

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : n.d.

Bibliographie

 Guitet S., Brunaux O., de Granville J. J., Gonzalez S. & Richard-Hansen C., 2015. Catalogue des habitats forestiers de Guyane. DEAL Guyane, 120 p. (Source)