9190-1 - Chênaies pédonculées à Molinie bleue

Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats

Caractéristiques stationnelles

Type d’habitat très largement répandu à l’étage collinéen surtout (plus rarement en montagnard : Ardennes) ; souvent ponctuel et de faible étendue spatiale.
Occupe des dépressions, des cuvettes concentrant les eaux de ruissellement ; ou installé sur des matériaux s’imbibant fortement d’eau et la retenant.
Sols très engorgés dès la surface ; décomposition de la matière organique souvent bloquée —› horizon humifère ; sols développés sur limons dégradés, limons sableux, sables verts du Crétacé.
Sols acides, pauvres (pseudogleys, planosols).

Variabilité

Très grande variabilité géographique :
- race continentale avec Crin végétal (Carex brizoides), Myrtille ;
- race nord-atlantique avec Bruyère à quatre angles (Erica tetralix);
- races sud-atlantiques avec Brande (Erica scoparia), Peucédan de France (Peucedanum gallicum), Blechne en épi (Blechnum spicant).

Variations liées à la richesse en éléments minéraux :
- variante acidiphile marqué ;
- variante mésoacidiphile à acidiphile modéré.

Variations liées à l’engorgement se traduisant :
- sur les sols les plus engorgés par un tapis de Molinie avec touradons ;
- sur les sols un peu moins engorgés par la Molinie sans touradons.

Physionomie, structure

Peuplements toujours très ouverts de Chêne pédonculé court (plus rarement avec Chêne sessile), accompagné des Bouleaux, du Tremble.
Strate arbustive limitée : Bourdaine, Saule à oreillettes, Chèvrefeuille, Callune…
Tapis herbacé constitué par des peuplements continus de Molinie bleue.
Strate muscinale très disséminée (Polytric élégant, Sphaignes…).

Confusions possibles

Avec les chênaies à Molinie de sols non trop engorgés (les traces d’hydromorphie ne sont pas visibles dans l’horizon supérieur) formées par la dégradation de hêtraies-chênaies sessiliflores après des erreurs sylvicoles (coupes trop fortes, non suivies de régénération occasionnant une remontée de la nappe : phénomène réversible).

Dynamique

Spontanée :
Dépressions engorgées avec tapis à Molinie ou landes --> Installation de la Bourdaine, du Saule à Oreillettes --> Phase pionnière forestière à Bouleaux --> Installation de Chêne pédonculé.

Liée à la gestion :
- Futaie plus ou moins claire de Chêne pédonculé.
- Chênaie-boulaie, boulaie de dégradation.
- Plantation de Pin sylvestre, de Pin maritime.
Une chênaie sessiliflore, une hêtraie-chênaie de sols plus ou moins engorgés peut par dégradations fortes (coupes trop intensives…) donner une chênaie pédonculée à Molinie sans que le phénomène puisse être réversible.

Habitats associés ou en contact

Bas marais acides avec divers habitats.
Aulnaies-boulaies marécageuses acidiphiles.
Hêtraies-chênaies acidiphiles (UE : 9110, UE : 9120).
Boulaies tourbeuses (UE : 91D0*).
Landes sèches (UE : 4030).
Landes humides (UE : 4010).

Répartition géographique

Très largement répandu à l’étage collinéen atlantique du Nord au Pays basque.
Ardennes, Argonne, pourtour des Vosges, Jura, plaine de Saône, Bresse, Dombes, Bas-Dauphiné en continental.

Valeur écologique et biologique

Habitat qui occupe une assez faible étendue malgré son aire très vaste.
Flore relativement banale.
Fossés et ornières peuvent être intéressants pour les Amphibiens.

États de conservation

États à privilégier :
- Vraies chênaies pédonculées en futaie.
- Chênaie-boulaie.

Autres états observables :
- Boulaies.
- Plantations de Pin sylvestre, de Pin maritime.
Attention à la confusion avec les formes de dégradation à Molinie de chênaies sessiliflore ou hêtraies-chênaies (où les traces d’hydromorphie n’apparaissent pas depuis la surface).

Tendances et menaces

Surface réduite mais stable.
Évolution très lente suite à des reconquêtes forestières sur prairies, landes humides.
Enrésinement avec le Pin sylvestre (toute l’aire), le Pin maritime (sud-ouest).

Potentialités intrinsèques de production

L’habitat considéré correspond à la marge extrême des situations stationnelles.
Fertilité faible à très faible. Valeur forestière quasi nulle.
Les contraintes édaphiques limitent assez fortement les possibilités d’évolution forestière.
Les positions topographiques correspondent souvent à des situations collectrices d’eau expliquant l’absence, ou la très faible efficacité, du drainage naturel et donc de l’évacuation de l’eau. L’engorgement est souvent prononcé, les périodes d’ennoiement fréquentes.
Outre la pauvreté des sols, les conditions d’enracinement sont mauvaises :
- sur planosol : l’existence d’un plancher et d’une nappe perchée limitent la prospection racinaire et indirectement la nutrition minérale ;
- sur pseudogley : l’imbibition capillaire entraîne des nécroses racinaires, néfastes au développement optimal des essences forestières.
Chêne pédonculé : sensible aux variations de régime hydrique. La productivité est en général médiocre mais c’est l’essence qui permettra au mieux dans l’ensemble de mettre en valeur cette station.
L’engorgement superficiel parfois prolongé ne convient pas aux essences les plus sensibles : Hêtre, Douglas ; quand elle est très proche de la surface, la nappe de printemps empêche un enracinement optimal des jeunes arbres et les rend sensibles à la sécheresse estivale.

Axes de recherche

Information et vulgarisation auprès des gestionnaires de critères de reconnaissance de l’habitat pour éviter les confusions fréquentes avec des formes de dégradation de hêtraies-chênaies (correspondant à des erreurs sylvicoles ou des reconquêtes spontanées du Chêne pédonculé sur divers types de station exprimant son comportement pionnier).
Inventaires à poursuivre pour préciser l’aire géographique et la diversité écologique de ce type d’habitat ; il serait peut-être possible d’individualiser plusieurs associations végétales (-).

Bibliographie

 Bensettiti F., Rameau J.-C. & Chevallier H. (coord.), 2001. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 1 - Habitats forestiers. Volume 1. MATE/MAP/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 339 p. + cédérom. (Source)