La ZNIEFF de la Montagne Machoulou (type I) se situe à 20 kilomètres au sud-est de Maripasoula.
Elle s'inscrit au sein de la ZNIEFF de type II des Monts Atachi-Bakka s'étendant entre le fleuve Litani à l'ouest, la rivière Tampok au sud et la rivière Grand Inini au nord et à l'est.
La ZNIEFF de type I correspond au massif forestier montagneux situé au dessus de 350 mètres d'altitude au sein des reliefs des monts Atachi-Bakka. Il s'agit principalement de la montagne Machoulou, large sommet tabulaire (jusqu'à 2 kilomètres) orienté approximativement nord-ouest / sud-est, faisant partie des plus hauts sommets de Guyane en culminant à 782 mètres. Cette montagne domine ainsi de manière spectaculaire les vallées alluvionnaires environnantes qui s'étendent en contre-bas (altitude 100 mètres).
Les monts Atachi-Bakka appartiennent à la chaîne Inini-Camopi, massif formant une des grandes régions géomorphologiques des terres hautes de la Guyane, et constitué des plus hauts sommets du département. Géologiquement, elle correspond à un synclinorium de terrains métamorphiques antécambriens, et s'intègre ainsi dans un vaste ensemble de roches volcano-sédimentaires désignées sous le terme de formation Paramaca.
La Montagne Machoulou se rattache donc à la catégorie des reliefs tabulaires sur un socle de roches basiques surmontées par une cuirasse latéritique les protégeant de l'érosion.
À l'image de la majeure partie des grands sommets tabulaires de Guyane, les reliefs de la ZNIEFF, protégés par de telles carapaces, ont résisté à l'usure du temps et demeurent présents aujourd'hui sous la forme de buttes témoins, vestiges de reliefs beaucoup plus étendus et de plateaux peu à peu démantelés (la montagne Bellevue de l'Inini, située un peu plus à l'est dans la région, pourrait ainsi avoir fait partie du même plateau).
Aujourd'hui donc morcelée, toujours en cours de démantèlement par l'érosion, la cuirasse des monts Atachi-Bakka, notamment la montagne Machoulou, présente localement de nombreux affleurements rocheux et abris sous-roches. Le plateau supérieur et certains replats faisant terrasses sur les pentes sont recouverts d'une carapace latéritique dure et quasi continue. Les versants sont recouverts d'argiles noyant les blocs de cuirasses (éluvions latéritiques). Des éboulis s'observent ainsi un peu partout sur les flancs des montagnes.
Les roches anciennes du socle y sont profondément altérées et les produits de décomposition restent en place, protégés de l'érosion par la voûte forestière. L'altération de ces roches-mères, sous l'influence de la pédogénèse, donne un matériau ou les éléments sont à prédominance argileuse ou limoneuse (saprolite). La majeure partie des sols rencontrés, riches, profonds et bien drainés sur les pentes, sont également ferrallitiques.
De tous les sommets de ce type, c'est ici le plus large en Guyane, ce qui permet en saison des pluies une stagnation de l'eau avec la formation de mares et lacs temporaires.
Cette ZNIEFF présente principalement un ensemble de milieux liés aux formations forestières de moyenne altitude, comprenant la forêt haute sempervirente de terre ferme et la forêt basse submontagnarde.
La Montagne Machoulou offre également une grande variété de microclimats : versants exposés ou abrités des vents et des précipitations, haut et bas de pente, thalwegs transversaux creusés par le réseau hydrographique, cascades, affleurements rocheux et abris sous-roches.
Une forêt haute sempervirente de terre ferme recouvrant les pentes et les crêtes de basse et moyenne altitudes, se distingue elle par une composition floristique nettement plus riche et diversifiée, et une physionomie majestueuse avec des fûts élevés et un sous-bois bien structuré. Elle est ainsi typique des forêts sur sols argileux, riches et profonds sur roches basiques, comparable aux forêts de la région de Saül. Le sous- bois est ici dominé par des Poaceae, Flacourtiaceae Rubiaceae et des Arecaceae.
Cette forêt primaire est particulièrement remarquable en moyenne altitude (au delà de 500 mètres) et notamment en dessous du bord de la cuirasse, le réseau hydrographique formant rapidement une série de thalwegs profonds, de vallées encaissées, rayonnant autour du plateau sommital. Ces vallées sont généralement bien abritées du vent et les microclimats y sont très humides. En dehors des pentes les plus fortes, la forêt est haute et bien structurée avec un sous-bois relativement riche. Dans les fonds de vallée, il faut noter la prolifération des Ptéridophytes avec une grande richesse spécifique, en particulier des fougères arborescentes du genre Cyathea qui marquent la physionomie du paysage. Les épiphytes sont également très abondantes. Le sous-bois abrite encore des Melastomataceae et Piperaceae qui abondent notamment au bord des cours d'eau, et de belles populations du palmier Geonoma triglochin inféodé aux forêts d'altitude. On y recense de nombreuses espèces végétales déterminantes comme Clidemia granvillei. Puis dans leurs cours supérieurs toujours, les rivières descendent en cascade sur les rochers qui portent une florule particulière (Araceae comme Anthurium rubrinervum), parfois inféodées à ce type de milieux d'altitude (Dicranopygium pygmaeum, Cyclanthaceae), tout comme les rebords du plateau caractérisés par de petites falaises et de gros blocs de démantélement de la cuirasse de quelques mètres de haut, et colonisés par une florule spécifique (Gesneriaceae, Ptéridophytes).
À partir de 500 mètres, la forêt submontagnarde est localisée sur le plateau élevé peu venté dont elle occupe la majeure partie, ainsi que sur le haut des pentes les plus fortes et les vallons des versants sous le vent cette fois-ci. Elle est bien individualisée du reste du massif forestier recouvrant les versants. L'exposition, la largeur et l'orientation des crêtes, la pente, jouent ainsi un rôle tout autant important, ici, que l'altitude dans la diversification des biotopes.
Elle est principalement représentée par une forêt basse typique sur cuirasse, correspondant à la "forêt à nuages", noyée dans le brouillard une grande partie de la journée (notamment en saison des pluies).
Si les forêts des hautes vallées encaissées du cours supérieur des rivières possèdent, chacune, leur originalité floristique, la formation basse submontagnarde sur cuirasse se compose d'une flore relativement uniforme d'un site à l'autre.
Sur les pentes les plus abruptes et les versants exposés aux vents, la voûte est généralement disjointe. La cuirasse latéritique qui affleure un peu partout, limite l'enracinement des arbres. Leur stabilité est également compromise par l'instabilité des sols minces détrempés en permanence sur des fortes pentes et par les vents assez violents localement à cette altitude, qui soufflent tout particulièrement en saison des pluies. Les rares arbres émergeant isolément y sont donc particulièrement vulnérables et la forêt est ainsi perturbée par de nombreux chablis. De ce fait, la lumière pénètre souvent aisément jusqu'au sol et les arbrisseaux, lianes et tapis herbacés y abondent.
Sur le plateau sommital, toujours en raison des affleurements de cuirasse latéritique, le sol y est mince, voire inexistant, et l'enracinement des arbres est là encore, de ce fait, limité et très superficiel. Un réseau racinaire très développé court au sol. La forêt y est peu élevée et de structure très irrégulière, au sous-bois dense et broussailleux, riche en lianes. Des espèces caractéristiques dominent cette formation, les Myrtaceae, Melastomataceae, Annonaceae, Rubiaceae et Arecaceae (Geonoma euspatha, palmier inféodé aux forêts d'altitude). Localement cette forêt laisse place à des formations arbustives broussailleuses encore plus basses, avec une voûte dense et jointive de 2 à 10 mètres de hauteur, d'où émergent seulement quelques grands arbres isolés, au port tortueux. Ces arbustes sont pour l'essentiel des Myrtaceae, Solanaceae et Melastomataceae. La nébulosité importante sur le plateau sommital élevé, avec la persistance des brouillards, les rosées nocturnes et les précipitations abondantes, favorise la prolifération des épiphytes (Araceae, Gesneriaceae, Bromeliaceae, Orchidaceae...), des lichens et des mousses. Ces dernières forment d'épais manchons sur les lianes et les troncs et de longues draperies qui pendent des branches, donnant à cette forêt son aspect si caractéristique.
Cette forêt basse submontagnarde possède un certain nombre d'espèces endémiques ou à répartition restreinte qui lui sont caractéristiques. Certaines, par leur présence, différencient même la zone d'autres sommets tabulaires de Guyane.
On y trouve ainsi, parfois en abondance, plusieurs espèces déterminantes inféodées à cet habitat, comme Clidemia saulensis (Melastomataceae).
Enfin, sur le plateau on observe également de grandes clairières, ponctuellement sur quelques centaines de mètres carrés, où le sous-bois est entièrement vide. Souvent au centre de ces clairières qui marquent curieusement le paysage, on rencontre un grand arbre de 30 à 40 mètres de haut, de la famille des Humiriacées, Vantanea ovicarpa, connue que d'une seule autre localité (Pic Matécho dans la région de Saül) et représentant une nouvelle espèce pour la Guyane.
Les inventaires faunistiques restent rares sur cette zone difficile d'accès.
Une herpétofaune singulière est à rechercher sur les plateaux, notamment en raison de l'existence de mares et lacs temporaires aux cours de la saison des pluies. Dendrobates tinctorius et Anomaloglossus degranvillei sont connus du site.
Une nouvelle espèce de lézard pour la science (Mabuya sp.) fut découverte sur ce sommet. Retrouvé depuis sur d'autres sites forestiers, cette espèce demeure pour le moment non décrite.
Notons que les caractéristiques du site permettent d'accueillir des espèces d'oiseaux rares et déterminantes. Ainsi les nombreux abris sous roche liés à la cuirasse latéritique offrent des sites de nidification pour le Coq-de-roche roange (Rupicola rupicola) et la forêt d'altitude abrite une population d'Araponga blanc (Procnias alba). Le cortège des espèces liées à l'altitude est présent, avec le Tangara orangé (Piranga flava haemalea), le Pic or-olive (Piculus rubiginosus) et le Moucherolle à bavette blanche (Contopus albogularis). Les reliefs de la région sont également bien connus des chasseurs locaux pour accueillir des rassemblements saisonniers de Hoccos (Crax alector).
La Montagne Machoulou représente une des zones refuges de flore et de faune forestières durant les périodes plus sèches qui ont affectées la Guyane au Pléistocène. Ces sites sont ainsi actuellement reconnus en Guyane comme d'anciens centres de spéciation, fruits d'une longue évolution qui a permis le développement d'un taux d'endémisme et d'une biodiversité remarquables. Ce facteur prépondérant de la richesse floristique et faunistique du site (avec de nombreuses espèces végétales et animales originales, rares ou endémiques, lui conférant un intérêt biologique tout à fait remarquable), doit être associé ici à la grande variété de microclimats et de biotopes (parfois rares comme les abris sous roches) qui peut y être rencontrée.
Cet espace naturel remarquable fait désormais partie de la zone de libre adhésion du Parc Amazonien de Guyane.
La ZNIEFF est constituée des sommets de la montagne et délimitée par la courbe de niveau 350 m.