ZNIEFF 210000659
MARAIS DU VIVIER A CHENAY ET TRIGNY

(n° régional : 00000116)

Commentaires généraux

La ZNIEFF dite du marais du Vivier est située sur les territoires communaux de Trigny et de Chenay, au nord-ouest de Reims, dans le département de la Marne. Elle regroupe une des six tourbières alcalines sur tourbe de la région naturelle du Tadernois, des étangs ainsi que des groupements forestiers troués de petites pelouses sur les zones sablonneuses environnantes plus sèches.

Le marais possède une très grande variété de groupements végétaux correspondant à différents faciès et stades dynamiques de la tourbière alcaline :

- la tourbière à choin noirâtre s'est développée sur les tourbes épaisses et dans les zones les plus mouillées du marais. Les espèces végétales caractéristiques appartiennent au Caricion davallianae (laîche de Davall, laîche écailleuse, laîche blonde, parnassie des marais), avec de nombreuses espèces du Molinion (épipactis des marais, gentiane pneumonanthe, orchis moucheron, orchis à odeur de vanille, cirse maraîcher, silaüs des prés, brachypode penné...).

- le piétinement, le grattage par les chevreuils laissent apparaître au sein de la tourbière des espaces de tourbe nue où se développe un groupement pionnier dominé par le mouron délicat, la grassette commune, le jonc couché et de nombreuses bryophytes. Au niveau des zones les plus humides, dans les tapis de mousses détrempées (Hypnum stellatum, Fissidens adianthoides, Drepanocladus sp.), on peut observer le très rare liparis de Loesel. Ponctuellement se remarque des faciès d'acidification de la tourbière avec l'implantation de certaines espèces du Caricion nigrae (laîche puce, laîche vulgaire) et des bombements à sphaignes.

- dans les dépressions (petites mares et fossés) une cladiaie se substitue à la tourbière : elle occupe de vastes surfaces au sein du Vivier de Chenay, avec une population très dynamique de marisque et des espèces relictuelles des bas-marais (choin noirâtre, jonc à tépales obtus, calamagrostis lancéolé). La roselière à phragmite et la cladiaie-roselière relevant toutes deux du Phragmition se développent en bordure d'étang, avec une dominance des roseaux et des marisques, accompagnés par la lysimaque vulgaire, l'eupatoire chanvrine, le liseron des haies et la laîche des rives. En arrière de la cladiaie-roselière et en contact avec le bas-marais on observe quelques vasques tourbeuses dominées par les bryophytes dans lesquelles se développent le ményanthe trèfle d'eau et le rossolis à feuilles longues dont c'est probablement l'unique station du nord-est de la France. Les fossés de drainage de la tourbière sont colonisés par le potamot coloré.

Le grand étang est loué à une société locale de pêche. Les eaux riches en calcaire permettent le développement de characées auquelles se mèlent de façon plus diffuse l'utriculaire vulgaire. Limitée en bordure du marais et faisant transition avec la forêt, on remarque une mégaphorbiaie nitrophile qui se caractérise par la présence de la reine des prés, de l'eupatoire chanvrine, la grande consoude, du jonc à tépales obtus, de la scrofulaire aquatique, du cirse maraîcher, du cirse des marais, etc. Le groupement préforestier qui lui fait suite tend vers l'aulnaie : la strate arborée est dominée par les bouleaux, peupliers, saules et aulnes, le tapis herbacé est en grande partie constitué par des espèces non forestières appartenant aux végétations du marais, avec une prédominance de la molinie bleue et de la laîche des rives.

Une chênaie sessiliflore à Festuca filiformis se rencontre à l'est du chemin d'accès au grand étang, en position de versant et sur substrat sableux. Celle-ci ne faisait pas partie de la première délimitation de la ZNIEFF et a été intégrée en 1999. En bordure de la forêt se développent de petites pelouses sur sables où l'on peut distinguer deux groupements principaux : une pelouse à Corynephorus canescens et Festuca filiformis (qui occupe les talus à forte pente et très soumis à l'érosion) et une pelouse à Carex arenaria (sur les niveaux sableux plus stabilisés) enrichie en graminées annuelles (canches caryophyllée et printannière, mibora minime).

Cette végétation bien caractéristique est adaptée aux conditions très particulières de ces milieux : près d'une trentaine d'espèces sont rares et certaines sont protégées. Ainsi, deux espèces bénéficient d'une protection nationale : le liparis de Loesel, très localisé en Champagne-Ardenne (où il ne subsiste plus que dans quatre sites au nord-ouest et au sud-ouest de la Marne), figurant dans la liste prioritaire de la liste rouge française, inscrit à l'annexe I de la convention de Berne et aux annexes II et IV de la directive Habitats (espèce nécessitant une protection stricte) et le rossolis à feuilles longues, d'origine nord-circumboréale, rare et en très forte régression en France (la station de Chenay est la seule qui subsiste en Champagne-Ardenne sur une dizaine autrefois répertoriées et certainenement l'une des dernières du nord du pays). Huit sont protégées au niveau régional : le mouron délicat, espèce atlantico-méditerranéenne, située ici à sa limite absolue de répartition vers le nord-est, la grassette vulgaire, plante carnivore rare en plaine et en très forte régression en Champagne-Ardenne, l'orchis négligé, le saule rampant, le corynéphore blanchâtre (rare dans l'est de la France et très localisé et très menacé en Champagne-Ardenne où il ne subsiste plus que dans quelques localités du Tertiaire parisien), le géranium sanguin, la laîche des bruyères (unique station connue en Champagne-Ardenne pour ce Carex) et l'orchis à odeur de vanille. Mis à part ce dernier, ils sont tous inscrits sur la liste rouge des végétaux menacés en Champagne-Ardenne, de même que treize espèces présentes également sur le site : la canche caryophyllée, la canche printanière, la mibora minime, le conopode dénudé, le ményanthe trèfle d'eau, l'oenanthe de Lachenal, la parnassie des marais, l'utriculaire vulgaire, le potamot coloré, la laîche puce, la laîche des sables, la prêle d'hiver et une petite fougère, l'ophioglosse.

Un papillon d'un intérêt exceptionnel et une libellule remarquable ont été observés sur la zone, il s'agit de l'azuré des mouillères ou protée, protégé en France depuis 1993, figurant dans le livre rouge de la faune menacée en France (catégorie en danger d'extinction) et sur la liste rouge régionale des Lépidoptères et du cordulégastre annelé, inscrit sur la liste rouge des Odonates de Champagne-Ardenne.

C'est un des sites majeurs de la Marne, il a été proposé, avec neuf autres ZNIEFF dans le cadre de la directive Habitats (site n°29 : marais et pelouses du tertiaire au nord de Reims). Il est en bon état, mais menacé d'une part par l'évolution dynamique de la végétation et d'autre part par l'action de l'homme (création d'étangs, fossés de drainage, etc.)

Commentaires sur la délimitation

Les limites de la ZNIEFF suivent les limites naturelles de la zone la plus riche.