ZNIEFF 210000118
ETANG DE LA HORRE

(n° régional : 00000021)

Commentaires généraux

L'étang de la Horre, situé sur les départements de l'Aube et de la Haute-Marne, est à la fois l'un des plus vastes et l'un des plus anciens (attesté depuis le Moyen-Age) des étangs de Champagne humide. Il fait partie, avec les bois environnants de Travaillot, des Trapières, du Jac et Dumaine, d'une grande ZNIEFF de type I de 987 hectares.

La forêt entourant l'étang est une chênaie-charmaie mésotrophe fraîche, la queue de l'étang et les vallons forestiers peu marqués (parcourus par des ruisseaux plus ou moins temporaires) présentent une végétation relevant de l'aulnaie-frênaie (plus localement de l'aulnaie) comprenant de beaux peuplements à laîche allongée.

La zone de contact entre l'étang et la forêt est un manteau forestier plus ou moins continu de type tremblaie à laîche des rives, ou des saulaies arbustives à saule fragile, saule à trois étamines, saule des vanniers ou arborescentes à saule cendré.

La ceinture herbacée la plus externe à l'étang est constituée de grands carex en peuplements denses (laîches des rives) ou en touradons (laîche allongée). La roselière qui lui succède renferme une espèce rare et protégée en France, la grande douve, dont la population de la Horre est certainement la plus grosse de Champagne. Les typhaies sont répandues mais peu étendues, elles sont constituées essentiellement par la massette à larges feuilles, la massette à feuilles étroites et leur hybride (Typha x glauca) dont la population de la Horre est la seule de Champagne. On peut observer également une fougère rare protégée au niveau régional, le thélyptéris des marais.

Au delà se rencontrent les formations amphibies ou franchement aquatiques (Lemnion, Potamion, Nymphaion, etc.). De nombreuses espèces rares inscrites pour la plupart sur la liste rouge des végétaux de Champagne-Ardenne s'y observent : le potamot à tiges comprimées, très rare dans tout le nord de la France, les potamots à feuilles aiguës et à feuilles obtuses, le limnanthème faux-nénuphar, rare dans la région et en régression, la grande naïade et la petite naïade (très rares ou nulles dans l'Aube et la Haute-Marne), la limoselle aquatique, le scirpe de Sologne, la laîche faux-souchet, ou encore l'utriculaire négligée et le petit nénuphar qui possèdent à la Horre de très importantes populations. On peut également noter la présence de groupements végétaux rarissimes et aux conditions écologiques très particulières (groupements à Rumex maritimus, à Potamogeton compressus).

L'étude des libellules montre que l'étang possède également un intérêt entomologique important lié à la fois à la variété des espèces (36) représentées souvent par de grosses populations et à la présence de onze espèces rares, menacées ou en limite d'aire, dont l'agrion gracieux, l'agrion mignon (classé vulnérable pour l'ensemble de l'Europe), le gomphe vulgaire, la cordulie à taches jaunes, en déclin dans toute l'Europe, la cordulie métallique, la cordulie à deux taches, grande espèce spectaculaire, localisée à l'est du pays, l'aeschne printanière, la grande aeschne, rare en plaine, l'aeschne isocèle, la libellule fauve et la libellule déprimée.

Les amphibiens sont également bien représentés, avec plus particulièrement le sonneur à ventre jaune (annexe II et IV de la directive Habitats, annexe II de la convention de Berne) et la rainette verte (annexe II de la directive Habitats, annexe II de la convention de Berne) protégés en France, figurant dans le livre rouge de la faune menacée en France (en tant qu'espèces vulnérables) et, avec la salamandre commune, sur la liste rouge des amphibiens de Champagne-Ardenne. Le crapaud commun, la grenouille agile, la grenouille rousse sont aussi représentés sur le site.

La richesse avifaunistique de l'étang et des bois environnants (157 espèces différentes dont 24 nicheuses inscrites sur les listes rouges européenne, nationale ou régionale) est en partie due à l'interaction de ces deux milieux, à la présence de ceintures marécageuses étendues, à la faible profondeur du plan d'eau, et arrive en complément du lac du Der situé non loin de là. Il s'agit de l'un des derniers sites de reproduction du butor étoilé, nicheur très rare, en régression importante et menacé de disparition, du blongios nain, nicheur très rare (et dont la régression s'inscrit dans un processus très large de diminution catastrophique à l'échelle européenne), tous deux étant inscrits à l'annexe I de la directive Oiseaux, à l'annexe II de la convention de Berne, dans le livre rouge de la faune menacée en France et sur la liste rouge régionale. La ZNIEFF est l'un des deux sites recensés de nidification du héron pourpré en Champagne qui atteint ici sa limite d'aire de répartition vers le nord.

C'est aussi une excellente zone de reproduction des anatidés, dont certains sont des nicheurs très rares ou en régression (canard chipeau, dont la Horre est l'un des trois points de reproduction régulière de cette espèce en Champagne, canard souchet, sarcelle d'hiver en tant que nicheur irrégulier, sarcelle d'été, fuligule milouin, canard colvert, etc.) et de certaines espèces affectionnant les milieux palustres dont la rousserolle turdoïde, le phragmite des joncs, la locustelle luscinoïde, la locustelle tachetée, etc.

La forêt abrite le pic noir et le pic cendré, les rapaces comptent sept espèces nicheuses dont quatre sont inscrites sur la liste rouge régionale : busard des roseaux (meilleur site champenois pour cette espèce), faucon hobereau, nicheur rare, milan noir et milan royal bénéficient de la complémentarité des milieux aquatiques et forestiers. Il s'agit pratiquement du seul étang de la région à rassembler un aussi grand nombre d'espèces nicheuses.

Les mammifères forestiers sont également bien représentés par le gros gibier (chevreuil, sanglier), les carnivores (chat sauvage, putois, martre, blaireau, etc.) et les chauves-souris (vespertilion à oreilles échancrées et noctule). La musaraigne aquatique fréquente l'étang et ses abords.

Cette ZNIEFF fait partie des zones humides protégées par la convention Ramsar, elle a été désignée comme Zone Spéciale de Conservation (directive Oiseaux) en 1992 (1424 hectares) et a été proposée dans le cadre de la directive Habitats. Le plan d'eau est aujourd'hui la propriété du Syndicat du Der, une réserve naturelle a été créée le 9 mai 2000.

L'étang est dans un bon état général (gestion en cours avec notamment le recépage d'une partie de la saulaie et la réfection des digues), le secteur forestier étant plus perturbé (plantations de peupliers). Cependant des travaux récents d'ordre économique ont altéré son équilibre écologique et ont provoqué une baisse de l'intérêt ornithologique. Conjointement à l'aménagement d'un parking, une route récemment ouverte permet l'accès à la digue séparant les deux étangs. L'accès de la roselière est possible pour les pêcheurs à la carpe (de nuit comme de jour) sur une grande partie du pourtour provoquant une chute extrêmement importante de la nidification des espèces nicheuses les plus intéressantes.

Commentaires sur la délimitation

La ZNIEFF correspond à un étang et aux bois intéressants qui l'entourent.