41.51i - Forêt des plateaux réguliers à moni, angélique et patawa sur inselberg et savane-roche

Catalogue des habitats forestiers de Guyane (Guitet et al., 2015)

Description et situation dans le paysage

Cf. 41.51 : Ces plateaux se rencontrent dans le massif central et dans le sud de la Guyane en position de haut de bassin (Hautes vallées de la Mana, de l’Approuague, du Grand Inini, de la Mataroni et de la Noussiri, du Tampok, de l’Inipi – Mont Saint-Marcel, Mont Chauve) ou en piedmont du synclinorium sud (Camopi, Petit Inini). Ils présentent des modelés réguliers, rabotés, à dénivelés modérés de l’ordre de 50-60 m avec des versants peu marqués. La couverture pédologique est très homogène et dominée par les types ferralsols bien drainés. Les inselbergs et savanes-roches sont particulièrement fréquents sur ce type de paysage.

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : Les inselbergs et savanes-roches ont été modelés à la faveur de granites à gros grains riches en minéraux peu altérables (quartz et mica blanc) et mis à nu par l’érosion de surface. Ces affleurements granitiques sont particulièrement fréquents au sein des forêts de plateaux réguliers et irréguliers (type de paysage E et F : 55% des inselbergs recensés), dans les paysages de montagnes où ils forment des pains de sucre impressionnants (35%), dans une moindre mesure sur quelques collines isolées au sein des reliefs multi-concaves et sous forme de petits affleurements de faible extension sur la plaine côtière.

Conditions stationnelles

Cf. 41.5 : Sols dominants : ferralsols typiques à drainage vertical libre ou ralenti.
Ferralsols : texture : argile 55-65%, sable 30-35% ; homogène ; composition : MO : 3-5% en surface, P total : 0,2-0,6%, CEC : 9-11 cmolc/kg ; aspect : jaunâtres, homogènes, bien structurés, horizon de surface souvent plus sableux.

Les sols sont remarquablement homogènes, depuis le plateau jusqu’au bord même des criques. On observe en dehors des bas-fonds une couverture continue de ferralsols généralement profonds, peu chargés en éléments grossiers, argileux à argilo-sableux sur tout le profil, arborant une couleur plutôt jaunâtre et très homogène jusqu’en profondeur (ferralsols xanthiques = jaune). Leur CEC est légèrement supérieure aux acrisols (9-10 cmolc/kg) mais le taux de saturation en bases échangeables est très faible (<10%) : ces sols sont donc beaucoup plus pauvres chimiquement que les ferralsols de montagne (voir fiche 41.6). À leur avantage, le drainage y est profond et libre, parfois ralenti en profondeur mais jamais bloqué. L’enracinement est par conséquent très profond. La seule contrainte rencontrée par la végétation réside dans la pauvreté chimique et un éventuel stress hydrique en saison sèche, mal évalué.
À proximité des savanes-roches ou des lits de rivières temporaires (talwegs secs) le sol s’amincit sur quelques mètres et devient plus sableux dans les derniers horizons au contact de la roche-mère.

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : À proximité des affleurements les sols s’amincissent rapidement et deviennent plus sableux dans les derniers horizons au contact de la roche-mère jusqu’à former un leptosol (sol squelettique ayant moins de 25 cm de profondeur ou moins de 20% de terre fine dans les 75 premiers cm).

Structure et physionomie forestière

Cf. 41.5 : La canopée haute d’environ 35 à 40 m est généralement bien fermée. Les grands palmiers notamment les Oenocarpus et Astrocaryum sont bien présents en sous-étage (12 à 25 tiges/ha). Les très gros bois sont fréquents (6 à 8 tiges pour les diamètres supérieurs à 80 cm) et la surface terrière des peuplements est importante (24 à 25 m²/ha). On estime que moins de 2% de ces types forestiers ont été perturbés au cours des dernières décennies. Les perturbations devraient cependant augmenter au cours des prochaines années du fait de l’ouverture de nouvelles zones d’exploitation sur ces habitats très attractifs en termes de ressource forestière (notamment dans le secteur Régina - Saint-Georges-de-l'Oyapock).

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : Contrairement aux autres forêts basses qui présentent une forte densité de petits arbres, on observe une diminution de la densité globale du peuplement d’arbres (<130 tiges/ha) qui se répercute sur la surface terrière (7 à 17 m²/ha maximum). La canopée peut-être assez haute en fonction de la profondeur des sols (~27 m en moyenne) mais reste très ouverte. Les palmiers de sous-bois sont peu nombreux (10 - 120 pieds/ha maximum).

Lorsque la hauteur dominante diminue sous le seuil des 15 m, les arbres de plus de 20 cm de diamètre disparaissent et la végétation est dominée par une formation sèche, poussant sur un sol sableux et pauvre formé par les produits d’altération du granite et l’accumulation de débris végétaux fixés par un chevelu racinaire dense et superficiel. Elle s’étend sur une bande plus ou moins large en fonction des conditions du milieu et de la dynamique forestière. Ce milieu est caractérisé par un grand nombre d’espèces arbustives ou de petits arbres, à port buissonnant et à troncs multiples. On retrouve dans ce milieu quantités d’épiphytes en raison de nombreux supports inclinés, de l’humidité ambiante élevée et de l’éclairement relativement important.

Composition taxonomique

Cf. 41.51 : Outre l’omniprésence de l’angélique (>10 tiges/ha en moyenne), cet habitat se caractérise par l’abondance significative dans le sous-étage de moni (Protium spp.) et de Bita tiki (Diospyros spp.) accompagnés du niamboka (Pouteria spp.) et du boco (Bocoa prouaencis). Les palmiers (Arecaceae) sont très abondants dans la canopée (>20 tiges/ha) et particulièrement le patawa (Oenocarpus bataua). Les gros bois sont aussi très fréquents dans cet habitat (plus de 33 tiges /ha en moyenne). Le grignon franc (Sextonia rubra) et le chawari (Caryocar glabrum), deux espèces commerciales produisant de très gros bois, sont aussi particulièrement abondants mélangés au goupi (Goupia glabra) et au wacapou (Vouacapoua americana) favorisés par les positions topographiques de plateau, dominantes dans ce paysage. La conjonction d’une structure diamétrique favorable aux gros bois, d’une composition riche en espèces commerciales majeures et de conditions d’exploitation aisées donne sans conteste à cet habitat un potentiel de production très important en termes sylvicoles.

Les pécaris (Pecari tajacu) sont plus présents dans ce type de forêt (ainsi que sur les plateaux élevés) qui est au contraire peu favorable aux agamis (Psophia crepitans) et aux capucins bruns (Cebus apella).

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : Essences forestières : Si les stades arbustifs constituent des îlots de composition très typée au sommet et sur les flancs des reliefs (abondances de Clusiaceae et de Myrtaceae), les formations arborées qui font transition ne montrent pas quant à elles de franche modification de composition par rapport à la flore locale. On note cependant parmi les espèces d’arbres pouvant se développer sur ces sols squelettiques à tendance xérique, certaines familles a priori mieux adaptées car plus abondantes telles que les Combretaceae, les Malvaceae, les Mimosoideae, les Sapotaceae et les Urticaceae. Parmi les palmiers, on note parfois la présence de Syagrus (S. inajai en lisière et surtout S. stratincola en fourrés denses).

Flore du sous-bois : Les lianes et les Bromeliaceae terrestres se font plus abondantes à mesure que le sol s’amincit et que les arbres se raréfient, notamment les espèces du complexe Pitcairnia (P. cremersii dans le centre, P. saxosa dans le sud-est et P. geyskesii dans le sud-ouest), et l’ananas sauvage (Ananas ananassoides et parguazensis) toutes protégées. Ces milieux pourraient constituer des refuges pour des espèces reliques des forêts sèches et des savanes qui étaient probablement beaucoup plus étendues lors des épisodes les plus secs du quaternaire.

Enjeux de biodiversité

Cf. 41.51 : Moyen

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : Fort (originalité de la flore)

Enjeux de production de bois

Cf. 41.51 : Très fort

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : Faible (potentiel et exploitabilité)

Enjeux biomasse et carbone

Cf. 41.51 : Fort

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : Faible

Enjeux de protection des sols et des paysages

Cf. 41.51 : Faible

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : Fort (fréquentation des paysages)

Fréquence du type forestier

Cf. 41.51 : 12%

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : <0,5%

Protection du type forestier

Cf. 41.51 : 39%

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : ~80%

Intégration dans les ZNIEFF de type 1

Cf. 41.51 : 2%

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : n.d.

Intégration dans les ZNIEFF de type 2

Cf. 41.51 : 30%

Forêts sur savanes-roches et inselbergs : n.d.

Bibliography

 Guitet S., Brunaux O., de Granville J. J., Gonzalez S. & Richard-Hansen C., 2015. Catalogue des habitats forestiers de Guyane. DEAL Guyane, 120 p. (Source)