ZNIEFF 210020116
VALLEE DE L'AMANCE ET DE SES AFFLUENTS DEPUIS VICQ ET LANEUVELLE JUSQU'A MAIZIERES ET PISSELOUP

(n° régional : 05040000)

Commentaires généraux

La ZNIEFF II de la vallée de l'Amance et de ses affluents (la Petite Amance, ruisseaux du Moreux, des Prés Rougets, de Maljoie et des Côtes) occupe un territoire de près de 1 900 hectares, en Haute-Marne, entre les communes de Vicq, Laneuvelle, Maizières-sur-Amance et Pisseloup. Elle englobe quatre ZNIEFF de type I (bois et prairies alluviales de Laferté-sur-Amance, marais de Coiffy-le-Bas, Coiffy-le-Haut et Champigny-Chézeaux).

Elle représente surtout un vaste ensemble de milieux prairiaux riches en flore (près de 70% de la superficie totale de la ZNIEFF), des boisements alluviaux (20% environ) et plus localement des marais, des formations à grandes laîches et des végétations à hautes herbes. Les rivières possèdent des groupements aquatiques localement bien développés et sont ourlées par une belle ripisylve.

La gamme des groupements prairiaux est fonction de la nature du sol, de l'inondation ou du traitement (fauche, pâture ou traitement mixte) : les prairies de fauche relèvent de l'Arrhenatherion elatioris (dans les zones peu ou pas inondées) ou du Bromion racemosi (dans les secteurs plus humides), les prairies pacagées du Cynosurion cristati, de l'Oenantion fistulosae et de l'Agropyro-Rumicion.

Elles sont riches en graminées, les plus communément rencontrées étant l'avoine élevée, la houlque laineuse, le pâturin commun, la trisète dorée, l'ivraie vivace, la crételle et l'orge faux-seigle, accompagnés par le vulpin utriculé (espèce des prairies fraîches fauchées, en régression dans toute la Champagne-Ardenne et inscrite sur la liste rouge régionale des végétaux), la gaudinie fragile (méridionale proche de sa limite d'aire), la flouve odorante, l'avoine pubescente, la fétuque roseau, la fétuque des prés, le vulpin des prés... Les légumineuses sont également bien représentées (trèfle des prés, trèfle blanc, trèfle élégant, trèfle fraise, gesse des prés, vesce à épis, vesce cultivée, sainfoin, lotier corniculé...). On y rencontre également la berce sphondyle, la carotte sauvage, le grand boucage, l'achillée millefeuille, la petite oseille, le lychnis fleur de coucou, le crépis bisannuel, le salsifis des prés, le peucédan à feuilles de carvi, la centaurée jacée, le plantain lancéolé, la grande marguerite, les renoncules (âcre et rampante), la potentille rampante, le cirse des champs et dans les zones plus fraîches, le brome en grappes, l'œnanthe fistuleuse, la succise des prés, le silaüs des prés, le carvi, le colchique des prés, l'orchis à larges feuilles, certaines laîches (laîche hérissée, laîche distique, laîche écailleuse, laîche des renards, laîche des lièvres...), des joncs divers (jonc glauque, jonc à fruits luisants, jonc à tiges comprimées, jonc épars, jonc aggloméré) et des espèces hygrophiles trangressives des marais (phragmite, baldingère, lysimaque nummulaire, prêle des marais, iris faux-acore, etc.). Dans les zones en coteau en bordure de la vallée (vers Laneuvelle, Vicq et Coiffy-le-Bas), on rencontre une forme plus sèche avec, à coté des espèces typiques de la prairie de fauche toujours bien représentées (houlque laineuse, fétuque rouge, achillée millefeuille, flouve odorante, gesse des prés, pâturin des prés...), des espèces transgressives des pelouses des coteaux (brome dressé, brize intermédiaire, brachypode penné, laîche glauque, laîche tomenteuse, petite sanguisorbe, lin purgatif, petit trèfle jaune, trèfle jaunâtre, violette hérissée, orchis bouffon, orchis pyramidal, renoncule bulbeuse, épervière petite piloselle, primevère officinale, gaillet jaune, genêt des teinturiers, ail des vignes, serpolet...).

La flore des prairies recèle cinq espèces rares inscrites sur la liste rouge régionale : le vulpin utriculé, le trèfle jaunâtre, la renoncule sardonie, l'orchis incarnat et une petite fougère, l'ophioglosse.

Une belle ripisylve (à saule blanc, frêne, aulne glutineux, érable sycomore, peuplier noir, chêne pédonculé, aubépine monogyne, saule à trois étamines, saule fragile, saule des vanniers, saule pourpre) suit le cours de l'Amance, de la Petite Amance et de leurs affluents. Elle peut s'étoffer par endroits pour donner une aulnaie-frênaie alluviale, avec une strate herbacée particulièrement bien développée. La strate arborescente est dominée par le frêne et l'aulne qu'accompagnent le charme, l'érable champêtre, le bouleau blanc, l'orme de montagne, le cerisier à grappes, le merisier. La strate arbustive comprend le saule cendré, la viorne obier, le cassis (inscrit sur la liste rouge régionale), le groseillier à maquereaux, le groseillier rouge... La strate herbacée est constituée par la stellaire des bois, très rare en plaine (venue des Vosges, elle ne possède que quelques stations en Haute-Marne où se situe sa limite de répartition), la pulmonaire obscure (espèce centreuropéenne assez rare en France), le dryoptéris borreri (fougère nouvellement découverte en Haute-Marne), l'ail des ours, le brome de Benecken, la primevère élevée, le lierre, la laîche des bois, l'anémone des bois, l'oxalis petite oseille, la véronique des montagnes, la violette des bois, l'euphorbe faux-amandier. Dans les zones humides, elle s'enrichit en grandes herbes comme la baldingère, la cardère velue, valériane officinale rampante, l'angélique sylvestre, le houblon, l'épiaire des bois, la fétuque géante, la fougère spinuleuse, l'alliaire, etc.

Divers milieux marécageux se rencontrent dans la vallée, souvent en mosaïque avec de petits bois d'aulnes ou le long des fossés, dans les prairies abandonnées ou encore formant la strate herbacée des frênaies à hautes herbes :

- cariçaies à grandes laîches, avec la laîche paradoxale (protégée en Champagne-Ardenne) et la laîche distante, inscrites toutes les deux sur la liste rouge régionale, la laîche raide, laîche des marais, laîche des rives, laîche aiguë, laîche vésiculeuse, laîche d'Otruba, laîche des renards, laîche paniculée...

- roselières (phragmitaies, typhaies, phalaridaies, scirpaies, glycéraies)

- filipendulaies et mégaphorbiaies avec la reine des prés, la cardère velue, l'eupatoire chanvrine, le cirse maraîcher, l'épilobe à petites fleurs, le gaillet des fanges, la salicaire, le liseron des haies, le phragmite, la consoude officinale, l'angélique sylvestre…

- bas-marais à encroûtements tufeux, petite tourbière (cladiaie) et schoenaie à Carex mairii (répertoriés dans deux des quatre ZNIEFF de type I rattachées à la vallée). Trois espèces végétales rares et en voie de disparition s'y observent dont deux espèces protégées : la laîche de Maire, d'origine sud-ouest européenne, rare et disséminée (dont les localités de Champagne-Ardenne constituent la limite absolue de son aire de répartition vers le nord-est), le thélyptéris des marais, rare et en régression et la parnassie des marais.

La rivière de l'Amance et ses affluents portent une végétation aquatique et de bord des eaux bien développée. Les mares sont colonisées par les lentilles d'eau (lentille à trois lobes, petite lentille d'eau) et les algues bleues (Chara). Au niveau des suintements de pente, le long des ruisseaux, fossés et petits chenaux, sur les berges des mares et de certains étangs s'observe une végétation de bordure avec la renoncule scélérate, le jonc des crapauds, la véronique des ruisseaux, la renouée bistorte, le poivre d'eau, le populage des marais, la cardamine amère, le cresson de fontaine, la menthe aquatique, la petite berle, le faux cresson...

Cette petite vallée est extrêmement riche du point de vue faunistique : elle abrite de nombreux insectes, amphibiens, oiseaux et mammifères protégés et inscrits sur les listes rouges nationales et régionales.

Parmi la faune entomologique, on note la présence de deux papillons tout à fait remarquables. Le cuivré des marais (Lycaena dispar rutilus) et le damier de la succise (Euphydryas aurinia) sont rarissimes et protégés en France (depuis 1993) et en Europe par la Convention de Berne (annexe II), sont inscrits dans le livre rouge de la faune menacée en France (dans la catégorie en danger d'extinction), sur les listes rouges européennes (annexes II et IV de la directive Habitats) et sur la liste rouge des insectes de Champagne-Ardenne.

Elle est également très intéressante au niveau avifaunistique, comme en témoigne le busard cendré qui l'a choisie pour nicher : elle représente de ce fait un des derniers sites naturels de nidification de l'espèce en Champagne-Ardenne. Le milan noir, le milan royal et le busard Saint-Martin (inscrits sur la liste rouge)sont aussi considérés comme nicheurs sur le site. La mise en place des mesures agri-environnementales (à travers les CTE) telles que les fauches tardives au 15 juillet favorisent sans nul doute les passereaux prairiaux que sont le tarier des prés, le tarier pâtre, le bruant proyer bien représentés ici. La ripisylve et les vieux arbres des prairies et pâtures ont favorisé le maintien et la reproduction du torcol fourmilier, du pic cendré, de la huppe fasciée, du rougequeue à front blanc, du moineau friquet, de la pie-grièche écorcheur (voire du pigeon colombin dont un individu a été entendu). Les zones à hautes herbes (phragmitaies, filipendulaies, marais) hébergent de belles populations de rousserolle verderolle. L'alouette lulu niche dans certaines prairies de la vallée (au niveau de Coiffy-le-Haut). Ainsi sur les 73 espèces d'oiseaux inventoriés, onze font partie des listes internationales (directive Oiseaux), nationales (livre rouge de la faune menacée en France) ou régionale (liste rouge des oiseaux de Champagne-Ardenne).

Le sonneur à ventre jaune, crapaud caractéristique de ce type de milieu, le triton crêté et la rainette arboricole se reproduisent dans la ZNIEFF : ces batraciens sont en régression dans la plupart des pays d'Europe, ils sont protégés internationalement (annexe II de la convention de Berne), nationalement (depuis 1993) et inscrits sur les listes rouges régionale, française (catégorie vulnérable) et européenne (annexes II et/ou IV de la directive Habitats). On y observe aussi le triton alpestre, le triton palmé et de nombreuses grenouilles (verte, rousse et agile).

Entre les herbes folles et les ruisseaux à eaux vives se rencontre également la musaraigne aquatique (inscrite sur la liste rouge régionale des mammifères). Le renard, le blaireau, la fouine, la belette et le chevreuil fréquentent aussi le site.

Ce secteur présente un intérêt paysager de premier ordre, malheureusement certains signes de dégradations sont déjà perceptibles comme par exemple le creusement d'étang de plaisance (notamment celui de Laferté-sur-Amance, à l'utilité douteuse et à l'esthétique détestable), le drainage, la mise en pâture ou l'intensification de certaines prairies humides et les plantations de peupliers. Des plans de gestion sont mis à l'œuvre dans certaines parcelles : en plus des CTE, on peut citer une opération de défrichage (avec l'agriculteur concerné) et de réimplantation d'une prairie sur environ 2 hectares de superficie, (sur la commune de Coiffy-le-Haut). De plus 5 hectares de prairies (également à Coiffy-le-Haut) sont la propriété du Conservatoire du Patrimoine Naturel de Champagne-Ardenne.

Commentaires sur la délimitation

Les limites de la ZNIEFF suivent les contours du lit majeur de la vallée de l'Amance et de ses affluents depuis Vicq et Laneuvelle jusqu'à Maizières-sur-Amance et Pisseloup : elles prennent en compte les milieux les plus riches du point de vue floristique et faunistique. Une partie de la limite sud de la ZNIEFF (environ le tiers) suit la limite interdépartementale entre la Haute-Marne et la Haute-Saône, matérialisée par le cours de la rivière. Une petite partie, située au nord sur la commune de Coiffy-le-Haut, prend en compte la prairie du Conservatoire du Patrimoine Naturel de Champagne-Ardenne située sur le coteau surplombant la vallée.