57a - Quercetea pubescentis Doing-Kraft ex Scamoni & H. Passarge 1959

Prodrome des végétations de France décliné (PVF2)

Synécologie

Forêts caducifoliées, xéroclinophiles à xérophiles, généralement thermophiles. Elles sont largement répandues à l’étage supraméditerranéen de la France méridionale (jusque dans les Cévennes), avec des irradiations septentrionales, planitiaires à submontagnardes, sur les stations les plus sèches de la vallée du Rhône, des plateaux calcaires du Nord-Est et du Bassin parisien (jusqu’en Belgique). Présentes également de l’étage planitiaire à submontagnard des régions sous climat d’abri (Limagnes auvergnates, côtes de Bourgogne, plaine d’Alsace), du secteur ligérien, de l’Entre-deux-Mers, ainsi que dans le Périgord, le Quercy, le Poitou et jusqu’au piémont pyrénéen. Dans les secteurs septentrionaux, hors climat d’abri, on ne rencontre ces forêts que sur les stations les plus xérothermophiles (corniches rocheuses d’exposition sud, haut d’adret, crêtes) sur des sols très superficiels et riches en éléments grossiers, souvent issus de roches carbonatées, plus rarement sur substrat incluant des éléments siliceux comme à Fontainebleau. Elles sont en revanche relativement indifférentes au substrat dans les régions au climat chaud (surtout dans le sud de l’aire de répartition). On les observe en effet en situation acidiphile à calcaricole, parfois sur sols assez profonds dans les secteurs au climat le plus sec et chaud (c’est par exemple le cas des chênaies-charmaies du Carpinion betuli).

Nom cité du syntaxon

Quercetea pubescentis Doing-Kraft ex Scamoni & H. Passarge 1959 (Arch. Forstwes. 8 : 415-416).

Synonymes

Quercetea pubescentis Doing-Kraft 1955 nom. inval. (art. 2b, 8) ; Quercetea pubescentis Oberd. (1948) 1957 nom. inval. (art. 2b, 3b, 8) [3] ; Quercetea pubescenti-petraeae (Oberd. 1948) Jakucs 1960 nom. superf. (art. 29c) ; Quercetea petraeo-pubescentis Lakušić et al. 1979 nom. inval. (art. 2b, 8) ; Peucedano-Quercetea robori-petraeae (Oberd. 1948) Doing 1955 em. H. Passarge 1968 nom. superf. (art 29a) ; Quercetea petraeo-cerridis Lakušić et al. 1979 p.p. (2b, 5, 8)[3] ; Querco robori-Fagetea sylvaticae Braun-Blanq. & Vlieger in Vlieger 1937 p.p. ; syn. syntax. : Quercetea pubescenti-petraeae Jakucs 1960.

[3] : La classe des Peucedano oreoselini-Quercetea robori-petraeae H. Passarge 1968 est en outre proposée en synonyme dans l’EVC. Selon Boeuf (com. pers.), il pourrait s’agir pour partie d’une autre classe, de pineraies-chênaies pédonculées psammophiles riches en espèces des Koelerio glaucae-Corynephoretea canescentis Klika in Klika et V. Novak 1941.

Type nomenclatural

Quercetalia humilis Klika 1933 [syn. Quercetalia pubescenti-petraeae Klika 1933 nom. mut. propos. Chytrý 1997].

Physionomie

Il s’agit de peuplements souvent clairs et entrecoupés de petites clairières plus ou moins stables présentant des espèces des Trifolio medii-Geranietea sanguinei T. Müll. 1962 et des Festuco valesiacae-Brometea erecti Braun-Blanq. & Tüxen ex Braun-Blanq. 1949. Les arbres sont souvent mal venants et de faible hauteur, avec une croissance lente du fait des contraintes hydriques importantes. L’absence ou la grande rareté du Hêtre (Fagus sylvatica) est naturelle et non d’origine anthropique. Elle est liée à un blocage de la dynamique végétale d’ordre climatique, en lien avec des influences méditerranéennes ou un climat d’abri, ou stationnel. Rameau (1996) estime que le Hêtre « apparaît » au dessus de 600 à 650 mm/an de précipitations et qu’il devient réellement concurrentiel au-delà de 750 mm/an. Lebourgeois (2005) précise que la précocité de cette sécheresse (printemps et de début d’été) est particulièrement défavorable au Hêtre. La strate supérieure (arborée ou arbustive haute) est constituée de Quercus pubescens, parfois Q. petraea ou plus fréquemment de leur hybride Q. xstreimeri, accompagnés, de nombreuses rosacées arbustives ou arborescentes (Pyrus communis subsp communis, P. communis subsp. pyraster, Malus sylvestris, Sorbus domestica, S. latifolia, S. mougeotii, S. torminalis, S. aria). Sorbus aria et Acer campestre sont très fréquents et souvent recouvrants dans la classe, mais transgressent dans les classes voisines des Quercetea robori-petraeae et des Carpino betuli-Fagetea sylvaticae. À ces espèces s’ajoutent des différentielles de certains ordres : Carpinus betulus, Quercus robur, Fraxinus ornus, Ostrya carpinifolia, Acer monspessulanum, A. opalus et Quercus ilex, cette dernière transgressive des Quercetea

Combinaison caractéristique d'espèces

Scamoni & Passarge 1959 (in Boeuf 2014) citent les espèces suivantes comme caractéristiques de classe : Acer campestre, Quercus petraea, Q. pubescens, Sorbus domestica, Ligustrum vulgare, Viburnum lantana, Campanula trachelium, Carex montana, Festuca ovina subsp. ovina, Helleborus foetidus, Hypericum montanum, Lathyrus niger, Buglossoides purpureocaerulea, Melittis melissophyllum, Orchis purpurea, Polygonatum odoratum, Betonica officinalis, Viola alba, V. hirta, V. mirabilis. L’analyse statistique des syntaxons issus des anciens Querco robori-Fagetea sylvaticae, sur la base des colonnes de fréquences issues de 14.063 relevés phytosociologiques, permet de nuancer cette liste en ajoutant des espèces et en précisant lesquelles transgressent dans les classes voisines.

Les espèces suivantes peuvent être considérées comme de bonnes caractéristiques de classe, relativement transversales et transgressant peu dans les classes voisines, ce qui permet, notamment, de les distinguer de celles des Cephalanthero damasonii-Fagetalia sylvaticae Rameau ex R. Boeuf & J.-M. Royer in R. Boeuf 2014 : en plus de Buglossoides purpureocaerulea, Hypericum montanum, Lathyrus niger, Orchis purpurea, Quercus pubescens Sorbus domestica, Viola alba, V. hirta et V. mirabilis, retenues par Scamoni & Passarge (1959), il est possible d’ajouter Berberis vulgaris, Brachypodium pinnatum, Clinopodium vulgare, Cytisophyllum sessilifolium, Geranium sanguineum, Origanum vulgare, Quercus xstreimeri [4], Rosa canina, Coronilla varia (rare). Ces espèces sont souvent communes avec les Trifolio-Geranietea sanguinei (Geranium sanguineum, Clinopodium vulgare, Hypericum montanum, Origanum vulgare…), qui constituent les ourlets de ces forêts. Elles pénètrent facilement dans les peuplements du fait d’un couvert clair, alors qu’elles restent cantonnées aux lisières ou aux trouées dans les hêtraies des Cephalanthero damasonii-Fagenalia sylvaticae, plus fermées.

On peut ajouter comme bonnes caractéristiques de classe Acer opalus, Carex montana, Campanula trachelium, C. persicifolia, Cephalanthera longifolia, C. damasonium, Cornus mas, Digitalis lutea, Fragaria viridis, Helleborus foetidus, Hippocrepis emerus, Juniperus communis, Laserpitium latifolium, Melittis melissophyllum, Polygonatum odoratum, Primula veris, Prunus mahaleb, Rhamnus cathartica, Rubia peregrina, Sesleria caerulea, Betonica officinalis, Sorbus aria, Teucrium chamaedrys et Vincetoxicum hirundinaria. Ces espèces se retrouvent dans les Hêtraies calcicoles sèches des Cephalanthero damasonii- Fagetalia sylvaticae, où elles sont de bonnes différentielles par rapport aux autres ordres de la classe, non thermophile (voir Renaux et al. 2020d). Quant à Acer campestre, Daphne laureola, Anemone hepatica, Ligustrum vulgare, Viburnum lantana, taxons cités comme caractéristiques par Scamoni & Passarge 1959, ils transgressent beaucoup dans les forêts mésophiles voisines (notamment sur substrat calcaire), et ne sont donc pas de bonnes caractéristiques. Buxus sempervirens est dans le même cas, mais l’espèce peut toutefois être retenue comme caractéristique de certaines alliances. Des espèces à aire de répartition méditerranéo-atlantique comme Ruscus aculeatus et Dioscorea communis sont des compagnes de haute fréquence, mais se retrouvent largement dans les hêtraies voisines.

Certaines espèces sont davantage caractéristiques de certains ordres ou d’alliances (voir plus loin), et sont de bonnes différentielles par rapport aux hêtraies thermophiles dans lesquelles on ne les trouve que rarement. On peut citer notamment : Amelanchier ovalis, Anthericum liliago, Asplenium onopteris, Berberis vulgaris, Buphthalmum salicifolium, Campanula medium, C. persicifolia, Carex humilis, Cyclamen hederifolium, Cytisophyllum sessilifolium, Erica arborea, Fragaria viridis, Genista germanica, G. pilosa, G. tinctoria, Pilosella officinarum, Inula conyza, Laburnum anagyroides, Lathyrus niger, L. venetus, Lonicera etrusca, Origanum vulgare, Potentilla micrantha, Ranunculus lanuginosus, Hylotelephium telephium, Silene nutans, Trifolium rubens, T. alpestre, T. medium, Tanacetum corymbosum, Viola mirabilis.

La flore est marquée d’une manière générale par l’abondance des espèces thermophiles et xérophiles et par l’absence des espèces affines des hêtraies des Fagetalia sylvaticae Tüxen in Bärner 1931. Parmi ces dernières, avec Fagus sylvatica, on peut citer notamment Galium odoratum, Luzula sylvatica, Oxalis acetosella, Phyteuma spicatum ou Rubus idaeus qui demeurent dans les hêtraies xérocalcaricoles des Cephalanthero damasonii-Fagenalia sylvaticae Rameau ex R. Boeuf & J.-M. Royer in R. Boeuf 2014 (ce qui permet de différencier cet ordre de la classe des Quercetea pubescentis), ainsi que d’autres espèces comme Dryopteris dilatata, Epilobium montanum, Paris quadrifolia, Primula elatior et Sambucus racemosa. Le Houx (Ilex aquifolium) est fortement lié à aux hêtraies dans la partie septentrionale de l’aire des Quercetea pubescentis, mais se retrouve dans les chênaies pubescentes supraméditerranéennes du Buxo sempervirentis-Quercenion pubescentis, notamment les plus fraîches (ubacs, vallons encaissés).

[4] En dehors du bassin méditerranéen, sur les stations thermoxérophiles au sein des étages collinéen et montagnard inférieur, la présence de Quercus pubescens a probablement été exagérée dans les relevés. De nombreuses mentions de cette espèce dans les relevés des syntaxons septentrionaux pourraient correspondre en réalité à l’hybride Q. ×streimeri.

Bibliographie

 Renaux B., Timbal J., Gauberville C., Boeuf R., Thébaud G., Bardat J., Lalanne A., Royer J.-M. & Seytre L., 2019. Contribution au prodrome des végétations de France : les Quercetea pubescentis Doing-Kraft ex Scamoni & H. Passarge 1959. Doc. phytosoc., série 3, 10 : 41-136. (Source)