La ZNIEFF II de la vallée de la Marne entre les communes de Chaumont et de Gourzon occupe un territoire de plus de 2 700 hectares dans le département de la Haute-Marne. Elle englobe deux ZNIEFF de type I (prairies de fauche et bois alluviaux au sud de Viéville et rivière la Marne et étang à Condes).
Elle représente surtout un vaste ensemble de milieux prairiaux riches en flore (plus des 3/4 de la superficie totale de la ZNIEFF) et très localement des bois alluviaux, des milieux marécageux (mégaphorbiaies à orties, magnocariçaies, ourlets à hautes herbes et roselières) et, sur certains coteaux surplombant la vallée, des bois et des groupements de pelouses. La rivière et les ruisseaux associés possèdent des groupements aquatiques localement bien développés et sont par endroits ourlés par une belle ripisylve. Des sources (tufeuses ou non tufeuses), ainsi qu'une résurgence ("la Source Bleue") se rencontrent aussi dans la ZNIEFF. Des haies et des vergers, des étangs, des gravières, des jardins, des cultures et des plantations diverses (pins sylvestres, peupliers et aulnes) complètent la végétation du site.
La gamme des groupements prairiaux est fonction de la nature du sol, de l'inondation ou du traitement (fauche, pâture ou traitement mixte) : les prairies de fauche relèvent de l'Arrhenatherion elatioris (dans les zones peu ou pas inondées), les prairies humides du Bromion racemosi et de l'Oenanthion fistulosae, les prairies pacagées (de loin les plus représentées) du Cynosurion cristati et de l'Agropyro-Rumicion.
Elles sont riches en graminées, les plus communément rencontrées étant l'avoine élevée, la houlque laineuse, la fléole des prés, la trisète dorée, l'ivraie vivace, la crételle, le pâturin commun, la flouve odorante, la fétuque des prés, le vulpin des prés. Les légumineuses sont également bien représentées (trèfle des prés, trèfle blanc, trèfle élégant, trèfle fraise, gesse des prés, vesce des haies, vesce cultivée, minette, luzerne, lotier corniculé, sainfoin...).
On rencontre aussi dans les prairies pâturées les renoncules (âcre et rampante), la potentille rampante, la pâquerette, le plantain lancéolé, le pissenlit, le cirse des champs et dans les prairies fauchées la berce sphondyle, la carotte sauvage, l'achillée millefeuille, le salsifis des prés, la petite oseille, le lychnis fleur de coucou, le crépis bisannuel, le peucédan à feuilles de carvi, la centaurée jacée, la grande marguerite…
Dans les zones plus fraîches, apparaissent le brome en grappes, la fétuque roseau, l'œnanthe fistuleuse, l'inule des fleuves (rare), l'euphorbe ésule (ces deux dernières étant inscrites sur la liste rouge des végétaux menacés de Champagne-Ardenne), le léontodon d'automne, la succise des prés, le colchique des prés, l'orchis à larges feuilles, la cardamine des prés, le cumin, la renouée bistorte (espèce montagnarde en limite d'aire absolue), certaines laîches (laîche hérissée, laîche distique) et des joncs divers (jonc glauque, jonc épars, jonc aggloméré). Dans les zones de coteau en bordure de la vallée, on rencontre une forme plus sèche avec, à coté des espèces typiques de la prairie toujours bien représentées, des espèces transgressives des pelouses (brome dressé, brachypode penné, laîche glauque, petite pimprenelle, trèfle des champs, renoncule bulbeuse, primevère officinale, ail des vignes...).
Quelques pelouses se rencontrent au niveau des coteaux bien exposés (comme par exemple vers Donjeux, Vouécourt, Gudmont, Autigny). La flore est très diversifiée et comprend notamment une espèce protégée en Champagne-Ardenne, la laîche précoce et deux espèces appartenant à la liste rouge régionale, le fumana vulgaire et l'orpin rougeâtre. Les graminées dominent largement la flore herbacée (brome dressé, koelérie à crêtes, fétuque de Léman,, brachypode penné, seslérie bleue…). Elles sont accompagnées par l'hélianthème jaune, la globulaire, le séséli des montagnes, la brunelle à grandes fleurs, la potentille printanière, la germandrée petit-chêne, la laîche de Haller et des orchidées variées. Des broussailles à genévrier, orme champêtre, cornouiller sanguin, épine noire, aubépine monogyne s'installent çà et là.
Une belle ripisylve (à saule blanc, frêne, aulne glutineux, érables sycomore et plane, chêne pédonculé, tremble, aubépines monogyne et épineuse, saules à trois étamines, fragile, pourpre et cendré, sureau noir, bourdaine) suit de façon plus ou moins continue, le cours de la Marne et des petits ruisseaux qui la rejoignent. Elle peut s'étoffer par endroits pour donner une aulnaie ou une aulnaie-frênaie alluviale, avec une strate herbacée particulièrement bien développée. La strate arborescente est dominée par le frêne et l'aulne qu'accompagnent le chêne pédonculé, l'érable sycomore, le merisier et l'orme lisse (inscrit sur la liste rouge régionale). La strate arbustive comprend le saule cendré, le noisetier, l'aubépine monogyne, la viorne obier, le cassis (inscrit sur la liste rouge régionale), le groseillier à maquereaux, le groseillier rouge, la ronce bleue, le sureau noir. La strate herbacée est constituée par la laîche pendante, la laîche paniculée, l'angélique des bois, la circée de Lutèce, la valériane rampante, le gaillet des marais, l'eupatoire chanvrine, l'épiaire des bois, la cardère velue, etc.
Divers milieux marécageux se rencontrent çà et là dans la vallée : ce sont des cariçaies à grandes laîches (laîche raide, laîche des marais, laîche des rives, laîche aiguë, laîche vésiculeuse, laîche paniculée...), des roselières (à phragmite, typhe à larges feuilles, baldingère, glycérie aquatique), des filipendulaies et mégaphorbiaies (à reine des prés, cardère velue, eupatoire chanvrine, le cirse maraîcher, épilobe à petites fleurs, gaillet des fanges, salicaire, liseron des haies, consoude officinale, angélique sylvestre…).
La rivière et ses affluents portent des végétations aquatiques et de bord des eaux localement bien développées à renoncule flottante, myriophylle en épis, nénuphar jaune, lentille à trois lobes, petite lentille d'eau, scirpe à une écaille, élodée du Canada, glycérie flottante. Une plante rare inscrite sur la liste régionale des végétaux menacés, le faux-riz, se rencontre, au niveau des berges exondées, au bord de la Marne et autour de l'étang situé à Condes.
Cette vallée est extrêmement riche du point de vue faunistique : elle recèle de nombreux amphibiens, oiseaux et mammifères protégés et inscrits sur les listes rouges nationales et régionales.
La rivière est riche du point de vue halieutique ; elle abrite notamment certains poissons très caractéristiques des eaux claires peu polluées comme la lamproie de Planer et le chabot (inscrits tous les deux à l'annexe IV de la directive Habitats), la truite sauvage, l'ombre commun, la vandoise, le vairon, la loche franche : la truite trouve à Condes l'une de ses plus belles frayères du département, l'ombre commun (bien représenté) est inscrit à l'annexe III de la convention de Berne, à l'annexe V de la directive Habitats et figure dans le livre rouge de la faune menacée en France. Ils sont accompagnés par le brochet, le gardon, la perche, le rotengle, l'ablette, le chevaine, l'anguille, l'écrevisse américaine, etc. Le ruisseau de Ribeveaux (situé à Vignory) bénéficie, depuis le 12/12/1994, d'un arrêté de protection de biotope (pour la truite fario) sur 1700 mètres de son cours.
Les amphibiens sont également très bien représentés et comportent, parmi les huit espèces contactées sur le territoire de la ZNIEFF, le crapaud accoucheur (inscrit à l'annexe II de la convention de Berne et à l'annexe IV de la directive Habitats). On peut également y rencontrer les tritons alpestres, ponctués et palmés, le crapaud commun, les grenouilles vertes, rousses et agiles. Le lézard des murailles (inscrit à l'annexe IV de la directive Habitats) et la coronelle verte et jaune (inscrite sur la liste rouge régionale des reptiles) fréquentent les endroits ensoleillés.
La population avienne est bien diversifiée : les herbages constituent les zones de chasse de nombreux rapaces dont notamment les deux espèces de milans (inscrits sur la liste rouge régionale) qui nichent dans la ZNIEFF, le faucon hobereau, la bondrée apivore, la buse variable, le faucon crécerelle. Le cincle plongeur (inscrit sur la liste rouge) et le martin pêcheur (nicheurs sur le site) ont fait l'objet de plusieurs observations. Les prairies accueillent, pour leur nidification et/ou leur alimentation la pie-grièche écorcheur (liste rouge), le pipit farlouse (assez rare en Haute-Marne), la grive draine, le bruant jaune, etc. Les boisements attirent les pics (pic vert, pic épeichette), le pigeon ramier, diverses fauvettes et mésanges, le geai des chênes, le pinson des arbres, la graine draine et la grive musicienne, le pouillot véloce, etc. Les plans d'eau et la rivière sont fréquentés par l'avifaune aquatique (foulque macroule, grèbe huppé, canard colvert, poule d'eau, hirondelle des rivages, bergeronnette des ruisseaux). Dans les milieux humides à hautes herbes niche la rousserolle effarvatte. En hiver, on peut rencontrer la grue cendrée, le grand cormoran, le pinson du nord, le tarin des aulnes...
Le site est très fréquenté par les grands mammifères (chevreuil, sanglier), par certains carnivores (hermine, belette, fouine, martre, putois, chat sauvage), par de nombreuses musaraignes (dont la crossope aquatique protégée et inscrite sur la liste rouge régionale des mammifères), ainsi que par divers petits rongeurs (loirs, campagnols, mulots...). Le pont sur la Marne de Condes abrite une remarquable colonie de chauves-souris : le grand murin et le vespertilion de Bechstein, protégés en France (depuis 1981) et en Europe par la convention de Berne (annexe II) et la directive Habitats (annexes II et IV), figurant dans le livre rouge de la faune menacée en France (dans la catégorie "vulnérable") et inscrits sur la liste rouge régionale. On y rencontre également le vespertilion à moustaches et le vespertilion de Natterer, protégés et inscrits sur la liste rouge des mammifères de Champagne-Ardenne (dans la catégorie "en déclin"), ainsi qu'une colonie de reproduction du vespertilion de Daubenton, figurant comme espèce vulnérable dans la liste rouge régionale. L'intérêt du pont est également historique : construit en 1833, il est en propriété communale et inscrit aux Monuments Historiques depuis 1984. Le castor a enfin été aperçu en 1998 à Fontaines-sur-Marne.
La ZNIEFF présente un intérêt paysager de premier ordre ; elle présente un bon état général, malheureusement certains signes de dégradations sont déjà perceptibles comme par exemple, l'accroissement des cultures aux dépens des prairies, la populiculture (encore très réduite), le creusement d'étang de plaisance (en augmentation)...
La limite correspond au lit majeur de la Marne (le plus riche du point de vue faunistique et floristique) à l'exception des zones urbanisées, depuis Chaumont jusqu'à Gourzon. Quelques pelouses relictuelles et bois sur pente y ont été associés. En aval de Gourzon, la vallée, très industrialisée, perd de son intérêt.