Typologie nationale des habitats marins benthiques de la Manche, de la Mer du Nord et de l'Atlantique (NatHab-Atl)

L’habitat B6-1 Vases sableuses infralittorales non eutrophisées était présent dans la version 1 de la typologie (Michez et al., 2013) sous le code M10.01.01 et la même dénomination que dans la version 3 de la typologie (Michez et al., 2019). Seuls les sept premiers sous-habitats (B6-1.1 à B6-1.7) existaient dans les versions 1 et 2 de la typologie (Michez et al., 2013, 2015) ; six nouveaux sous-habitats ont été créés ou sont issus d’évolution typologique dans la version 3 (B6-1.8 à B6-1.13).

Etage : Infralittoral
Nature du substrat : Vases sableuses
Répartition bathymétrique : 0-20 m environ [Dépend de la pénétration de la lumière, ce qui est très variable selon les sites. S’étend jusqu’où l’intensité lumineuse est compatible avec la vie des macrophytes photophiles]
Hydrodynamisme : Faible à modéré
Salinité : Milieu marin [sous influence estuarienne en période de crue]
Température : Cyclotherme saisonnier
Lumière : Système phytal, eaux turbides
Régime trophique : Mésotrophe à eutrophe

Vases sableuses de la zone infralittorale, à des profondeurs de moins de 20 mètres généralement, retrouvées dans les secteurs abrités des vagues et des houles et où les courants de marée sont faibles. Ces conditions sont observables dans les baies, les bras de mer, les rades, les milieux portuaires, à proximité des estuaires ou encore dans les pertuis du littoral atlantique. Les sédiments sont composés d’un ratio sable:vase compris entre 1:9 et 1:1 et sont soumis à une sédimentation active de matériaux fins provenant en majorité des fleuves et dans une moindre mesure de l’érosion côtière. La faune endogée comprend une grande diversité de polychètes dont ceux de la famille des Maldanidae, un grand nombre d’amphipodes tubicoles avec les Ampelisca et les Haploops ainsi que des bivalves déposivores et suspensivores. Des pennatulaires et des ophiures peuvent être présentes mais en moins forte abondance que dans les eaux plus profondes du circalittoral.

La variabilité est principalement liée à l’intensité de sédimentation des particules fines, directement dépendante des apports fluviaux et de l’hydrodynamisme local (courants du large, côtiers, de marée, houle et vents). Les apports en sable dépendent également de l’hydrodynamisme ainsi que de l’érosion côtière. En fonction de ces différentes variables, le substrat est plus ou moins cohésif, chargé en matière organique et oxygéné. Tous ces facteurs conditionnent le type de faune en présence.
Treize sous-habitats sont identifiés selon les espèces qui les caractérisent. Les autres espèces en association dépendent des localités et des facteurs de variabilités. Parmi eux, cinq sont tirés de la typologie EUNIS (Bajjouk et al., 2015) :
- B6-1.1 Vases sableuses infralittorales à Nephtys hombergii et Limecola balthica
- B6-1.2 Vases sableuses infralittorales à Sagartiogeton undatus et Ascidiella aspersa
- B6-1.3 Vases sableuses infralittorales à Kurtiella bidentata et Abra spp.
- B6-1.4 Vases sableuses infralittorales à Melinna palmata avec Magelona spp. et Thyasira spp.
- B6-1.5 Vases sableuses infralittorales à Ampelisca spp., Photis longicaudata et autres amphipodes tubicoles et polychètes

Les huit sous-habitats restants ont été ajoutés par les experts de la façade « Atlantique ». Trois d'entre eux, habitats remarquables au sud des côtes de Bretagne, sont décrits dans leurs fiches respectives

L’habitat B6-1 ne se reconnait pas par des espèces caractéristiques mais par la bathymétrie et le type de substrat.

Dans le cadre de cette fiche, les espèces associées ont été définies comme les espèces les plus fréquemment citées dans la littérature pour cet habitat.

Les vases infralittorales, souvent localisées à proximité de systèmes estuariens, peuvent subir des variations de salinité en période de crue. L’environnement marin fait que la salinité ne descend néanmoins pas en-dessous de 30 PSU. Etant située à de faibles profondeurs, elles sont également confrontées à une variabilité thermique d’une amplitude de 10°C maximum sur l’année, ce qui caractérise l’étage infralittoral. La sédimentation des particules fines et de la matière organique a majoritairement lieu en période estivale, lorsque les courants marins sont plus calmes. La quantité d’apport de matière organique détermine la teneur en oxygène du substrat et le type de biocénose, plus ou moins opportuniste. Bien que les vases sableuses s’établissent dans des milieux protégés et soient stables de manière générale, un remaniement des sédiments peut avoir lieu lors des tempêtes hivernales.

L’habitat B6-1 peut potentiellement être en contact avec les habitats suivants (liste non-exhaustive) :
En contact supérieur avec les habitats médiolittoraux :
- A2-1 Récifs de moules (moulières) médiolittoraux
- A2-2 Récifs d'huîtres médiolittoraux
- A4-1 Sédiments hétérogènes envasés médiolittoraux marins
- A4-2 Sédiments hétérogènes envasés médiolittoraux en milieu à salinité variable
- A5-4 Sables fins envasés médiolittoraux
- A5-3 Sables fins médiolittoraux
- A5-5 Sables médiolittoraux en milieu à salinité variable
- A5-6 Herbiers à Zostera noltei sur sables médiolittoraux
- A5-7 Herbiers à Zostera marina sur sables médiolittoraux
- A6-1 Vases médiolittorales marines
- A6-4 Herbiers à Zostera noltei sur vases médiolittorales

En contact de même niveau bathymétrique ou en association avec :
- B1 Roches ou blocs infralittoraux (et ses déclinaisons)
- B2-1 Récifs de moules (moulières) infralittoraux
- B2-2 Récifs d'huîtres infralittoraux
- B2-3 Récifs de polychètes tubicoles infralittoraux
- B4-1 Sédiments hétérogènes infralittoraux
- B4-2 Sédiments hétérogènes infralittoraux en milieu à salinité variable
- B4-3 Bancs de maërl sur sédiments hétérogènes envasés infralittoraux
- B4-4 Herbiers à Zostera marina sur sédiments hétérogènes infralittoraux
- B5-1 Sables fins à moyens mobiles infralittoraux
- B5-2 Sables fins propres infralittoraux
- B5-3 Sables fins envasés infralittoraux
- B5-4 Sables mobiles infralittoraux en milieu à salinité variable
- B5-5 Herbiers à Zostera marina sur sables infralittoraux
- B5-6 Herbiers à Ruppia maritima sur sables infralittoraux
- B6-2 Vases sableuses infralittorales eutrophisées
- B6-3 Vases infralittorales
- B6-4 Vases infralittorales en milieu à salinité variable

En contact inférieur avec les habitats circalittoraux :
- C2-1 Récifs de Mytilidae (moulières) du circalittoral côtier
- C2-2 Récifs de polychètes tubicoles du circalittoral côtier
- C4-1 Sédiments hétérogènes circalittoraux côtiers
- C5-2 Sables fins propres ou envasés circalittoraux côtiers
- C6-1 Vases sableuses circalittorales côtières
- C6-2 Vases circalittorales côtières

Confusion possible avec l’habitat B6-3 Vases infralittorales selon l’appréciation de la granulométrie du sédiment sur le terrain. Des analyses bio-sédimentaires complètes en laboratoire pourront permettre de distinguer les deux habitats.
Dans les sites potentiellement pollués, il peut y avoir confusion avec l’habitat B6-2 Vases sableuses infralittorales eutrophisées en fonction du degré et de l’étendue du phénomène de pollution.
Une confusion d’ordre altitudinale peut aussi avoir lieu avec les habitats A6-1 Vases médiolittorales marines et C6-1 Vases sableuses circalittorales côtières. Le relevé des coordonnées GPS couplé aux cartes marines permet de faire la distinction.
En limite d’estuaire, cet habitat peut être facilement confondu avec l’habitat B6-4 Vases infralittorales en milieu à salinité variable.

Les vases sableuses infralittorales sont représentées depuis la rade du port de Calais jusqu’au large de l’estuaire de la Gironde. Elles sont présentes dans la grande majorité des baies et des rades de toute la façade ainsi qu’au large de la plupart des estuaires du Golfe de Gascogne. En Manche, leur établissement est moins systématique au large des estuaires du fait de courants de marée importants (système macro- ou mégatidal). Elles sont aussi bien représentées dans le Golfe du Morbihan et dans les pertuis charentais.

Les vases sableuses correspondant à des milieux relativement stables, certaines espèces d’amphipodes ou de polychètes peuvent s’établir en forte densité et monopoliser les ressources spatiales et trophiques durant plusieurs générations. Les peuplements benthiques de cet habitat résultent ainsi de successions écologiques caractéristiques de ces sédiments à forte stabilité physico-chimique. 
Les poissons démersaux et benthiques tels que le bar et la sole ainsi que certains crustacés de la mégafaune exploitent cet habitat comme zone de nourricerie.

Au titre de la DHFF (92/43/CEE), l’habitat B6-1 peut correspondre à l’HIC 1130 « Estuaires », à l’HIC 1150 « Lagunes côtières » ou à l’HIC 1160 « Grandes criques et baies peu profondes » sous réserve de respect des critères d'identification géomorphologiques et de délimitation physiographiques de l'HIC. Il peut également correspondre à l’HIC 8330 « Grottes marines » sous réserve de respect des critères d’identification de l’HIC (notamment de seuil de taille).

L’état écologique de cet habitat dépend de la qualité des eaux provenant des bassins versants. Dans les zones régulièrement soumises à des phénomènes d’eutrophisation, cet habitat est susceptible d’évoluer en habitat B6-2 Vases sableuse infralittorales eutrophisées, avec l’établissement d’une faune opportuniste caractérisée par les polychètes Capitellidae.

Latry L., Blanchet H.

2020

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