Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats

Étages subalpin et alpin (1600-2700 m).
Dépressions et replats à enneigement assez prolongé, ainsi que pentes modérées à plus accusées (10-35°), préférentiellement aux expositions fraîches.
Substratum calcaire ou schisteux.
Sol frais et humide (voire même engorgé en profondeur), de type rendzine brunifiée ou sol brun, à mull de pH très variable (5,37,8), mais le plus souvent décarbonaté et acidifié en surface.

Diversité typologique en rapport avec l’altitude, la distribution géographique et la localisation topographique :
- à l’étage subalpin, dans les Préalpes septentrionales (et le haut Jura), sur pentes très humides, pré à Laîche ferrugineuse [Caricetum ferrugineae], avec le Trolle d’Europe (Trollius europaeus) et la Grande Astrance (Astrantia major) ;
- à l’horizon subalpin supérieur ainsi que dans l’alpin (2 000- 2700 m), dans l’ensemble des Alpes et principalement au niveau des replats et dépressions : pelouse à Fétuque violacée et Trèfle de Thal [Festuco violaceae-Trifolietum thalii] ;
- à l’horizon subalpin inférieur (1 700-2 100), dans les Préalpes et les Alpes méridionales, principalement sur les pentes d’ubacs, pelouse à Pâturin violacé et Alchémille à folioles soudées [Poo violaceae-Alchemilletum conjunctae], se présentant parfois sous l’aspect de pré-bois.

Pelouses denses, d’un vert foncé brillant, ou plus rarement formation prairiale à hautes herbes (type à Laîche ferrugineuse).
Recouvrement rarement inférieur à 100 %.
Composition floristique riche et diversifiée, à prédominance d’hémicryptophytes (surtout Poacées et Légumineuses).
Pour le type à Pâturin violacé et Alchémille à folioles soudées, possibilité de maintien sous couvert du Mélèze (Larix decidua) en peuplement clair, induisant une formation de type pré-bois [subass. laricetosum deciduae], avec localement réimplantation de l’Épicéa (Picea abies).

Par son abondance en hautes herbes (Trolle d’Europe, Grande Astrance, Gentiane jaune, etc.), le type à Laîche ferrugineuse s’apparente physionomiquement aux prairies grasses à Trisète jaunâtre (Trisetum flavescens) et Renouée bistorte (Polygonum bistorta) [Polygono bistortae-Trisetion flavescentis, code UE : 6520] ou même à certains faciès de mégaphorbiaies [Adenostylion alliariae, code UE : 6430].
Pour les deux autres types (pelouse à Fétuque violacée et Trèfle de Thal, pelouse à Pâturin violacé et Alchémille à folioles soudées), confusion éventuelle (en raison d’un lot commun d’espèces : Alchémille glaucescente, Laîche toujours verte, Pâturin violacé, etc.) avec certaines pelouses du Caricion curvulae [code Corine : 36.34], en particulier avec celles à Fétuque de Haller (Festuca halleri) [Festucetum halleri] développées sur substratum carbonaté [subass. caricetosum sempervirentis], et avec lesquelles elles sont d’ailleurs parfois en contact.

Spontanée :
Caractère sub-permanent du type à Laîche ferrugineuse.
Évolution très lente du type à Fétuque violacée et Trèfle de Thal, par acidification, vers les pelouses à Fétuque de Haller [Festucetum halleri subass. caricetosum sempervirentis, cf. ci-dessus].
Pour le type à Pâturin violacé et Alchémille à folioles soudées, tendance à l’enrésinement progressif, en particulier par le Mélèze, entraînant un passage au stade pré-bois [subass. laricetosum deciduae] et, à long terme, à la forêt d’Épicéa sur lande à Éricacées [Piceetum subalpinum, code UE : 9410].

Liée à la gestion :
En certains secteurs (Alpes méridionales), la fréquence et l’intensité du pâturage (parfois encore exceptionnellement la fauche) sur ces herbages de qualité limitent la tendance à la reforestation (pelouse à Pâturin violacé et Alchémille à folioles soudées).
Pour les deux types de pelouse (à Fétuque violacée et Trèfle de Thal, à Pâturin violacé et Alchémille à folioles soudées), possibilité d’évolution localisée (petites dépressions) vers des nardaies [Nardion strictae, code UE : 6230*] en conditions de pacage intense.

Bas-marais à Laîche de Davall (Carex davalliana) [Caricetum davallianae, code Corine : 54.23].
Combes à neige à saules rampants [Arabidion caeruleae, code Corine : 36.12].
Pelouses calcicoles méso-xérophiles à Seslérie bleuâtre [Seslerion caeruleae, code UE : 6170].
Pelouses acidiclines à acidiphiles à Fétuque de Haller [Festucetum halleri, code Corine : 36.34].
Pelouses acidiphiles à Nard raide (Nardus stricta) [Nardion strictae, code UE : 6230*].
Mélézeins et pessières [Piceion excelsae, code UE : 9410].

Pré à Laîche ferrugineuse : massifs préalpins septentrionaux (de la Chartreuse au Chablais).
Pelouse à Fétuque violacée et Trèfle de Thal : ensemble des Alpes et Préalpes calcaires.
Pelouse à Pâturin violacé et Alchémille à folioles soudées : Alpes et Préalpes méridionales (du Queyras aux Alpes ligures).

Principalement liée à la densité, voire à l’exubérance (tendance prairiale) de ces pelouses, ainsi qu’à leur composition floristique riche et diversifiée.
Le type à Laîche ferrugineuse offre des stations riches en orchidées diverses, dont la Gymnadénie moucheron (Gymnadenia conopsea), la Listère ovale (Listera ovata), espèces protégées (convention de Washington).
Le type à Pâturin violacé et Alchémille à folioles soudées, à caractère méridional, constitue le biotope de prédilection de la Fritillaire de Moggridge (Fritillaria tubiformis subsp. moggridgei), espèce protégée en Provence-Alpes-Côte d’Azur.

États à privilégier :
Pour le type à Laîche ferrugineuse, les stations prairiales relativement rares dans les Alpes françaises (par rapport aux Alpes suisses).
Autres états observables :
Pour le type à Laîche ferrugineuse : état fragmentaire pionnier, succédant aux éboulis colluviaux fins et humides à Pétasite paradoxal (Petasites paradoxus) [Petasition paradoxi, code UE : 8120].
Pour les deux types de pelouse à Fétuque violacée et Trèfle de Thal, à Pâturin violacé et Alchémille à folioles soudées : états intermédiaires, plus ouverts (recouvrement pouvant s’abaisser à 50 %), avec les pelouses plus sèches à Seslérie bleuâtre [Seslerienion caeruleae, code UE : 6170].

Habitat offrant actuellement une relative stabilité, hormis le type à Pâturin violacé et Alchémille à folioles soudées dans certains secteurs des Alpes méridionales marqués par la déprise pastorale (tendance à la réimplantation progressive de l’Épicéa sous le couvert du Mélèze).

Ces pelouses constituent donc un élément important du pastoralisme.
Cet habitat regroupe une grande partie des pelouses mésophiles des étages subalpin et alpin des Alpes méridionales.
Il s’agit dans tous les cas de pelouses à l’aspect de prairies denses et vigoureuses, riches en espèces, où graminées et légumineuses dominent ; très appétentes, de bonne qualité mais de faible production, elles comptent parmi les meilleures pelouses d’altitude.
À l’étage alpin, les espèces qui constituent l’habitat sont très tardives (fin juillet-début août) et le cycle de végétation y est court, en particulier pour les pelouses de l’étage alpin soumises à un enneigement assez long, l’habitat est donc faiblement productif. Généralement très appétentes (plus particulièrement sur les reliefs de combes et plateau), ces pelouses offrent un pâturage idéal pour les quartiers d’août.

Impact des pratiques pastorales sur la nidification du Tétras-lyre et du Lagopède alpin ; mesures de gestion à mettre en œuvre pour le maintien du couvert de Mélèze.

 Bensettiti F., Boullet V., Chavaudret-Laborie C. & Deniaud J. (coord.), 2005. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 4 - Habitats agropastoraux. Volume 1. MEDD/MAAPAR/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 445 p. + cédérom. (Source)