9110-1 - Hêtraies, hêtraies-chênaies acidiphiles collinéennes

Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats

Caractéristiques stationnelles

Étage collinéen (au-dessous de 500 m-600 m).
Dans toutes les situations topographiques : plateaux, replats, versants diversement exposés, dépressions.
Roches mères siliceuses, limons à silex ; limons dégradés (à horizon supérieur blanchi).
Litière épaisse avec feuilles entières, feuilles fragmentées et le plus souvent une couche de matière organique tachant les doigts (horizon OH), (plus rarement feuilles entières et feuilles fragmentées seulement : mull oligotrophe, mull moder).
Sols pauvres en éléments minéraux et acides, pouvant présenter parfois un engorgement plus ou moins accentué (sur limons dégradés) (sols bruns acides, sols de la série podzolique, sols
lessivés, sols lessivés engorgés).

Variabilité

Variations de plusieurs ordres compte tenu de l’importance de l’aire de répartition de l’habitat.

Variations d’ordre géographique :
- race des Ardennes, sur schistes avec sols fréquemment engorgés ;
- race des basses Vosges, sur grès ou sur granite ;
- race de l’Argonne sur gaize ;
- race des plateaux calcaires du nord-est (dont les premiers plateaux du Jura) sur limons à chailles ;
- race des Alpes externes du nord (peu de données actuellement) sur divers substrats, avec la Luzule des neiges (Luzula nivea).

Variations d’ordre altitudinal :
- forme collinéenne (< 400 m) ;
- forme du collinéen supérieur (entre 400 m et 500 m) avec une dynamique plus forte du Hêtre et la présence parfois du Prénanthe pourpre (Prenanthes purpurea).

Variations selon l’acidité, la richesse en éléments nutritifs :
- variante moyennement acidiphile (optimum de la Luzule blanchâtre) ;
- variante acidiphile à Canche flexueuse ;
- variante très acidiphile à Myrtille.

Variations selon les réserves en eau :
- variante légèrement sèche sur versant chaud ;
- variante mésophile ;
- variante fraîche avec Houlque molle (Holcus mollis) ;
- variante sur sols engorgés en profondeur.

Physionomie, structure

Peuplements dominés par le Hêtre (Fagus sylvatica) accompagné du Chêne sessile (Quercus petraea).
Strate arbustive peu fournie : Bourdaine (Frangula alnus).
Strate herbacée plus ou moins recouvrante selon la variante.

Confusions possibles

Avec des chênaies sessiliflores installées sur des crêtes et des sols superficiels pierreux (absence du Hêtre) ;
Avec des hêtraies montagnardes acidiphiles à Luzule blanchâtre (présence d’espèces montagnardes abondantes : Prénanthe pourpre, le Séneçon de Fuchs (Senecio fuchsii)…).

Dynamique

Spontanée :
Landes à Genêt à balais (Cytisus scoparius).
Phase pionnière à Bouleau verruqueux (Betula pendula) ou à Chêne pédonculé (Quercus robur) sur landes ou fruticées.
Stade de maturité représenté par la hêtraie.
Dynamique en cas de perturbations naturelles créant des ouvertures dans la strate arborescente :
- petites trouées —› cicatrisation par le Hêtre ;
- grandes trouées —› cicatrisation par le Chêne sessile ;
- ou apparition de la phase pionnière à Bouleau ou à Chêne pédonculé.

Liée à la gestion :
Peuplements gérés de composition diverses :
- hêtraies pures (phase de maturité) ;
- chênaies pures (parfois en taillis) (phase transitoire) ;
- hêtraies-chênaies avec une proportion variable entre les deux essences ;
- chênaies-boulaies, chênaies-tremblaies résultant d’une surexploitation ;
- transformations par plantations de Pin sylvestre (Pinus sylvestris), de Douglas (Pseudotsuga menziesii), d’Épicéa (Picea abies), de Mélèze d’Europe (Larix decidua) où les essences potentielles peuvent s’installer peu à peu.

Sur sols engorgés temporairement, la dégradation peut conduire à des chênaies pédonculées transitoires à Molinie bleue (Molinia coerulea) ou Crin végétal (Carex brizoides) (dégradation réversible, quoique parfois difficilement).

Habitats associés ou en contact

Chênaies sessiliflores sur sols superficiels (éperons rocheux, hauts d’adret).
Forêts riveraines sur alluvions récentes (UE : 91E0*).
Hêtraies-chênaies acidiclines à neutrophiles de bas de versant (UE : 9130).
Chênaies pédonculées acidiclines de fond de vallon (UE : 9160).
Pelouses préforestières à Agrostide vulgaire (Agrostis capillaris), Canche flexueuse, Houlque molle…
Végétation de trouées, chablis ou coupes à Digitale pourpre (Digitalis purpurea), Épilobe en épi (Epilobium angustifolium), Canche flexueuse.
Végétation de fente de rochers (UE : 8210).
Végétation d’éboulis siliceux (UE : 8120).

Répartition géographique

Habitat largement répandu dans le nord-est et l’est de la France :
Ardennes (jusqu’à l’Avesnois), est du Morvan, Argonne, plateaux calcaires jurassiques (limons à chailles), plateau lorrain, dépressions périvosgienne, morvandelle, Alsace, basses Vosges, premiers plateaux du Jura, Bresse, Alpes du nord…

Valeur écologique et biologique

Habitat typique du domaine continental très répandu dans certaines régions (Ardennes, basses Vosges…), ne présentant pas de caractère de rareté ; en général en bon état de conservation.
La plupart des espèces du cortège floristique sont banales.

États de conservation

États à privilégier :
Hêtraie, hêtraie avec Chêne sessile en futaie régulière ou irrégulière.
Chênaie sessiliflore en futaie régulière ou irrégulière.

Autres états observables :
Phases pionnières à Bouleau ou Chêne pédonculé.
Plantations de Pin sylvestre, Douglas, Épicéa, Mélèze d’Europe.
Taillis de Chêne sessile (dégradation liée aux pratiques des siècles derniers), taillis de Hêtre.
Chênaies-boulaies, chênaies-tremblaies.

Tendances et menaces

Habitat étendu sur des surfaces importantes dans le nord-est de la France, ne paraissant pas menacé.
Les surfaces qui pourraient être couvertes par l’habitat tendent à augmenter avec la déprise agricole.
Vulnérabilité des variantes très acidiphiles vis-à-vis de la répétition de plantations d’Épicéa ou de Pin sylvestre.
Vulnérabilité des variantes sur sols engorgés vis-à-vis des coupes de grande taille.

Potentialités intrinsèques de production

Hêtre avec sylviculture dynamique tout au long de la vie du peuplement :
- qualité décroissante avec l’accroissement de l’acidité du milieu ;
- régénération naturelle parfois difficile en cas d’humus trop acide.
Chêne sessile sur les sols les moins acides (bonne qualité envisageable).
Douglas, Épicéa si possible en mélange avec le Hêtre (Mélèze d’Europe en mélange).

Axes de recherche

Inventaire en vue de préciser la répartition de l’habitat dans les Alpes externes du nord.
Impacts des enrichissements en fonction des essences, de leur densité et des modalités d’introduction.
Impacts du maintien d’arbres surannés, dépérissants ou morts sur des populations de saproxylophages (nombre d’arbres nécessaire - seuil - effets de seuil -).
Futaie irrégulière, futaie mixte : développer les critères de faisabilité (guides de sylviculture, etc.) permettant cette option.

Bibliographie

 Bensettiti F., Rameau J.-C. & Chevallier H. (coord.), 2001. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 1 - Habitats forestiers. Volume 1. MATE/MAP/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 339 p. + cédérom. (Source)