6440-1 - Prairies hygrophiles continentales de fauche

Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats

Caractéristiques stationnelles

Étage planitiaire.
Climat subcontinental.
Roches mères de type alluvions basiques.
Topographie en dépression dans les grandes vallées fluviales (en France : grand ried du Rhin alsacien, plus spécialement « Ried noir ») induisant une inondation importante par remontée hivernale de nappe.
Sols hydromorphes fortement carbonatés, plutôt bruts (pauvres en humus).
Prairies semi-naturelles traitées en fauche, traditionnellement jusque deux fois par an.

Variabilité

Variabilité très faible : prairie à Sélin douteux (Kadenia dubium) et Violettes des grandes vallées (surtout Viola pumila et V. elatior) [Cnidio dubii-Violetum pumilae], avec Gratiole officinale (Gratiola officinalis)…, variant selon le niveau topographique - variation très hygrophile à Pâturin des marais (Poa palustris), Pigamon jaune (Thalictrum flavum), Iris faux-acore (Iris pseudacorus)… [sous-association poetosum palustris] - et le degré d’intensification - variation à Fromental (Arrhenatherum elatius) et Pâquerette (Bellis perennis) [sous-association arrhenatheretosum elatioris].

Physionomie, structure

Habitat à structure typique de prairie à biomasse élevée, dense : richesse en hémicryptophytes et géophytes, pauvreté en thérophytes.
Une stratification nette sépare les plus hautes herbes (graminées, joncacées et cypéracées élevées, composées…) des herbes plus basses (petites graminées, orchidées, herbes à tiges rampantes…).

Confusions possibles

La prairie à Sélin douteux est souvent confondue avec des prés du Molinion caeruleae (Code UE : 6410) qui s’en distinguent par son écologie associée à des sols hydromorphes organiques et, par suite, une plus grande représentation des espèces oligotrophiques : diverses petites Laîches (Carex panicea, C. hostiana, C. nigra…), Molinie bleue (Molinia caerulea), Orchidées palustres (Dactylorhiza incarnata, D. fistulosa)…

Dynamique

Spontanée :
Probablement partiellement primaire, cet habitat s’inscrit aussi dans la dynamique naturelle des vallées alluviales continentales incluant des forêts inondables à Saules, Peupliers, Frêne, Orme, Vigne sauvage (Code UE : 91E0), des fourrés hygrophiles à Saules arbustifs (Salix nigricans, S. cinerea, S. purpurea), Bourdaine (Frangula alnus) et Viorne obier (Viburnum opulus) [Salici nigricantis-Viburnetum opuli, Code Corine : 31.81], des roselières (Code Corine : 53.1, 53.2) et mégaphorbiaies (Code UE : 6430) de grande vallée, parfois envahies d’espèces exotiques comme les Solidages américains (Solidago gigantea).
L’enrichissement du sol alluvial en matières organiques contribue à son évolution rapide vers des prés oligotrophiques du Molinion caeruleae, en particulier le pré à Oenanthe de Lachenal et Molinie bleue [Code UE : 6410] avec lesquels il convient de ne pas le confondre ; d’ailleurs cet habitat est souvent considéré comme une forme appauvrie, altérée, de ce pré à Oenanthe de Lachenal.

Liée à la gestion :
Plus précisément, elle dérive des végétations de hautes herbes (roselières et mégaphorbiaies) sous l’influence ancestrale du fauchage ; le piétinement est défavorable à son expression optimale.

Habitats associés ou en contact

Forêts inondables à Saules, Peupliers, Frêne, Orme, Vigne sauvage (Code UE : 91E0). Fourrés hygrophiles à Saules arbustifs et Viorne obier [Salici nigricantis-Viburnetum opuli, Code Corine : 31.81].
Communautés à grandes Laîches [Magnocaricion elatae, Code Corine : 53.2] et mégaphorbiaies (Code UE : 6430) de grande vallée.
Prairies de niveau topographique supérieur, moins longuement inondables (Code Corine : 37.2). Prés oligotrophiques basiclines à Molinie bleue [Oenantho lachenalii-Molinietum caeruleae, Code UE : 6410].

Répartition géographique

Actuellement, habitat uniquement connu de la vallée alsacienne du Rhin, pourraient cependant exister dans d’autres vallées de l’est du pays.

Valeur écologique et biologique

Valeur écologique et biologique élevée, l’Alsace constituant la limite la plus occidentale de cet habitat continental, mieux développé dans les vallées d’Allemagne, Autriche, Pologne, République tchèque, Slovaquie… ; quelques espèces sont protégées au niveau national (Violette élevée, Gratiole officinale), d’autres plus nombreuses le sont en Alsace : Ail anguleux, Céraiste douteux, Sélin douteux (par ailleurs inscrit sur la liste rouge nationale), Euphorbe des marais, Inule britannique, Stellaire des marais, Germandrée des marais, Violette à feuilles de pêcher, Véronique à longues feuilles, Séneçon des marais.

États de conservation

États à privilégier :
Près de fauche.

Tendances et menaces

Habitat en voie de régression rapide suite à l’abandon des activités pastorales extensives, l’assèchement des prairies, leur remplacement par des cultures intensives, l’industrialisation de l’agriculture, les grands aménagements modifiant la dynamique fluviale (baisse de la nappe phréatique, altération de la qualité des eaux par eutrophisation), l’extension des gravières.

Potentialités intrinsèques de production

Le produit de la fauche de cet habitat très relictuel mais de biomasse élevée, peut être séché et utilisé comme foin pour des animaux très rustiques (équins) en fonction des besoins ; le reste est utilisé comme paille ; pas de pâturage envisageable.

Axes de recherche

Approfondir la connaissance de cet habitat en Alsace, souvent confondu avec le Pré à Oenanthe de Lachenal et Molinie bleue.

Fiche du cahier d'habitats (format pdf)
Bibliographie

 Bensettiti F., Boullet V., Chavaudret-Laborie C. & Deniaud J. (coord.), 2005. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 4 - Habitats agropastoraux. Volume 2. MEDD/MAAPAR/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 487 p. + cédérom. (Source)