La ZNIEFF du Massif du Mitaraka et du Tchoukouchipann (type I) se situe à l'extrême sud-ouest de la Guyane, aux sources des rivières Alama et Saranou, affluents de l'Alitani. Elle s'inscrit dans la région des Tumuc-Humac (ZNIEFF de type II) caractérisée par ses affleurements granitiques sous forme de dômes et de dalles rocheuses dont le Pic Coudreau du Sud classé également en ZNIEFF de type I.
Il s'agit ici d'un ensemble de hauts inselbergs émergeant de manière spectaculaire du couvert forestier environnant. Des falaises impressionnantes leur confèrent un caractère tout à fait remarquable et original sur le plan paysager.
Il faut, en effet, souligner qu'il s'agit d'une des rares régions de Guyane (avec le mont Saint-Marcel de la haute Camopi, la Roche Koutou, les massifs des Emérillons-Monts Bakra) présentant des reliefs granitiques suffisamment élevés (supérieur à 500 mètres) pour abriter une forêt submontagnarde, plus fréquente généralement, dans le département, sur le haut des reliefs tabulaires de roches basiques et cuirasses latéritiques. Les inselbergs de la ZNIEFF sont ainsi coiffés d'une forêt basse sommitale de type submontagnarde. Celle-ci correspond à un habitat patrimonial en raison des espèces endémiques qu'elle abrite très souvent.
Les autres formations liées aux affleurements granitiques vont de la forêt basse de transition de moyenne altitude à la savane-roche proprement dite. La forêt basse d'inselberg (voûte de 5 à 15 mètres de hauteur) se matérialise par une ceinture de quelques dizaines de mètres de large au pied des pentes granitiques dénudées, assurant la transition entre la savane-roche et la forêt haute de terre ferme. La savane-roche est une formation herbacée basse et discontinue présentant trois principaux faciès : à Bromeliaceae (Pitcairnia), à Poaceae (Ischaemum), à Orchidaceae (Epidendrum et Encyclia), laissant apparaître des plaques de roche nue, tapissée d'algues bleues (Cyanobactéries).
La zone regroupe encore diverses autres formations forestières allant de la forêt dense et haute de moyenne et basse altitude jusqu'aux forêts marécageuses et ripicoles des vallées alluvionnaires.
L’intérêt biologique de la ZNIEFF tient non seulement à l’altitude élevée du secteur, la forêt submontagnarde venant renforcer ici la particularité du site, mais également aux milieux d'inselberg qui constituent un refuge d'espèces présentes sous la forme de populations isolées et relictuelles, pouvant ainsi présenter des originalités propres. Une soixantaine d'espèces végétales déterminantes (dont 7 espèces protégées) y est recensée, dont une majorité de monocotylédones inféodées à la savane-roche : Pitcairnia geyskesii et Pitcairnia sastrei (Bromeliaceae), Cyrtopodium andersonii (Orchidaceae), Furcraea foetida (Asparagaceae), Rhynchospora subdicephala (Cyperaceae), ou encore la très rare fougère Asplenium zamiifolium. L’ananas sauvage (Ananas comosus) est également présent dans cette localité, faisant du site une station importante pour les ressources génétiques d'espèces à potentiel économique.
Sur le plan faunistique, les populations de grands vertébrés sont intactes dans ce site où la présence humaine est quasi-inexistante. Notons le saki satan (Chiropotes chiropotes), primate restreint en Guyane à l'extrême sud-ouest.
L'avifaune est particulièrement riche en espèces. Un cortège d'oiseaux inféodés au milieu de savane-roche y a été observé : moucherolle hirondelle (Hirundinea ferruginea), sporophile curio (Oryzoborus angolensis), bruant chingolo (Zonotrichia capensis). Il faut également souligner la présence du coq-de-roche (Rupicola rupicola) qui profite des abris sous roche offerts par les éboulis d'inselbergs pour l'installation de ses colonies nicheuses. De même, les importantes falaises de ces reliefs granitiques permettent la présence d'oiseaux fortement liés à ce type d'habitat : martinet à collier blanc (Streptoprocne zonaris), faucon orangé (Falco deiroleucus). Il faut également citer des espèces liées aux forêts d'altitude : le tangara orangé (Piranga flava), le toucanet de Derby (Aulacorhynchus derbianus), espèce nouvelle pour la Guyane récemment découverte.
Enfin, concernant l'herpétofaune, soulignons Tropidurus hispidus, un lézard inféodé en Guyane à quelques inselbergs de la zone, où il occupe les dalles rocheuses.
La ZNIEFF présente une fragmentation de populations d'espèces végétales et animales en autant de peuplements de type insulaire, dans une matrice générale de forêt tropicale humide. Cette particularité présente un intérêt scientifique très important. La ZNIEFF constitue ainsi un véritable laboratoire pour comprendre l'histoire des forêts en offrant l'opportunité d'aborder plusieurs questions fondamentales concernant l'évolution des espèces et des milieux.
Ce site remarquable bénéficie désormais de la protection du Parc Amazonien de Guyane.
La ZNIEFF du Massif du Mitaraka et Tchoukouchipann est délimitée comme suit :
N : Au nord, la limite suit la crique Saranou, depuis la frontière avec le Brésil (point F) jusqu'à la confluence d’un affluent en rive droite (point A).
E : La limite Est suit l'affluent de la crique Saranou jusqu'au point B, puis emprunte une ligne droite reliant le point B au point C, situé sur la crique Alama. La ZNIEFF est ensuite délimitée par le cours de la crique Alama du point C jusqu’à la confluence d'un affluent en rive droite (point D), puis par le cours de cet affluent jusqu’au point E, situé sur la frontière brésilienne.
S et W : Au sud et à l'ouest, la limite longe la frontière brésilienne, du point E au point F.
Coordonnées des points mentionnés (WGS84, UTM 22 nord):
A (116149m; 257179m) - B (117061m; 250210m) - C (116620m; 249292m) - D (121562m; 246603m) - E (121139m; 243515m) - F (106468m; 254901m)