ZNIEFF 030030087
Saut Tamanoir

(n° régional : 00000042)

Commentaires généraux

La ZNIEFF de "Saut Tamanoir" se situe sur le fleuve Mana en amont de la confluence avec la crique Kokioko. Cette ZNIEFF est destinée à mettre en valeur ce seuil rocheux ainsi que les habitats ripicoles attenants, milieux particulièrement peu répandus dans ce secteur.

Les habitats concernés sont la forêt et les clairières ripicoles, les forêts inondables et les affleurements rocheux et sableux.

La forêt ripicole est présente tout le long du linéaire et constitue l’interface végétale entre la rivière et les forêts attenantes. Cette végétation est particulièrement bien adaptée à supporter à la fois l’ensoleillement permanent dû à l’effet de lisière ainsi que les fréquentes inondations temporaires dues aux crues en saison des pluies. Cet habitat d’ordinaire riche en plantes épiphytes semble ici assez pauvre, notamment en ce qui concerne les orchidées. Toutefois, la rare orchidée épiphyte Batemannia armillata fut découverte dans cet habitat en amont de Saut tamanoir . La grande broméliacée Mezobromelia pleiosticha domine ce peuplement d’épiphytes rivulaires et est abondante tout le long du linéaire. Les arbres dominant cette communauté végétale sont Quararibea guianensis (Malvaceae), Parinari campestris (Chrysobalanaceae), Clusia grandiflora (Clusiaceae), Lecythis corrugata (Lecythidaceae), Machaerium quinatum (Fabaceae), Posoqueria longiflora (Rubiaceae). La liane ligneuse Bauhinia poiteauana (Fabaceae) est une espèce particulièrement rare. Enfin, un Adiantum (Pteridaceae), actuellement en cours d’étude, exclusivement lié aux berges ripicoles, pourrait être un taxon endémique de Guyane française.

Les forêts inondables ou forêts de flat sont moyennement représentées dans ce secteur. Ces formations végétales inondables peuvent être de composition assez classique, comme les pinotières à Euterpe oleracea et les bas-fonds à Geonoma baculifera (Arecaceae). Mais des formations homogènes assez basses à Bactris brongnartii (Arecaceae) sont bien répandues sur le secteur alors qu’elles sont globalement assez rares en Guyane. La rare broméliacée Pitcairnia caricifolia se développe exclusivement dans ce type d’habitat. L’orchidée terrestre et déterminante Palmorchis prospectorum est également inféodée à ces milieux forestiers et marécageux.

Les clairières ripicoles, formations buissonnantes impénétrables en zone inondable, sont assez fréquentes au niveau des confluences des rivières. Les inondations quasi permanentes de ces habitats ainsi que les flux réguliers de sédiments empêchent l’implantation d’arbres. Ces espaces inondables demeurent donc colonisés par quelques rares espèces ligneuses qui supportent ces conditions écologiques contraignantes (Mimosa, Inga, Machaerium…) Sur le site de Saut Tamanoir, de telles clairières sont peu développées et sont la plupart du temps mélangées avec des formations plutôt propres aux forêts inondables, riches en lianes. Ces petites clairières ensoleillées sont, par endroits, colonisées par des populations homogènes de Bactris maraja (Arecaceae) et de Tabernaemontana siphilitica (Apocynaceae).

Les affleurements rocheux (seuils, gravières) ou sableux, bien développés au niveau du Saut Tamanoir, sont fortement exposés à l’ensoleillement permanent et aux lessivages fréquents. Ils constituent des milieux naturels qui ne sont colonisés que par des espèces végétales capables de supporter ces conditions extrêmes. Ainsi, les plantes pionnières communes ont des difficultés à s’installer sur ces affleurements et d’autres espèces mieux spécialisées peuvent s’y développer. Le cortège des plantes qui occupent ce type d’habitat sur la Mana est tout à fait remarquable, puisque près de la moitié des plantes inventoriées présentent des caractères de rareté notable en Guyane, voire au niveau mondial (Cyperus gayi –Cyperaceae-).

Des zones sableuses se localisent au niveau du saut sur les parties hautes de l’île et hébergent peu d’espèces herbacées intéressantes, alors que les zones de graviers sont présentes uniquement au niveau du saut même. Quelques affleurements rocheux de faible superficie apparaissent au niveau du saut même, ainsi qu’en amont. Ces habitats rocheux portent également des communautés végétales intéressantes.

Ces trois types de micro-habitat (sable, graviers, rochers) accueillent globalement la même communauté végétale constituée presque exclusivement de petites plantes herbacées, mis à part l’arbuste Psidium acutangulum (Myrtaceae).

Parmi ces plantes, 4 espèces sont notablement rares en Guyane et considérées comme des espèces déterminantes : Cyperus gayi, Hypolytrum laxum (Cyperaceae) et Psidium acutangulum.

Au niveau ornithologique, le secteur de Saut Tamanoir est caractérisé par la présence de plusieurs espèces déterminantes : Harpie féroce (Harpia harpyja), Chouette huhul (Ciccaba huhula), Synallaxe de McConnell (Synallaxis macconnelli), Batara à gorge noire (Frederickena viridis), Batara de Cayenne (Thamnophilus melanothorax), Grisin noirâtre (Cercomacra nigrescens), Todirostre de Joséphine (Hemitriccus josephinae).

Le Géocoucou pavonin (Dromococcyx pavoninus) exploite les forêts inondables ripicoles en amont du saut. Cette espèce mérite une attention particulière, uniquement connue à ce jour de trois localités en Guyane. De plus, dans l’état actuel des connaissances, cette espèce très rare en Guyane semble directement et strictement liée aux forêts ripicoles.

L'Engoulevent trifide (Hydropsalis climacocerca), uniquement présent sur les grands fleuves, utilise les affleurements rocheux comme postes de chasse et pour sa nidification.

Enfin il est important de signaler que Saut Tamanoir représente la localité type du seul oiseau strictement endémique de Guyane française : l’Engoulevent de Guyane (Caprimulgus maculosus). Cette espèce décrite sur la base d’un individu collecté à Saut Tamanoir en 1917 n’a jamais été retrouvée en Guyane ni ailleurs depuis un siècle (Cleere & Ingels, 2004).

Pour le reste de la faune vertébrée, quelques observations mettent en évidence des espèces rares aussi bien au niveau herpétologique (Osteocephalus buckleyi) qu'au niveau chiroptérologique (Eumops maurus).

Enfin un premier inventaire ichtyologique de Saut tamanoir met en avant plusieurs espèces remarquables : Brycon falcatus, Brycon pesu, Cynopotamus essequibensis, Cyphocharax spilurus, Hemiodus huraulti, Hemisorubim platyrhynchos, Leporinus fasciatus, Prochilodus rubrotaeniatus, Pseudancistrus barbatus.

Les menaces potentielles qui pèsent sur cette ZNIEFF concernent essentiellement les activités liées à l'orpaillage illégal comme la chasse et la pollution des eaux.

Un projet de production électrique avec turbine au fil de l'eau est également à l'étude.

Commentaires sur la délimitation

La ZNIEFF du saut Tamanoir est délimitée par une zone tampon de 200m de part et d’autre des deux rives de la Mana depuis le point A au point B, situés tous deux à environ 1km du saut Tamanoir.

Coordonnées des points mentionnés (WGS84, UTM 22 nord):

A (195185m; 570793m) - B (193838m; 569321m)