La ZNIEFF des Cascades et Crique Voltaire (type II) débute au bout de la piste de Paul Isnard à 70 km au sud de Saint-Laurent-du-Maroni. Affluent de la crique Sparouine, la crique Voltaire est située dans la partie est du bassin versant du fleuve Maroni. Alimenté par une pluviométrie importante (2700 mm de précipitations annuelles), le réseau hydrographique est ici très dense d'autant que de nombreuses rivières prennent naissance dans cette partie montagneuse du plateau des Guyanes. Prenant sa source dans un petit massif situé à l'est des montagnes de la Sparouine, la crique Voltaire suit un axe globalement nord-sud sur un cours environ 30 km de long.
Le massif granitique de Voltaire se situe entre le massif de la Sparouine et celui de Lucifer Dékou-Dékou. Ce secteur, culminant à 445 m, est particulièrement accidenté dans les vallées très encaissées par endroits. On note la présence d'un inselberg aux deux faces nues, ainsi qu'une savane-roche sur un versant nord, au sud-ouest du massif.
Sur les dix derniers kilomètres en aval, la crique Voltaire traverse les schistes de l'Orapu qui sont des roches métamorphiques donnant des sols assez tendres : la vallée s’élargit alors et est peu encaissée. Sur la partie restante en amont, la crique rencontre des roches dures (granites, migmatites, …) et la vallée devient étroite et sinueuse. C'est dans cette zone que se situent les chutes.
Sur une distance de 200 m environ, les Chutes Voltaire offrent une dénivellation de 35 m, sans équivalent en Guyane. En amont des chutes, la crique coule paisiblement dans un lit qui atteint une dizaine de mètres. Puis, vers l’aval, elle rencontre alors un premier secteur en pente modérée (15% environ) qui s'élargit progressivement. Un îlot forestier sépare alors la crique en deux bras et la pente devient plus forte jusqu'à avoisiner 40%. Le bras gauche est le plus large tandis que le droit est alimenté essentiellement en saison des pluies et d'une morphologie proche du secteur amont : succession de marches et de baignoires naturelles. Enfin, ce bras se jette dans une vaste cuvette qui va rejoindre le cours principal de la rivière. Pour sa part, le bras droit est impressionnant par le débit et le dénivelé de ses cascades dont certaines sont pratiquement verticales. Le lit de la crique retrouve finalement sa taille et son cours initiaux après un dernier secteur de rapides témoins de la fin de cet accident géologique.
Quatre kilomètres en amont des cascades Voltaire, celles découvertes en 1994, les cascades du Vieux Broussard, présentent autant d'intérêt que les précédentes. Dans un coude de la rivière, on trouve sur un kilomètre sept chutes en enfilade avec, entre autres, un ensemble à marmites. Le Saut Maria se présente sous la forme d'une petite chute d'un dénivelé de deux mètres. Formant une clairière d'un diamètre de 50 mètres dans la forêt, le Saut Philippe est à 150 mètres en amont et a le même gabarit. Les roches environnantes sont curieusement disposées en éboulis. Après avoir suivi pendant 200 mètres un étroit passage granitique et à la sortie du virage en épingle, apparaît le Saut Joël. Une baignoire naturelle de 70 sur 40 mètres est dominée par une muraille granitique. Juste au-dessus, c'est le Saut Bernard, une seconde cascade plus imposante encore. L'ensemble des derniers sauts approche les 400 mètres de longueur. Après avoir suivi le lit rocheux de la crique, présentant de nombreuses marmites, on passe un petit bistouri pour découvrir un ensemble de trois cascades d'une importance comparable aux chutes Voltaire.
En plus de l'intérêt de cette entité géomorphologique remarquable, le site n'a jamais subi l'exploitation forestière et l'étroitesse de la partie sud de son bassin ainsi que l'entretien d'une humidité élevée induite favorisent le développement des épiphytes et des fougères.
En bordure des chutes, la physionomie de la forêt ressemble à celle des forêts basses sur inselbergs qui constituent la zone contact entre la forêt haute et la " savane-roche ". Elle a comme caractéristiques communes avec ces forêts de transition un sol très mince où affleure çà et là le socle granitique. Les arbres qui y poussent sont petits, tortueux et penchés et portent de nombreuses épiphytes à faible hauteur grâce à un éclairement relativement important.
Par ailleurs, cette ZNIEFF est constituée de plusieurs formations végétales de la forêt de basse altitude. En aval des chutes, on rencontre de petites zones de forêt marécageuse dominée par le palmier pinot (Euterpe oleracea), associé ponctuellement avec le " yayamadou-rivière " (Virola surinamensis – Myristicaceae -)le " manil-marécage " (Symphonia globulifera – Clusiaceae -), le " bois-diable " (Hura crepitans – Euphorbiaceae -) et les " wapas " (Eperua sp.pl. – Fabaceae -).
Le long de la crique Voltaire, on retrouve surtout la forêt ripicole composée par des espèces particulièrement adaptées à ce milieu : les " wapas " (E. falcata et E. schomburgkiana, Fabaceae), beaucoup d'espèces d'Inga (Fabaceae), le " moutouchi " Pterocarpus officinalis (Fabaceae), aux larges contreforts rubanés, le " yayamadou rivière " (Virola surinamensis) ou encore le " moucou-moucou " (Montrichardia arborescens, Araceae) et le " cacao sauvage " (Pachyra aquatica, Bombacaceae). Ce secteur est particulièrement riche en espèces de palmiers.
Lorsqu'on s'éloigne de la crique Voltaire, le massif forestier qui compose la ZNIEFF est en majeure partie de la forêt haute sur sols drainés de basse altitude.
Il existe une petite dalle-rocheuse observable par imagerie satellite. À ce jour, aucune donnée n'existe pour ce milieu.
Une vingtaine de plantes déterminantes sont recensées dans cette ZNIEFF dont une est protégée, Turnera rupestris (Turneraceae), certaines sont endémiques ou particulièrement rares en Guyane : Calliandra surinamensis, Swartzia amshoffiana et Zygia tetragona (Fabaceae), Miconia cacatin (Melastomataceae), Coussarea mapourioides (Rubiaceae) et, sur la savane-roche, Pitcairnia cremersii (Bromeliaceae). Monotagma secundum (Marantaceae) une magnifique plante du sous-bois aux bractées rouge vif, n’est présente, en Guyane, que dans cette localité où elle est en limite orientale de son aire qui s’étend jusqu’au Pérou.
La grande faune est encore bien représentée dans ce secteur forestier : Atèle, Saki à face pâle, Jaguar.
Parmi les chiroptères, la présence de Lionycteris spurrelli, déterminante et strictement liée aux cavités rocheuses, indique de possibles colonies d'espèces rares au vu de l'étendue des faciès potentiellement favorables.
En ce qui concerne l'herpétofaune, notons la présence d'Atelopus spumarius barbotini, Osteocephalus cf. buckleyi (Osteocephalus buckleyi) et Hypsiboas ornatissimus, espèces déterminantes.
L'avifaune du secteur est particulièrement bien diversifiée, avec la présence de nombreuses espèces rares et déterminantes, typiques de la grande forêt de l'intérieur : Tangara cyanictère, Coracine rouge, Todirostre de Joséphine, Grimpar à menton blanc, Araponga blanc.
La découverte récente du Guacharo des Cavernes représente la seule donnée certaine de cette espèce en Guyane française et suggère une nouvelle fois la possible existence de cavités importantes dans le secteur.
Enfin la richesse ichthyologique de ces eaux torrentueuses est particulièrement forte avec plus d'une vingtaine d'espèces déterminantes de poissons inventoriées.
Inscrites à l'inventaire des Sites et Monuments naturels depuis décembre 2000 et classées en zone ND au POS de Saint-Laurent-du-Maroni, les chutes Voltaire sont un lieu de promenade assez prisé pour son intérêt paysager mais également pour la baignade. Les pressions anthropiques sur le site concernent essentiellement les activités touristiques et récréatives. Des aménagements ont été réalisés dans le secteur des Cascades Voltaire depuis le début des années 90, avec pour objectif le développement d'un tourisme familial. Une menace réelle de surfréquentation par rapport à la capacité d'accueil du site existe : la fosse à ordures arrive vite à saturation, les installations légères et sauvages naissent au-delà des deux clairières des carbets, et autour des Cascades du Vieux Broussard, détériorant progressivement l'aspect du sous-bois et les jeunes arbres. Une gestion raisonnée du site pourrait permettre qu'à terme l'augmentation de la fréquentation touristique ne nuise pas à son intégrité.
La ZNIEFF est limitée par le bassin versant de la crique Voltaire depuis l'Auberge des Chutes Voltaire (point A). Cette limite de bassin versant passe par les points B (à l'est), C et D (au sud) pour remonter jusqu'au point A.
Coordonnées de points mentionnés (WGS84, UTM 22 nord):
A (157454m; 559790m) - B (160853m; 558617m) - C (159696m; 539264m) - D (156121m; 540797m)