ZNIEFF 210000689
LE GRAND MARAIS DE CORMICY

(n° régional : 01370001)

Commentaires généraux

La ZNIEFF du Grand Marais est située en bordure du massif forestier de Cormicy, au sud du village. Elle est constituée par l'une des dernières tourbières alcalines de la région du Tadernois (nord-ouest de Reims) et par ses groupements périphériques. Le marais possède une très grande variété de groupements végétaux correspondant à différents faciès et stades dynamiques de la tourbière :

- la tourbière à choin noirâtre s'est développée sur les tourbes épaisses et dans les zones les plus mouillées du marais. Les espèces végétales caractéristiques appartiennent au Caricion davallianae (laîche de Davall, laîche écailleuse, laîche blonde, parnassie des marais, linaigrettes), avec de nombreuses espèces du Molinion (épipactis des marais, gentiane pneumonanthe, cirse maraîcher, silaüs des prés, brachypode penné...).

- le piétinement, le grattage par les chevreuils laissent apparaître au sein de la tourbière des espaces de tourbe nue où se développe un groupement pionnier dominé par le mouron délicat, la grassette commune, le jonc couché et de nombreuses bryophytes. Au niveau d'une zone très humide, dans le tapis de mousses détrempées, on peut observer le très rare liparis de Loesel (1991, Thévenin S. & Worms C., non revu récemment).

- dans les dépressions et au niveau des fossés une cladiaie se substitue à la tourbière, avec une population très dynamique de marisque et des espèces relictuelles des bas-marais (ményanthe trèfle d'eau, choin noirâtre, jonc à tépales obtus, calamagrostis lancéolé, etc.).

- dans les zones où l'engorgement est moins prolongé (surtout dans la bordure externe du marais), se développe la moliniaie à fétuque rouge et ophioglosse (espèce rare, très abondante ici), avec certaines espèces des prairies (houlque laineuse, fétuque des prés, lychnis fleur de coucou) et des espèces des pelouses (brachypode penné, chlorette perfoliée, laîche bleuâtre, orchis négligé)

- la roselière à phragmite et la cladiaie-roselière, relevant toutes deux du Phragmition, sont également bien représentées, avec une dominance des roseaux et des marisques, accompagnés par la lysimaque vulgaire, l'eupatoire chanvrine et la laîche des rives. Les fossés de drainage de la tourbière sont colonisés par le potamot coloré. Une petite mare à characées, avec une bordure à laîche raide est située dans la partie sud-est du marais. Limitée en bordure du marais et faisant transition avec la forêt ou avec la saulaie à saule cendré, on remarque une mégaphorbiaie nitrophile qui se caractérise par la présence de la reine des prés, de l'eupatoire chanvrine, la grande consoude, du jonc à tépales obtus, de la scrofulaire aquatique, du cirse maraîcher, du cirse des marais, etc. Le groupement préforestier qui lui fait suite tend vers l'aulnaie : la strate arborée est dominée par les bouleaux, peupliers, saules et aulnes, le tapis herbacé est en grande partie constitué par des espèces non forestières appartenant aux végétations du marais, avec une prédominance de la molinie bleue et de la laîche des rives.

Cette végétation bien caractéristique est adaptée aux conditions très particulières de ces milieux : près d'une vingtaine d'espèces sont rares et certaines sont protégées. Le liparis de Loesel bénéficie d'une protection nationale : très localisé en Champagne-Ardenne (où il ne subsiste plus que dans quatre sites au nord-ouest et au sud-ouest de la Marne, il figure sur la liste rouge française des espèces prioritaires, il est inscrit à l'annexe I de la convention de Berne et aux annexes II et IV de la directive Habitats (espèce nécessitant une protection stricte). huit espèces sont protégées au niveau régional : le mouron délicat, espèce atlantico-méditerranéenne, située ici à sa limite absolue de répartition vers le nord-est, la grassette vulgaire, plante carnivore rare en plaine et en très forte régression en Champagne-Ardenne, le saule rampant, le laiteron des marais, la linaigrette à larges feuilles, le thélyptéride des marais et deux orchidées, l'orchis négligé et l'orchis des marais. Ils sont tous inscrits sur la liste rouge des végétaux menacés en Champagne-Ardenne, de même que six autres espèces présentes également sur le site : le ményanthe trèfle d'eau, l'oenanthe de Lachenal, la parnassie des marais, le potamot coloré, l'orchis incarnat et une petite fougère, l'ophioglosse.

La faune entomologique est très riche : un papillon d'intérêt exceptionnel a été remarqué sur la zone parmi la centaine d'espèces principales d'insectes rencontrée ; il s'agit de l'azuré des mouillères (ou protée) protégé au niveau national depuis 1993, figurant dans le livre rouge de la faune menacée en France (catégorie en danger d'extinction) et sur la liste rouge des Lépidoptères de Champagne-Ardenne avec le fadet de la mélique et le mercure (ici en limite nord de répartition). Les mares (plus ou moins temporaires) et les fossés permettent le développement de certaines populations d'Odonates, avec une libellule protégée en France, l'agrion de Mercure (espèce méridionale à aire disjointe et située ici non loin de sa limite septentrionale de répartition) rare dans le département de la Marne et d'une façon plus générale dans la moitié nord de la France, inscrit aux annexes II de la convention de Berne et de la directive Habitats, figurant sur le livre rouge de la faune menacée en France (catégorie "en danger d'extinction" dans la moitié nord de la France) et sur la liste rouge régionale avec dix autres espèces observées dans le Grand Marais. Il s'agit de l'agrion délicat (ou petit agrion rouge), une espèce extrêmement rare en Champagne-Ardenne et qui n'était connue auparavant que dans deux sites des Ardennes, de la libellule fauve, de la libellule écarlate, espèce méridionale en limite septentrionale de répartition, du cordulégastre annelé (rare dans la Marne), de l'agrion gracieux, de l'aeschne printanière, de l'aeschne isocèle, de la grande aeschne, de l'orthétrum brun, de la cordulie à taches jaunes, observée en grand nombre (plus de 80 individus en 1991) et habituellement cantonée aux bordures d'étangs (l'habitat en marais n'est connu en France qu'en Haute-Marne et sur le site). Le conocéphale des roseaux et un criquet chanteur font partie de la liste rouge des Orthoptères. Une belle population d'éphèmères a été répertoriée dans les fossés, les petites mares et les dépressions. La succession de biotopes variés et attractifs a permis l'installation d'une avifaune très diversifiée avec 78 espèces observées dont trois sont inscrites sur la liste rouge régionale des oiseaux : le phragmite des joncs, le tarier d'Europe et le pipit farlouse

La ZNIEFF du Grand Marais de Cormicy un des sites importants du département de la Marne ; elle a été proposée, avec neuf autres ZNIEFF dans le cadre de la directive Habitats (site n°29 : marais et pelouses du tertiaire au nord de Reims). Elle est en bon état mais menacée par l'évolution dynamique de la végétation et les plantations de peupliers : il y a quelques années près de la moitié du marais a été plantée en peupliers, néanmoins une zone centrale a pu être rénovée (enlèvement des peupliers plantés). Heureusement le développement des peupliers est très lent et le marais actuellement est peu altéré ( mais enlèvement à prévoir assez rapidement).

Commentaires sur la délimitation

Les limites de la ZNIEFF correspondent aux limites de la zone marécageuse.