Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats
Essentiellement à l’étage subalpin (1 600-2 200 m d’altitude), parfois aussi à l’horizon supérieur de l’étage montagnard et à l’horizon inférieur de l’étage alpin.
Températures moyennes annuelles comprises entre 3 et 8 °C.
Précipitations moyennes annuelles supérieures à 1 400 mm ; saison sèche n’excédant pas un mois et atténuée par des nébulosités ; quatre à huit mois d’enneigement suivant l’altitude et les années.
Sols tourbeux (tourbe à Cypéracées et Poacées) installés sur des substrats siliceux et dont l’épaisseur varie de 30 cm à 8 m, le pH de 4 à 6.
Variabilité principale suivant l’altitude et la position géographique. Compte tenu de leur intrication étroite et de leur mosaïquage fréquent et généralement difficilement dissociable avec les pelouses méso-hygrophiles de cet habitat, les pelouses hygrophiles (ou bas-marais) à caractère plus hydromorphe et de niveau topographique plus bas, ont été associées à cet habitat et considérées comme des variations topographiques secondaires des différents types reconnus :
- à l’étage montagnard supérieur, surtout dans le massif du San Petrone : pelouse à Ophioglosse des Açores et Nard raide [Ophioglosso azorici-Nardetum strictae] ; en conditions plus hydromorphes, passage à la pelouse à Dactylorhize à sac et Laîche hérisson [Dactylorhizo sacciferae-Caricetum echinatae] , souvent développée linéairement le long des ruisselets ;
- à l’étage montagnard des massifs méridionaux de l’Incudine, les communautés précédentes sont remplacées par la pelouse à Laîche intriquée et Renoncule à feuilles cordées [Carici intricatae-Ranunculetum cordigeri] représentée en conditions mésohygrophiles par la sous-association à Sagine poilue (Sagina pilifera) [subass. saginetosum piliferae] et, en situation hygrophile, par la sous-association à Renoncule à feuilles cordées (Ranunculus cordiger) [subass. ranunculetosum cordigeri] ;
- à l’étage subalpin et alpin des grands massifs centraux de la Corse, l’habitat est bien développé dans les pozzines avec la pelouse à Laîche intriquée [Caricetum intricatae] représentée en conditions méso-hygrophiles par la sous-association à Plantain sarde (Plantago sarda) [subass. plantaginetosum sardae] (5) et, en situation hygrophile, soit par la sous-association à Laîche intriquée (Carex nigra subsp. intricata) [subass. caricetosum intricatae] dans les zones très humides à eau peu mobile, soit par le bas-marais à Grassette de Corse et Trichophore gazonnant [Pinguiculo corsicae-Trichophoretum cespitosi] dans des conditions d’eau ruisselante, proche floristiquement du type précédent, mais où dominent le Trichophore gazonnant (Trichophorum cespitosum) et la Grassette de Corse (Pinguicula corsica). Une variation de ce bas-marais sur substrats plus rocailleux est marquée par la présence de Narthécie de Reverchon (Narthecium reverchonii) et de Laîche des régions froides (Carex frigida) [subass. narthecietosum reverchonii].
Communautés méso-hygrophiles :
-presque toujours : pelouses rases extrêmement broutées ; le Nard raide (Nardus stricta) ne constitue pas un refus pour les troupeaux corses, hautes de 5-10 cm et offrant un recouvrement toujours proche de 100 % ;
-dans les pozzines, toujours disposées en mosaïque avec les pelouses hygrophiles à Laîches ;
-dans les pozzines anciennes en voie d’assèchement, les pelouses méso-hygrophiles à Nard raide constituent les surfaces les plus importantes ; dans les pozzines moins évoluées, ce sont les pelouses hygrophiles à Laîches qui dominent, parfois très largement.
Communautés hygrophiles :
-pour la pelouse à Laîche intriquée et la pelouse à Laîche intriquée et Renoncule à feuilles cordées : pelouses rases, extrêmement broutées, hautes de 5-10 cm, le plus souvent dominées par la Laîche intriquée et offrant un recouvrement toujours proche de 100 % ;
-pour le bas-marais à Grassette de Corse et Trichophore gazonnant : tapis herbacé en brosse raide, en raison de la dominance du Trichophore gazonnant ; peu brouté, le Trichophore gazonnant est souvent couché et orienté vers l’aval par le ruissellement.
En Corse, les pozzines ne peuvent être confondues avec d’autres types d’habitats, leur physionomie permettant de les repérer sans ambiguïté dans le paysage.
Au sein des pozzines, les pelouses méso-hygrophiles sont disposées en mosaïque avec les pelouses hygrophiles à Laîches et s’en distinguent toujours par la dominance du Nard raide qui leur confère une teinte d’un vert moins sombre.
Cet habitat corse présente des affinités certaines avec des habitats similaires des Pyrénées ou des Alpes, mais les quelques taxons endémiques présents permettent de les en distinguer.
Spontanée :
Groupements permanents liés à des sols tourbeux humides. Tant que l’humidité persiste, l’évolution est peu probable ; dans le cas contraire, certaines évolutions sont décelables.
À l’étage montagnard, la pelouse à Dactylorhize à sac et Laîche hérisson peut évoluer à long terme par assèchement du sol, vers la pelouse à Ophioglosse des Açores et Nard raide, ensuite vers les fruticées puis les forêts montagnardes (hêtraies, sapinières).
À l’étage subalpin, les pelouses hygrophiles peuvent évoluer par assèchement vers les pelouses méso-hygrophiles riches en Nard raide, ensuite vers des fruticées à Genévrier nain (Juniperus sibirica) et Épine-vinette de l’Etna (Berberis aetnensis), puis vers les aulnaies à Aulne odorant (Alnus alnobetula subsp. suaveolens), ou directement vers ces dernières.
À la base de l’étage alpin, les groupements précédents peuvent évoluer vers des pelouses moins humides appartenant au Sedo alpestris-Phleion brachystachyi [code UE : 6170].
Liée à la gestion :
Actuellement ces groupements de pozzines sont fréquentés régulièrement et parfois de façon intense, par des troupeaux essentiellement d’ovins. Ceci joue certainement un rôle dans leur maintien en place en les empêchant d’évoluer vers des fruticées ou des forêts ; c’est tout particulièrement évident à l’étage montagnard.
À l’étage montagnard : -pelouses à Sagine poilue et Laîche du printemps, Carex caryophyllea (Sagini piliferae-Caricetum caryophylleae) [Caricion caryophyllae, code UE : 6170] ; -fruticées à Épine-vinette de l’Etna et Genêt de Salzmann, Genista salzmannii (Berberido aetnensis-Genistetum lobelioidis) [Anthyllidion hermanniae, code UE : 4090] ; -hêtraies et sapinières (Poo balbisii-Fagetum sylvaticae subass. fagetosum sylvaticae et subass. abietetosum albae, code Corine : 42.14) [Galio rotundifolii-Fagenion sylvaticae].
Aux étages subalpin et alpin : -pelouses du Sedo alpestris-Phleion brachystachyi [code UE : 6170] ; -fruticées à Genévrier nain et Épine-vinette de l’Etna ; -aulnaies odorantes (Alnetum suaveolentis, code Corine : 31.612).
Pelouse à Ophioglosse des Açores et Nard raide et pelouse à Dactylorhize à sac et Laîche hérisson : bien développée dans les massifs de faible altitude (massif du San Petrone, massif de Tenda, montagne de Cagna) ; aussi présente plus ponctuellement dans les grands massifs.
Pelouse à Laîche intriquée : grands massifs (du Cinto au Renoso) où se situent les plus grandes et belles pozzines de Corse (Nino, pozzi du Renoso).
Pelouse à Laîche intriquée et Renoncule à feuilles cordées : surtout fréquente au sud du Monte Renoso (col de Verde, Cuscione, val d’Asinau).
Habitat endémique de Corse où figurent d’assez nombreuses plantes endémiques ainsi que des espèces rares (dont trois espèces du Livre rouge national, tome I, indiquées « ° ») : ° Aconit de Corse, Bellium des neiges, ° Botryche simple, ° Botryche à feuilles de matricaire, Grassette de Corse, Menthe de Requien, Narthécie de Reverchon, Ophioglosse des Açores, Pâquerette de Bernard, Renoncule à feuilles cordées, Véronique rampante.
États à privilégier :
Les divers états altitudinaux et géographiques déjà cités de ces nardaies et pelouses hygrophiles sont à conserver.
Autres états observables :
Aucun.
L’assèchement et l’envahissement progressif des pozzines par des forêts ou des aulnaies sont une possibilité évolutive probable dans certains cas, en particulier en cas de déprise pastorale s’accentuant.
Inversement, certaines pratiques pastorales récentes comme le pâturage de porcins dans certaines pozzines (Nino), peuvent être la cause de destructions et d’érosions très dommageables. La fréquentation humaine excessive peut conduire aux mêmes phénomènes ou à une rudéralisation (Melo, Nino…).
Pelouses très largement pâturées en été par les troupeaux corses, le Nard raide ne constituant pas un refus.
Paysage très apprécié du public, d’où une valorisation économique indirecte par le tourisme.
Absence de données.
Bensettiti F., Boullet V., Chavaudret-Laborie C. & Deniaud J. (coord.), 2005. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 4 - Habitats agropastoraux. Volume 1. MEDD/MAAPAR/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 445 p. + cédérom. (Source)